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des Indes , & n’a été tranfporté & naturalifé en Italie
que vers le feptième fiècle. C ’eft mal-à-propos que
les Modernes lui ont appliqué le nom de bubalus, qui,
en grec & en latin, indique à la vérité un animal d’Afrique
, mais très - différent du buffle, comme il eft aifé
de le démontrer par les pa{fages des Auteurs anciens.
Si l’on vouloit rapporter le bubalus à un genre, il appartiendrait
pluftôt à celui de la gazelle, qu’à celui du boeuf
ou du buffle. Belon ayant vû au Caire un petit boeuf à
boffe, différent du buffle & du boeuf ordinaire, imagina
que ce petit boeuf pouvoit être le bubalus des Anciens ;
mais s’ il eût foigneufement comparé les caraétères
donnés par les Anciens au bubalus, avec ceux de fon
petit boeuf, il aurait lui-même reconnu fon erreur; &
d’ailleurs, nous pouvons en parler avec certitude, car
nous avons vû vivant ce petit boeuf a bofïe, & ayant
comparé la defcription que nous en avons faite avec
celle de Belon , nous ne pouvons douter que c e ‘ne foit
le même animal. On le montrait à la foire à Paris, en
1 7 5 2 , fous le nom de iéb u ; nous avons adopté ce
nom pour dertgner cet animal, car c eft une race par^
ticulière de boeuf & non pas une efpèce de buffle ou
de bubalus.
Ariftote, en faifent mention des boeufs, ne parle que
du boeuf commun, & dit feulement, que chez les
Arachotas ( aux Indes ) , il y a des boeufs fauvages, qui
diffèrent des boeufs ordinaires & domeftiques, comme
les fangliers diffèrent des cochons ; mais dans un autre
endroit que j’ai cité dans les notes ci-deffus, il donne
la defcription d’un boeuf fàuvage de Poeonie ( province
voifine de la Macédoine ), qu’il appelle bonafus. Ainfi
le boeuf ordinaire & le bonafus font Jes fèuls animaux
de ce genre, indiqués par Ariftote; & ce qui doit paraître
lïngulier, c ’eft que le bonafus, quoiqu’affez amplement
décrit par ce grand Philofophe, n’a été reconnu
par aucun des Naturaliftes grecs ou latins qui ont écrit
après lui, & que tous n’ont fait que le copier fur ce
fujet; en forte qu’aujourd’hui même l ’on ne connoît
encore que le nom du bonafus, fans fàvoir quel eft
l’animal fubfiftant auquel on doive l’appliquer. Cependant,
fi fon fait attention qu’Ariftote, en parlant des boeufs
fauvages du climat tempéré, n’â indiqué-que le bonafus;
& qu’au contraire, les Grecs & les Latins des fiècles
fuivans n’ont plus parlé du bonafus, mais ont indiqué
ces boeufs fauvages fous les noms à ’unis & de bifon ;
on fera porté à croire que le bonafus doit être l’un
ou l’autre de ces animaux; & en effet, l’on verra en
comparant ce qu’Ariftote dit du bonafus, avec ce que
nous connoiffons du bifon, qu’il eft plus que probable,
que ces deux noms ne défignent que le même animal.
Jules Céfàr, eft le premier qui ait parlé de l’urus. Pline
& Paufànias, font aufli les premiers qui aient annoncé
le bifon; dès le temps de Pline, on donnoit le nom
de bubalus à l’urus ou au bifon; la confufion n’a fait
qu’augmenter avec le temps : on a ajoûté au bonafus,
au bubalus, à l’urus, au bifon, le catopleba, le thur,