la Chartered Company, sous les ordres du Dr Jameson, a franchi la
frontière du Béchuanaland; il a envahi le Transvaal et il avance à
marches forcées au Secours des « uitlanders » de Johannesburg.
/ " jànvier 1896. — Journée resplendissante ; le soleil brille dans
toute sa gloire, la nature est en fête, tout est vert et fleuri, les roses
embaument ; contraste frappant avec les inquiétudes qui régnent dans
cette ville en rébellion. Combien de maisons fermées et divisées, de
femmes et d’enfants envoyés à la hâte au loin, à l’abri de tout danger,
pendant que les pères, les frères, les époux, restent sur place pour
parer à toute éventualité.
L’effusion du sang pourra-t-elle être évitée? Le président de la
République du Transvaal, M. Ivriiger, a, de Prétoria, proposé un
armistice. Une députation de la National Union est partie ce matin
pour la capitale; pourra-t-il en résulter un arrangement à l’amiable?
C’est une question qui dans l’état où sont les esprits, ne mettra pas
beaucoup de temps à être résolue.
En ville, l’enthousiasme est à son comble; presque tous les sujets
des différentes branches de la race anglo-saxonne domiciliés à Johannesburg,
y compris les Américains et les Australiens, ont adhéré ail
gouvernement provisoire ou « Reform Committee » ; la majorité des
Français et des Allemands semble vouloir rester neutre.
Cinq camps composés de volontaires, forment au dehors de la ville
une ligne de grand’gardes et défendent ses approches. Quoique la
révolte existe, un ordre excellent règne dans ces rues où la police
légale a été retirée et remplacée par des constables volontaires.
La plupart des magasins ont barricadé leurs devantures avec des
planches ou des plaques de tôle. Un peu partout, des affiches indiquent
soit les lieux de rassemblement do-la troupe, soit les locaux où les
femmes, enfants et nécessiteux, pourront trouver aide et protection.
Sur les places publiques, les différents corps composés de volontaires,
qui se: distinguent par des cocardes de différentes couleurs, sont
exercés par des g en s, qui me font l’effet d’être d’anciens officiers ou
sous-officiers. Ils sont tous armés d’un excellent fusil à magasin.
Une grande foule stationne devant le siège du gouvernement provisoire
; les entrées sont gardées par une file de douze sentinelles
rangées sur deux rangs, l’arme au pied. De nombreuses estafettes,
lancées à fond de train, apportent des nouvelles du dehors ou viennent
chercher des ordres. Des bruits divers circulent sur l’approche des
forces de Jameson qui sont attendues avec impatience.
Au Rand club, nous apprenons l’accident de chemin de fer qui a
eu lieu sur la ligne ouverte il y a quelques jours seulement et qui relie
le Transvaal à Natal. Quarante-trois tués et un certain nombre de
blessés ; ce train contenait beaucoup de femmes, d’enfants qui fuyaient
la révolution.
Dans le courant de l’après-midi, le « Reform Committee » fait
annoncer publiquement que le gouvernement de la République sud-
africaine a accepté l’offre de médiation du haut commissaire anglais,
sir Hercules Robinson. 11 quittera le Cap incessamment et arrivera à
Prétoria samedi prochain, dans trois jours.
3 janvier. — Après une journée passée avec des phases d’espoir et
d’anxiété, la ville consternée acquiert la certitude que la troupe de
Jameson vient d’être défaite à vingt-cinq kilomètres de Johannesburg.
Tout en reconnaissant que cette troupe, envahissant en pleine paix
un pays voisin, commettait un acte contraire au droit des gens, il est