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 forme  des  membres. 
 L e   caftor,  qui  paroît  être  fort  au  deflous  du  chien  
 &  du  finge  par  les  facultés  individuelles,  a  cependant  
 reçû  de  la  Nature  un  don  prefque  équivalent  à  celui  
 de  la  parole ;  il  fe  fait  entendre  à  ceux  de  fon  efpèce,  
 &  fi  bien entendre  qu’ils  fe  réunilfent  en  focieté,  qu’ils  
 agiffent  de  concert,  qu’ils  entreprennent  &   exécutent  
 de  grands  &  longs  travaux  en  commun,  &  cet  amour  
 focial  ,  auffi-bien  que  le  produit  de  leur  intelligence  
 réciproque  ,  ont  plus  de  droit  à  notre admiration  que  
 l ’adreffe  du  finge  &  la  fidélité  du  chien. 
 L e   chien  n’a  donc  que  de l’efprit,  (  qu’on me  permette, 
   faute de termes,  de profaner  ce  nom )  le  chien ,  
 d is - je ,  n’a  donc  que  de  l’efprit  d’emprunt;  le  finge  
 n’en  a  que  l’apparence, & le  caftor n’a dufens  que pour  
 lui  feul &  les  fiens.  L ’éléphant  leur  eft  fiipérieur  à  tous  
 trois  ;  il  réunit  leurs  qualités  les  plus  éminentes.  La  
 main  eft  le  principal  organe  de  l’adrefle  du  finge ;  
 l’éléphant  au  moyen  de  fa  trompe,  qui  lui  fert  de  
 bras  &  de  main,  &  avec  laquelle  il  peut  enlever  &   
 fàifir  les  plus  petites  chofes  comme  les  plus  grandes,  
 les  porter  à  fa  bouche,  les  pofer  fiir  fon.  dos,  les  
 tenir  embralfées.,  ou  les  lancer  au  loin,  a  donc  le  
 même  moyen  d’adrefîe  que  le  finge  ;  &  en  même  
 temps  il  a  la  docilité  du  chien  ,  il  eft  comme  lui  fuL  
 ceptible  de  reconnoiflànce  &  capable  d’un  fort  attachement  
 ,  il  s’accoutume  aifément  à  l’homme,  fe 
 fôûmet  moins  par  la  force  que  par  les  bons  traitemens,  
 le  fert avec  zèle,  avec  fidélité,  avec  intelligence,  &c.  
 Enfin  l’éléphant,  comme  le  caftor,  aime  la  focieté  de  
 fes  femblables,  il  s’en  fait  entendre;  on  les  voit  fouverrt  
 fe  raffembler,  fe  difperfer,  agir  de  concert,  &  s’ils  
 n’édifient  rien,  s’ils  ne  travaillent  point  en  commun,,  
 ce  n’eft  peut-être  que  faute  d’affez  d’efpace  &  de  
 tranquillité :  car  les  hommes  fe  font  très-anciennement  
 multipliés  dans  toutes  les  terres  qu’habite  l’éléphant :  
 il  vit  donc  dans  l’inquiétude,  &   n’eft  nulle  part paifible  
 pofleffeur  d’un  efpace  aflez  grand  ,  'afiez  libre  pour  
 s’y  établir  à  demeure.  Nous  avons  vu  qu’il  faut  toutes,  
 ces  conditions  &  tous-  ces  avantages,  pour  que  les  
 talens  du  caftor  fe  manifeftent,  &   que  par-tout  oit  
 les  hommes  fè  font  habitués,  il  perd  fon  induftrie  &  
 celle  d’édifier.  Chaque  être  dans  la Nature  a  fon  prix  
 réel  &  fa  valeur  relative ;  fi  l’on  veut  juger  au  jufte  de  
 l’un  &  de  l’autre  dans  l’éléphant,  il  faut  lui  accorder  
 au moins  ,  l’ intelligence  du caftor,  l’adreffe  du  finge,  le  
 fentiment  du  chien,  &  y  ajoûter  enfiiite  les avantages  
 particuliers,  uniques,  de  la  force,  de  la  grandeur  &  de  
 la  longue  durée  de  la  vie ;  il  ne  faut  pas  oublier  fes  
 armes  ou  fes  défenfes ,  avec  lefquelles,  il  peut  percer  
 &  vaincre  le  Lion ;  il  faut  fe  repréfenter,  que  fous fes.  
 pas,  il  ébranle  la  terre;  que  de  fa  main*,  il arrache  les 
 *  Veteres probofcidem elephanti manum appellaverunt.— Eâdemaliquoties  
 jmmmum  e  terra  tollehtem  vidi,  &   aliquando  detrahentem  arborés ramum,.  
 quem  viré yéginti-quatuor fin e  trahentes ad humum Jlethre non potueramusp 
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