l ’autre cas, on ne pouvoit l’appaifer qu’en lui donnant
à manger. Lorfqu’il étoit en colère, il fàutoit en avant
& s’ élevoit brufquement à une grande hauteur , en
poufîànt fa tête avec furie contre les murs, ce qu’il
fàifoit avec une prodigieufe vitegETe , malgré fon air
lourd & là malfe pelante. J ’ai été fouvent témoin , dit
M. Parlons, de ces mouvemens que produilbieht l’impatience
ou la colère, fur-tout les matins avant qu’on
ne lui apportât fon riz & Ion fucre ; la vivacité & la
promptitude des mouvemens de cet animal, m’ont fait
juger, ajoute-t-il , qu’il elt tout - à - fait indomptable
& qu’il atteindroit aifément à la courfe un homme qui
l’auroit offenfé.
C e rhinocéros à l’âge de deux ans, n’étoit pas plus
haut qu’une jeune vache, qui n’a pas encore porté;
mai§ il avoit le corps fort long & fort épais ; fa tête
étoit très-greffe à proportion du corps : en la prenant
depuis les oreilles jufqu’à la corne du nez, elle formoit
une courbe concave dont les deux extrémités, c ’efl-à-
dire, le bout fupérieur du mufeau & la partie près des
oreilles font fort relevées; la corne n’avoit encore
qu’un pouce de hauteur, elle étoit noir,e, liffe à fon
fbmmet, mais avec des rugofités à fa bafe St dirigée
en arrière. Les narines font fituées fort bas & ne font
pas à un pouce de drftance de l’ouverture de la gueifle.
La lèvre inférieure efl affez femblable à celle du boeuf,
St la itèvre fupérieure reffemble plus à celle du cheval,
avec cette différence St cet avantage, que le rhinocéros
d u R h i n o c é r o s . 183
peut l’alonger, la diriger; la doubler en la tournant
autour d!un bâton ,• Si fàifir par ce moyen les corps
qu’il veut approcher de fà gueule. La langue de ce
jeune rhinocéros étoit douce comme celle d’un veau *.
Ses: yeux n’avoient nulle: vivacité , ils reffemblent à
ceux du cochon pour la forme, & font fitués très-bas,
c ’efl - à - d ire p lu s près de l ’ouverture des narines que
dans aucun autre animal. Les oreilles font larges . minces
à leur extrémité, St refferrées à leur origine par une
efpèce d’anneau ridé. L e cou efl fort court:, la peau
forme fur cette partie deux gros plis qui l’environnent
tout autour. Les épaules font fort greffes & fort épaiffes,
la peau fait à leur jointure un autre pli qui defeend fous
les: jambes de devant. L e corps de ce jéune rhinocéros
étoit en tout très-épais &.reffembloit très,-bien à celui
daine vache prête à mettre bas. Il y a un autre pli
entre le corps St la croupe, ce pli defeend au defîbus
des jambes de derrière ; St enfin , il y a encore un autre
pli qui environne tranfverfàlement la partie inférieure
de la croupe à quelque diflance.de fa queue; le ventre
étoit gros St pendoit prefqu’à terre, fur-tout à la partie
* Nota. Que ta plufpart des Voyageurs'& tous les Nàturaliflès, tant
anciens que modernes, ont dit que ia tangue du rhinocérfis ' étèit
extrêmement,rude, & que les papilles en étoient fi poignantes, qu’avec
£1 langue feule il écorchoit un homme & enlévoit la chair juiqu’aux
os, C e fait, que l’on trouve par-tout, me paroît très-douteux St même
mal imaginé, puilque le rhinocéros ne mange point de chair, &
qu’en .général les aaimaux qui ont la langue rudft- font- ordinaircmenî
carnaffiers.