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 de  ces  liqueurs,  &   en  le  lui  promettant pour  prix  de  
 fes  travaux ;  il  paraît aimer auffi la fumée  du  tabac  ,  mais  
 elle  l’étourdit  &  l’enivre ;  il  craint  toutes  les  mauvaifes  
 odeurs,  &  il  a  une  horreur  fi  grande  pour  le  cochon,  
 que  le  feul  cri  de  cet  animal,  l’émeut &   le fait fuir“. 
 Pour  achever de  donner une  idée du naturel 6c  de l’intelligence  
 de  ce  finguiier  animal,  nous  croyons  devoir  
 donner  ici  des  notes  qui  nous  ont  été  communiquées  
 par M. le Marquis de Montmirailb,  lequel  non  feulement  
 a bien voulu  les demander 6c  les recueillir, mais s’eft auffi  
 donné  la  peine  de  traduire  de  l’Italien  6c  de  l’Allemand  
 tout ce qui  a rapport  à  l’Hifloire  des  animaux  dans quelques  
 livres  qui  m’étoient  inconnus;  fon  goût  pour  les  
 arts  6c  les  fciences,  fon  zèle  pour  leur avancement  font  
 fondés  fur  un  difcernement  exquis  6c  fur  des  connoiff  
 fànces  très-étendues  dans  toutes  les parties  de l’Hiftoire  
 Naturelle;  nous  publierons  donc,  avec autant  de  plaifir  
 que  de  reconnoifïànce,  les  bontés  dont  il  nous  honore  
 6c  les  lumières  que  nous  lui  devons  ;  l’on  verra  dans  
 la  fuite  de cet ouvrage, combien nous aurons d’occafions 
 * L ’éléplinnt qui  étoit  à  la Ménagerie de Veriâilles,  avoit une  grande  
 averfion,  &   même  beaucoup  de  crainte  des  pourceaux,  ie  cri  d’un,  
 petit  cochon  le  fit  fuir  une  fois  fort  loin,  Elien  a  remarqué  cette  
 antipathie. 
 ‘  M.  le Marquis de Montmirail,  Capitaine-Colonel des Cent-Suifiês  
 de  la  Garde  ordinaire  du  corps  du  R o i,  actuellement  Préfident  de  
 l’Académie  Royale  des  Sciences, 
 d e   l ’ É l é p h a n t .  7 7   
 de  rappeler  fon  nom.  «  On  fe  fert  de  l’éléphant  pour  
 le  tranfport  de  l’artillerie  fur  les  montagnes,  6c  c’eft-Ià  «  
 où fon  intelligence  fe  fait  mieux  fentir.  Voici  comme  «  
 il  s’y  prend,  pendant  que  les  boeufs  attelés  à  la  pièce  «  
 de  canon  font  effort  pour  la  traîner  en  haut,  l’éléphant  «  
 pouffe  la culaffe  avec  fon  front,  6c  à  chaque  effort  qu’il  «  
 fait,  il  foûtient  l’affût  avec  fon  genou  qu’il  place  à  la  «  
 roue  :  il  femble  qu’il  comprenne  ce  qu’on  lui  dit.  Son  «  
 conducteur veut-il  lui faire  faire  quelque  corvée pénible,  «  
 il  lui  explique  de  quoi  il  eft  queffion  ,  6c  lui  détaille  «  
 les  raifons  qui  doivent  l’engager  à  obéir;  fi  l’éléphant  «  
 marque  de  la  répugnance  à  ce  qu’il  exige  de  lui,  le  «  
 Cornac  (  c’efl  ainfi  qu’on  appelle  fon  conduCteur  ) pro-  «  
 met  de  lui  donner  de  l’arac  ou  quelque  chofe  qu’il  «  
 aime  alors  l’animal  fe  prête  à  tout;  mais  il  eft  dange-  «  
 reux  de  lui  manquer  de  parole,  plus  d’un  cornac  en  a  «  
 été  la  viétiine.  Il  s’efl  paffé  à  ce  flijet  dans  le Dekan,  «  
 un trait qui  mérite d’être rapporté, 6c  qui,  tout  incroyable  «  
 qu’il  paroît,  eft cependant  exactement vrai. Un  éléphant  «  
 venoit  de  fe  venger de fon cornac  en  le  tuant,  fà femme  «  
 témoin  de  ce  fpeCtacle,  prit  fes  deux  enfans  6c  les  jeta  p  
 aux  pieds  de l’animal  encore  tout  furieux,  en  lui  difànt,  «  
 p u f  que  tu  as  tué  mon  mari,  ôtes-moi  aujji la  vie,  ainji «  
 qu’à  mes  enfans. L ’éléphant  s’arrêta  tout court,  s’adoucit,  «  
 6c  comme  s’il  eût  été  touché  de  regret,  prit  avec  fà  «  
 trompe  le  plus  grand  de  ces  deux  enfans  ,  le  mit  fur  «  
 fon  cou ,  l’adopta  pour  fon  cornac  6c  n’en  voulut  point  «  
 fouffrir  d’autre.  * 
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