dix de ses sujets, ne tarde pas trop à faire son apparition. Il ne semble
pas personnifier la franchise. Après les salutations d’usage, il commence
par me dire que le grain est très rare, qu’il ne peut pas m’en
fournir. Il en faut pourtant, car j ’ai là derrière moi une trentaine
d’affamés et il me reste une unique calebasse d’arachides. Rien
de mieux à faire que de patienter : assis sous un arbre, je fais
apporter le sac qui contient les perles de verre, puis comme à l’ordinaire
en pareille occasion, je place en évidence des colliers bleus,
blancs, noirs. Le cercle se resserre, mes objets d’échange sont discutés,
c’est bon signe; enfin, j ’entends les femmes qui pilent du sorgho.
Le ravitaillement sera assuré! Mayoumba lui-même disparaît; il
revient avec un chevreau noir porté sur les épaules de l’up de ses
suivants. 11 me le présente comme un cadeau personnel. Un couteau
lui est aussitôt offert en retour. Au bout d’un certain temps, j ai
devant moi plus de nourriture que les hommes n’en peuvent emporter.
Visite à la demeure du chef. Pour la première fois dans cette contrée,
je vois des huttes avec des murs en terre. Des enfants au ventre
proéminent, résultat d’un mauvais régime, jouent près de là.
Mayoumba, momentanément, est plein d’égards. Mais, sachant par
expérience, qu’il n’est pas bon d’avoir son campement près d’un
village, je décide de passer cette après-midi même sur l’autre rive
de la rivière Loumbé.
Nous avons vu dans ces parages la piste que suivent les missionnaires
du Zambèze, lorsqu’ils se rendent par voie de terre de Kazoun-
gula à Léalouyi, piste que nous traverserons dorénavant à plusieurs
reprises. Mayoumba lui-même nous sert de guide; nous piétinons longtemps
dans une boue marécage.use avant d’arriver à la rivière proprement
dite, que nous traversons facilement, grâce aux deux canots
d’un batelier amené par le chef.
Klass Africa souffre ce soir de la fièvre occasionnée par les fréquentes
traversées d’eau et de marécages effectuées ces derniers
temps. Cette circonstance m’oblige à ne pas poursuivre des gnous
aperçus dans les environs;
mais à surveiller
mes hommes de près.
9 août. — 11 faut
renoncer à avancer.
Klass Africa est aujourd’hui
très malade;
je lui administre
de fortes doses
de quinine et de calo-
mel. 11 passe la journée
étendu, dans un
état de torpeur, semi-inconscient et pouvant à peine remuer.
La maladie de Klass Africa, en me forçant de m’arrêter, me met
dans une situation difficile et inquiétante. En effet, lorsque ces
indigènes ne travaillent pas, ils se démoralisent facilement. Dans ce
cas, des désertions en masse sont à craindre; elles causent la ruine
d’une expédition. En outre, je compte qu’au train dont mes trente
hommes font disparaître les vivres et malgré les provisions achetées
le jour précédent à Mayoumba, il ne me reste plus que pour
quarante-huit heures de nourriture, soit deux calebasses de sorgho,
deux de fèves et une d’arachides. Sur mon ordre, l’un de mes
hommes, Mabona, traverse le Loumbé à la nage afin de solliciter de