
santé de plusieurs personnes en même
tems.
Quelques bouteilles de vin de Champagne
mousseux achevèrent d’égayer tout le
monde.
Le thé succéda, et arriva avec le beurre,
les tartines et tout l ’appareil qui l ’environne
; le café venoit à la suite , et cédoit
humblement le pas au thé , qui valoit
mieux que lui. On ne boit ordinairement
en France, après le repas, qu’une
tasse d’excellent café , on en prend cinq
ou six de détestable en Angleterre.
Le brandevín, le rhum et quelques autres
liqueurs fortes firent la clôture de ce
banquet philosophique, qui finit à sept heures
et demie j car il falloit être à huit à la
séance de la société , convoquée pour ce
jour-là. Mais avant de sortir, on vint écrire
les noms de tous les convives sur une grande
feuille de papier, et nous payâmes chacun
7 liv. 4 sols, argent de France, pour
notre écot : cela n’est pas cher. *
Je partis avec MM. Banks, Cavendish,
Masckeline, Aubert et le chevalier Engli-
field, avec lesquels je me rendis à la société}
tout le monde étoit fort g a i, mais
d’une gaieté décente.
Je ne voudrois pas, sans doute , de semblables
dîners , si au sortir de-là il falloit
aller traiter les intérêts sacrés d’une grande
nation, ou discuter la meilleure forme
d’un gouvernement: cela ne seroit ni sage ni
prudent. Mais se réunir en assemblée pour
annoncer qu’un électeur Palatin, qui d’ailleurs
a beaucoup de mérite, est agrégé à
une société savante ; il ne peut, dans aucun
cas, en résulter le moindre inconvénient
( î) .
(i) Le grand Corneille, Molière, Dépréaux, Lafontaine
et Racine buvoientaussi quelques petits coups au cabaret; ils
n’en étoient que meilleurs amis et meilleurs poëtes. Ah ! combien,
en dernier lieu, n’eût-il pas été à désirer que quelques
hommes qui ont eu assez d’empire en France pour faire détruire
les académies en les accablant d’injures , et assez de puissance
pour les faire rétablir en les accablant d’éloges, eussent, au lieu
de fuir et d’abandonner dans ces tems de malheur leurs infortunés
confrères, cherché à les réunir dans des banquets modestes
, pour y cimenter une intime union , y resserrer les
liens d’une douce fraternité, et y jurer de défendre avec
courage, et avec l ’arme du talent, les droits sacrés de la
justice et de l’humanité violés ; la France affligée , l’Europ«
entière indignée n’auroient pas à regretter les illustres et malheureuses
victimes qu’on a lâchement laissé livrer à la dent