Nous prenions le repas du soir, lorsque Léwanika m a envoyé
comme cadeau une énorme calebasse de lait caillé, et, à l’adresse de
mes hôtes, un morceau de jeune hippopotame rôti; cette viande
tendre et savoureuse, lorsqu’elle provient d’un jeune animal, ressemble
à la chair du porc.
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19 août. — Aujourd’hui lundi, accompagné de M. Ad. Jalla qui
veut bien m’introduire, je me rends à Léalouyi pour remettre au
roi les cadeaux que je suis chargé de lui offrir au nom de l’expédition
et lesquels, selon l’étiquette, doivent être présentés lors de la première
visite. Ils consistent en un mousqueton de cavalerie mannlicher,
dernier modèle, avec cartouches; des couvertures., des mouchoirs
de couleur et des objets d’habillements. Nous suivons la grande
chaussée établie par M. Coillard ; elle est coupée par un pont de
bois au-dessous duquel passe le canal et relie la station missionnaire
à la capitale. Cette chaussée permet seule une communication
suivie avec Léalouyi, lors de la saison des inondations, hnounda) ;
à cette' époque il faut traverser en canot la plaine qui se trouve
sous l’eau.
Nous laissons sur notre droite un groupe de huttes, les greniers du
roi. Nous approchons et traversons la place publique, parsemée d’arbres
à caoutchouc. C’est là que le roi rend la justice lui-même. Nous
arrivons à l’entrée de la résidence, entourée d’une haute palissade en
roseaux; cette résidence, située au milieu de Léalouyi, est séparée des
huttes des chefs et des sujets par une large allée circulaire.
Dans ce pays où l’ordre hiérarchique est très sévère, les huttes
diffèrent de grandeur suivant l’importance des chefs. Il en est de
même pour toutes les relations de la vie; un inférieur, par exemple
n’a pas le droit d’avoir des armes ou des plats aussi bien ornés
que ceux de son supérieur en grade.
Une ouverture étroite, pratiquée dans le rideau de roseaux, nous
mène à une cour intérieure centrale, Voici la demeure de Léwanika;
contrairement aux usages du
pays, elle est rectangulaire, les
murs sont construits en terre
battue mélangée de bouse de
vache, laquelle tient lieu de
chaux. Dix-huit piliers de bois
soutiennent un toit de chaume
qui forme un auvent. Vis-à-vis
et de l’autre côté de la cour, le
kashandi, chambre privée du
roi. Autour de la maison royale
proprement dite , le harem ,
grandes huttes rondes, hautes
d’une dizaine de mè tres et admirablement
construites ; quoique
comprises dans, d’enceinte de
la résidence, chacune est entourée d’une palissade élevée ; tout est
très propre.
Le roi est polygame; cette condition ne lui a pas permis jusqu’à
maintenant de se convertir au christianisme, quoiqu’il le protège dans
son pays et qu’il fréquente assidûment le culte.
Au point de vue politique, chacune de ses femmes représente un
groupe de vassaux ou une tribu.
Nous sommes reçus par Léwanika dans un hall couvert et tapissé
de nattes ; il nous fait asseoir à ses côtés. Homme dans la force