un convalescent, tel que je le suis encore, sans souffrances de tous
genres. Souvent il m’a fallu serrer les dents et faire appel à toute
1 énergie dont j étais capable. Combien un peu de repos, des cahotements
moins prononcés, des fruits et des légumes frais, ou seulement
de l ’eau pure et glacée-, m’eussent soulagé !
Les jours passent; enfin, le 7 novembre, nous apercevons dans le
lointain la ligne bleue des collines derrière lesquelles se trouve Boulouwayo.
Nous recevons la visite de plusieurs ma-Kalaka, ces anciens
esclaves des cruels ma-Tébélé; ce sont de beaux hommes, bien
découplés, et qui, eux aussi, ne dédaignent pas de se parer de verroteries.
La physionomie de la contrée change. Adieu les plaines; nous
sommes dans la région des collines, sur les pierres desquelles notre
chariot, dont la caisse repose directement sur les essieux, fait des
bonds désordonnés. Passages souvent difficiles, en particulier dans les
lits encaissés des rivières, comme celui du Gway, dont les berges très
escarpées, semblent défier la traversée pour quelque véhicule que-ce
soit.
Le 10 novembre, nous foulons le sol du Matébéléland; des « kraals »
apparaissent çà et là ; les arbres sont touffus et l’air est plus vif ; en
outre, la piste devient meilleure. Il en est temps : quelques-uns des
boeufs, les plus faibles, réduits à l ’état de squelettes, se couchent pendant
les marches; il faut alors les remettre sur leurs jambes et,
suivant les cas, leur donner une autre place dans l’attelage. 11 est
douloureux de voir souffrir et d’entendre gémir ces pauvres animaux
sans qu’il soit possible de les soulager; mais il faut aller de l’avant,
toujours de l’avant! Il y va de la vie. Un jour, Reid adû abattre un boeuf
qui décidément, ne pouvait plus avancer.
* *
13 novembre. — Vers le soir, nous sommes en vue de Boulou-
wayo *
Quel contraste, après notre vie passée, de nous trouver, au bout de
quelques heures, assis devant une table relativement bien fournie,
puis de pouvoir dormir tranquillement dans un vrai lit!...
d. En pays français, on a pris l’habitude d’écrire Boulouwayo; en anglais, Bulurvayo;
je conserverai l’orthographe française. D’après la langue du pays, ou devrait écrire,
parait-il, Bolavayo ou Bolaouayo.