84. H i s t o i r e N a t u r e l l e
33 enflent des chaînes & des cordes autour de leur corps
33 & même de leurs jambes. Ges gens-ià nous dirent une
33 chofe iurprenante & qui eft tout-à-fait admirable, fi
« on peut la croire ; c’eft que ces éléphans ayant été une
» fois attrapés & étant fortis du piège, fi on les fait entrer
$ dans les bois, ils font dans la défiance & arrachent
a avec leur trompe une greffe branche dont ils vont,
» fondant par-tout avant que d afleoir leur pied, s’il n’y
k a point de trous à leur paflàge pour n’ être pas attrapés
33 une fécondé fois; ce qui fkifoit defefpérer aux chaffeurs,
33 qui nous contoient cette hiftoire., de pouvoir reprendre
51 aifément les trois éléphans qui leur étoient échappés__
33 Nous vimes les deux autres éléphans qu’on avoit pris,
33 chacun de ces éléphans fàuvages étoit entre deux
à éléphans privés; & autour des fàuvages il y avoit fix
» hommes tenant des lances à feu , qui parloient à ces
| animaux, en leur préfentant à manger, & difànt, en leur
V langage, -prends-cela i r le mange. C ’étoient des petites
g bottes de foin, des morceaux de fucre noir & du riz
i cuit avec de l’eau & force grains de poivre. Quand
» l’éléphant fàuvage ne vouloit pas faire ce qu’on lui
33 commandoit, les .hommes ordonnoient aux éléphans
| privés, de le battre, ce qu’ils faifoient auflï-tôt, l’un le
? frappant fur le front & fur la tête avec fà trompe, &
» lorfqu’il faifoit mine de fe revancher contre celui - là ,
33 l’autre le frappoit de fon côté, de forte que le pauvre
33 éléphant fàuvage ne fivoit plus où il.en étoit, ce qui
33 lui apprenoit à obéir.
J ’ai plufieurs fois obfervé ( dit Edward Terri * j «
que l’éléphant fait plufieurs chofes qui tiennent plus du «
raifonnement humain , que du fimple inflinét naturel «
qu’on lui attribue. Il fait tout ce que fon maître lui «
commande, s’il veut qu’il faffe peur à quelqu’un, il«
s’avance vers lui avec la même fureur que s’il le \40u- «
loit mettre en pièces, & lorfqu’il en eft tout proche, «
il s’arrête tout court fans lui faire aucun mal. Si le «
maître veut faire affront à un autre, il parle à l’éléphant, «
qui prendra avec fa trompe de l’eau du ruiffeau & de «
la boue, & la lui jettera au nez. Sa trompe eft faite «
d’un cartilage, elle pend entre les dents. Quelques-uns «
l’appellent fa main, à caufe qu’en plufieurs occafions «
elle lui rend le même fervice que la main fait aux «
hommes___ L e Mogol en a qui fervent de bourreaux «
aux criminels condamnés à mort. Si leur conduéleur «
leur commande de dépêcher promptement ces mifé- «
râbles, ils les mettent en pièces en un moment avec «
leurs pieds, & au contraire s’il leur commande de les «
faire languir, ils leur rompent les os les uns après les «
autres, & leur font fouffrir un fupplice auffi cruel que «
celui de la roue ».
Nous pourrions citer encore plufieurs autres faits
auffi curieux & auffi intéreflàns que ceux qu’on vient de
lire; mais nous aurions bien-tôt excédé les limites que
nous avons tâché de nous prefcrire dans cet ouvrage,
nous ne ferions pas même entrés dans un auffi grand
* Voyage aux Indes orientales par Edward T erri, page i j .
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