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 le  bubalus  de  Belon  ,  le  bifon  d’Écoffe,  celui  d’Amérique  
 ,  &  tous  nos  Naturalises  ont  fait  autant  d’efpèces  
 différentes,  qu’ils  ont  trouvé  de  noms.  La  vérité  eft  
 ici  enveloppée  de  tant  de  nuages,  environnée  de  tant  
 d’erreurs  qu’on  me  faura  peut-être  quelque  gré  d’avoir  
 entrepris  d’éclaircir  cette  partie  de  l’Hiftoire Naturelle,  
 que  la  contrariété  des  témoignages ,  la variété  des  def-  
 criptions, la multiplicité  des noms,  la diverfité  des lieux,  
 la différence  des  langues  &   l’obfcurité  des  temps  fem-  
 bloient  avoir  condamnée  à  des  ténèbres  éternelles. 
 J e   vais  d’abord  préfenter  le -réfultat  de  mon  opinion  
 fur  ce  fujet,  après  quoi  j ’en  donnerai  les  preuves. 
 ï .°  L ’animal  que  nous  connoiffons  aujourd’hui  fous  
 le  nom  de  buffle,  n’étoit  point  connu  des  Anciens. 
 2.0 Ce buffle,  maintenant domeftique  en Europe,  eft  
 le  même que  le buffle  domeftique  ou  fauvage aux Indes  
 &   en  Afrique. 
 3.0  L e  bubalus  des Grecs & des  Romains  ,  n’eft point  
 le buffle,  ni  le  petit  boeuf  de  Belon,  mais  l’animal  que  
 M.rs de  l’Académie  des  Sciences ont décrit fous le nom  
 de  vache  de  Barbarie,  &  nous  l ’appellerons  bubal. 
 1  ça?  L e   petit boeuf de  Belon,  que  nous  avons  vu  &   
 que  nous  nommerons  %ébu,  n’eft  qu’une  variété  dans  
 l’efpèce  du  boeuf. 
 Ç   L e   bonafus  d’Ariftote,  eft  le  même  animal  que  
 le  bifon  des latins.  - 
 6.°  L e   bifon d ’Amérique  pourroit  bien  venir  originairement  
 du  bifon  d’Europe. 
 ~i?  Uurus 
 7 .0  Uurus  ou  aurochs  eft  le même  animal  que  notre  
 taureau  commun  dans  fon  état  naturel  &   làuvage. 
 8.°  Enfin  le  bifon  ne  diffère  de  l’aurochs  que  par  
 des  variétés accidentelles, &  par  conféquent il  eft, aufli-  
 bien  que  l’aurochs,  de  la  même  efpèce  que  le  boeuf  
 domeftique;  en  forte  que  je  crois  pouvoir  réduire  à  
 trois,  toutes  les  dénominations  &  toutes  les  elpèces  
 prétendues  des  Naturaliftes  tarit  anciens  que  modernes, 
   c ’e ff-à -dire ,  à  celles  du  boeuf,  du  buffle  &   
 du  bubal. 
 J e  ne doute  pas  que  quelques-unes  des  propofitions  
 que  je  viens  d’annoncer,  ne  paroiffent  des  affertions  
 halàrdées,  fur - tout  aux  yeux  de  ceux  qui  fe  font  occupés  
 de  la  nomenclature des  animaux,  & qui ont  effayé  
 d ’en  donner  des  liftes;  cependant  il  n’y  a  aucune  de  
 ces  affertions  que  je  ne  fois  en  état  de  prouver ;  mais  
 avant  d’entrer  dans  les  difcuffions  critiques  qu’exige  
 chacune  de  ces  propofitions  en  particulier,  je  vais  ex-  
 pofer  les  obfervations  &   les  faits  qui  m’ont  conduit  
 dans  cette recherche, &   qui m’ayant  éclairé moi-même,  
 ferviront  également  à  éclairer  les  autres. 
 Il  n’en  eft pas  des animaux domeftiques,  à  beaucoup  
 d’égards,  comme  des  animaux  làuvages;  leur  nature,  
 leur  grandeur  &   leur  forme  font  moins  confiantes  &  
 plus  fujettes  aux  variétés,  fur-tout  dans  les  parties  
 extérieures  de  leur  corps;  l’influence  du  climat,  fi  
 puiflànte  fur  toute  la  Nature,  agit  avec  bien  plus  de  
 force  fur  des  êtres  captifs  que  fur  des  êtres  libres;  la  
 Tome X I.  O o