charbon. Nous en profitons pour aller à terre et monter par le
nouveau chemin de fer, à l’église de Nossa Senhora Monte, trajet
ravissant. La ligne se déroule au milieu de jardins plantés de cannes
à sucre, de bananiers; voici des camélias en fleurs; plus loin des
enfants nous jettent des roses. De la terrasse de l’église, entourée de
verdure, nous admirons la baie qui s’étend à nos pieds. Sur ses eaux
tranquilles nous distinguons le Norham-Castle qui semble dormir;
c’est bien l’image du « port après la tempête ».
Nous effectuons la descente dans l’une de ces corbeilles en osier
appelées « carro », véhicules rapides, grâce aux routes en pente
pavées de galets glissants. Deux indigènes, cordes en mains, courent
de chaque côté du « carro » et maintiennent l’équilibre ; la vitesse acquise
est considérable. Nous avons encore le temps d aller visiter le marché
des fruits et de cueillir des fleurs au jardin de Mill’s Hôtel, véritable
petit paradis avec sa végétation de serre chaude. Les nuages ne nous
permettent pas de voir le Corral, l’une des plus hautes montagnes
de l’île, au sommet de laquelle je grimpai il y a quelques années.
Les vignobles de Madère, jadis détruits par le phylloxéra, sont
en grande partie reconstitués.
Funchal s’agrandit; elle compte actuellement 30000 âmes, sur
une population totale de 144000 habitants pour lîle entière.
Nous regagnons le bord peu avant le départ.
29 mars. — Beau temps. De bonne heure nous avons en vue le
pic de Ténériffe (12000 pieds) qui domine l’île, la plus importante du
groupe des Canaries. La base en est cachée et nous ne voyons que sa
pointe couverte de neige émerger des vapeurs du matin. Dans le
courant de l’après-midi nous jetons l’ancre pour quelques instants
seulement, afin de débarquer deux ou trois passagers, à quelques
centaines de mètres de Santiago de Santa-Cruz. Nous ne sommes pas
autorisés à aller à terre et c’est du bord que nous jouissons du
pittoresque paysage que nous avons sous les yeux. A distance, ces
maisons roses, blanches, brunes, encadrées dans la verdure, font le
plus joli effet.
Pendant que nous sommes en rade, le Norham-Castle est rejoint
comme a Madère, par de nombreux canots dont les possesseurs
tâchent d’engager les passagers à acheter du tabac et des cigares que
l’on dit excellents. Quoique la marchandise ne soit pas la même, ces
Espagnols font autant de bruit et de démonstrations que leurs
voisins portugais les Madéréens.
Ténériffe a 95000 habitants; sa capitale, Santiago de Santa-Cruz,
compte 20000 habitants.
Depuis Ténériffe, nous ne verrons plus la terre jusqu’au Cap.
30 mars. — Nous passons le tropique du Cancer et cinq jours
après, l’équateur. En entrant dans l’hémisphère austral, nous disons
au revoir à l’Etoile polaire qui disparaît de notre horizon; notre
point de repère sera désormais la Croix du Sud.
Notre activité est actuellement, par la force des choses, tout à
fait concentrée sur la vie du bord. Outre le temps consacré au travail
et à la lecture, cette vie pour qui sait voir et entendre, offre beaucoup
d’intérêt. Les passagers peuvent se mettre au courant des
différents services d’un steamer du genre du nôtre, de 4500 tonnes,
qui est, jusque dans ses moindres recoins, éclairé à l’électricité. La
discipline est admirable à tous les degrés de l’échelle hiérarchique.
D’autres peuvent acquérir des notions d’astronomie, apprendre â