part un pâturage abondant, il appelle les autres * & les
invite à venir manger avec lui. Comme il leur faut une
grande quantité de fourrage, ils changent fouvent de lieu,
& lorfqu’ils arrivent à des terres enfemencées, ils y
font un dégât prodigieux ; leur corps étant d’un poids
énorme, ils écachent Si détruifent dix fois plus de
plantes avec leurs pieds qu’ils n’en confomment pour
leur nourriture , laquelle peut monter à cent cinquante
livres d'herbe par jour ; n’arrivant jamais qu’en nombre,
ils dévaluent donc une campagne en une heure. Auffi
les Indiens & les Nègres cherchent tous les moyens de
prévenir leur vifite & de les détourner, en fàifànt de
grands bruits , de grands feux autour de leurs terres
cultivées ; fouvent malgré ces précautions, les éléphans
viennent s’en emparer, en chaffent le bétail domeftique,
font fuir les hommes & quelquefois renverfènt de
fond-en-comble leurs minces habitations. Il efl difficile
de les épouvanter, & ils ne font guère fufceptibles de
crainte ; la feule chofe qui les furprenne <3c puiffe les
arrêter, font les feux d’artifice1’ , les pétards qu’on leur
‘ Cùm eis cceterapabuln defecerint,-radices effodimt, quibuspafcuntur;
e quibus pritnus qui aliquam proedam repererit, regreditur ut Ù* Jîios
gregales advocet, ù ' in proedoe communionem deducal. Ælian. iib. IX ,
cap. 5 6.
b On arrête l’éléphant lorfqu'il eft en colère, par des feux d’artifice ;
on Ce Cert du même moyen pour les détacher du combat lorlqu’ora
les y a engages. Re/at, par Fhevenot, tome 111, page s y y . — Les
Portugais n’ont fit trouver aucun remède pour fe défendre de
l ’éléphant, que des lances à fe u , qu’ ils lui mettent dans les yeux
lance, & dont l’effet fubit Si promptement renouvelé
les faifit Si leur fait quelquefois rebrouffer chemin. On
vient très-rarement à bout de les féparer les uns des
autres , car ordinairement ils prennent tous enfemble le
même parti d’attaquer, de paffer indifféremment ou de
fuir.
Lorfque les femelles entrent en chaleur, te grand
attachement pour la focieté cède à un fentiment plus
v if; la troupe fe fépare par couples que le defir avoit
formés d’avance; ils fe prennent par choix, fe dérobent,
& dans leur marche l’amour paraît les précéder & la
pudeur les fuivre ; car le myftère accompagne leurs
plaifirs. On ne les a jamais vû s’accoupler, ils craignent
fur-tout les regards de leurs femblables & connoiffent
peut-être mieux que nous cette volupté pure de jouir
dans le filence, & de ne s’occuper que de l’objet aimé.
Ils cherchent les bois les plus épais , ils gagnent les
folitudes * les plus profondes pour fe livrer fins témoins ,
fans trouble & fans réferve à toutes les impulfions de
la Nature ; elles font d’autant plus vives & plus durables
qu’elles font plus rares & plus long-temps attendries;
lorfqu’il vient à eux. Voyage de de Feynes. Paris , t f y o , page S y .
— On fait combattre au M ogo l des éléphans les uns contre les'
autres; ils s’acharnent tellement au combat, qu’on ne pourroit les
féparer, fi on ne leur jetoit entre deux des feux d’artifice. Voyage de
Bernier. Amfi. i y i o, tome 11, page 6 g.
* Elephanti folitudinespetunt coituri, dT prtecipue fecus flumina. Arift.
hift. Anim. Iib. V , cap. 2. — Pudore nunquam nifi in abdito coëwtf.
Plin. Iib. V I I I , cap. y,.,