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 elles ;  il  a  la  tête,  le  front,  les  yeux  &  toute  la  face  
 du  bélier,  il  lui  reffemble  auffi  par  la  forme  des  cornes  
 &   par l’habitude entière  du  corps;  enfin,  il  produit  avec  
 la  brebis  domeftique  * ,   ce  qui  feul  fuffiroit  pour  démontrer  
 qu’il  eft  de  la  même  efpèce  &  qu’il  en  eft  
 la  fouche;  la  feule  difconvenance  qu’il  y  ait  entre  le  
 mouflon  &  nos  brebis  ,  c’ eft  qu’il  efl:  couvert  de  
 poil  &   non  de  laine;  mais  nous  avons  vû  que  même  
 dans  les  brebis  domeftiques,  la  laine  n’eft  pas  un  ca-  
 raétère  eflentiel,  que  c ’eft  une  production  du  climat  
 tempéré,  puifque dans les pays chauds  ces mêmes brebis,  
 n’ont  point  de  laine  &  font  toutes  couvertes  de  poil,  
 &  que  dans  les  pays  très-froids  leur  laine  efl  encore  
 aufli  grolfière, auffi rude  que du  poil ;  dès-lors,  if n’eft:  
 pas étonnant  que la brebis originaire,  la brebis  primitive  
 &  fàuvage,  qui  a  dû  foufffir  le  froid  &  le  chaud,  vivre  
 &  fe  multiplier  làns  abri  dans  les  bois,  ne  foit  pas  
 couverte  d’une  laine  qu’elle auroit bien-tôt  perdue  dans-  
 les broflàilles  ,  d’une  laine  que  l’expofition  continuelle  
 à  l’air & l’intempérie  des faifons, auroit en peu  de temps  
 altérée  &  changée  de  nature ;  d’ailleurs,  lorfqu’on  fait 
 * E ß  Ö“  in  Hijpaniâ, fe d   maxime  Corficâ,  non  maxime  abfmile p e-  
 cori  (fcilicet  ovi/i)  genus  mufmonum ,  caprino  vil/o,  quàm pecoris  ydleri „  
 propius :   quorum  e  genere  i f   ovibus  natos  prifci  umbros  vocarunt.  Pfin.  
 H iß .  nat. Iif>.  V I I I ,   cap.  x l i x .  Nota.  On  voit  par  ce  paflàge ,  que  
 Je  mouflon  a  de  tout  temps  produit  avec  la  brebis;  les  Anciens  
 appeloient  umbri,   imbri,  ib ri,  tous  les  animaux  métis  ou  de  race  
 bâtarde. 
 accoupler  le  bouc  avec  la brebis domeftique,  le produit  
 eft une  efpèce de mouflon ;  car,  c ’eft  un  agneau  couvert  
 de  p oil,  ce  n’eft  point  un  mulet  infécond,  c ’eft  un  
 métis  qui  remonte  à  l’efpèce  originaire,  &  qui  paraît  
 indiquer  que  nos  chèvres  &  nos  brebis  domeftiques  
 ont  quelque  chofe  de  commun  dans  leur  origine  ;  &  
 comme  nous  avons  reconnu  par  l’expérience  ,  que  
 le bouc  produit  aifément  avec  la brebis,  mais  que  le  
 bélier  ne  produit  point  avec  la  chèvre,  il  n’eft  pas  
 douteux  que  dans  ces  animaux  ,  toûjours  confidérés  
 dans  leur  état  de  dégénération  &.  de  domefticité,  la  
 chèvre  ne  foit  l’efoèce  dominante,  &  la brebis  J’elpèce  
 fùbordonnée,  puifque  le  bouc  agit  avec  puiflànce  for  
 la brebis,  &  que  le  bélier  eft impuiflànt à  produire avec  
 la  chèvre  :  ainfi  notre brebis  domeftique  eft une efpèce  
 bien  plus  dégénérée  que  celle  de  la  chèvre,  &  il  y   a  
 tout  lieu  de  croire  que  fi  l’on  donnoit  à  la  Ghèvre  le-  
 mouflon  au  lieu  du  bélier  domeftique,  elle  produirait  
 des  chevreaux  qui remonteraient àTelpèce de la chèvre,,  
 comme  les  agneaux  produits  par  le  bouc  &  la  brebis-  
 remontent  à  l’elpèce  du  bélier. 
 Je   fens  que  les  Naturaliftes  qui  ont  établi leurs  méthodes, 
   &  j’ofe  dire ,   fondé  toutes  leurs  connoiflànces  
 en  hiftoire  naturelle,  for  la diftinétion  de quelques caractères  
 particuliers,  pourront  faire  ici  des  objeélions,  &  
 je vais tâcher d’y répondre d’avance ;  le premier caraélère  
 des moutons,  diront-ils,  eft  déporter  de  la  laine,  &   lé  
 premier caractère des chèvres eft d’être couvertes de poil ;; 
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