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 notices  d’Ariftote,  ce  qu’elles  ont  d’obfcur,  d’oppofé  
 &  même  de  fabuleux,  il  m’a  paru'qu’elles  fe  réduifoient  
 à ce qui  fuit.  Le bonafus  eft un bçeuf fauvage de Pceonie,  
 il  eft  au  moins auftï  grand  qu’un  taureau  domeftique,  &  
 de  la même forme;  mais  fon  cou  eft,  depuis  les épaules  
 juique  fur  les  yeux,  couvert  d’un  long  poil  bien  plus  
 doux  que  le  crin  du  cheval ;  il  a  la  voix  du  boeuf,  les  
 cornes  aflez  courtes  &  courbées  en  bas  autour  des  
 oreilles ;  les  jambes  couvertes  de  longs  poils,  doux  
 comme  la  laine,  .&  là  queue  aflez  petite  pour  fa grandeur, 
   quoiqu’àu  refte  femblable  a  celle  du  boeuf.  Il  a  
 comme  le taureau l’habitude  de  faire de  la pouflière  avec  
 les  pieds  ;  fon  cuir  eft  dur,  &  fa  chair  tendre  &  bonne  
 à  manger.  Par  ces  caraétères,  qui  font  les  feuls  fur  lef-  
 quels  on  puifle  tabler  dans  les  notices  d’Ariftote,  on  
 voit  déjà  combien  le  bonafus  approche  du  bifon  :  tout  
 convient  en  effet à  cet animal,  à  l’exception de  la forme  
 des  cornes,  mais  comme  nous  1 avons  dit,  la figure des  
 cornes  varie  beaucoup  dans  ces  animaux,  fans  qu’ils  
 ceflent pour  cela  d’être  de  la même  efpèce  : nous avons  
 vû  des  cornes  ainfi  courbées,  qui  provenoient  d’un  
 boeuf boflu  d’Afrique, & nous prouverons tout-à-l’heure  
 que  ce  boeuf à  bofle  n’eft  autre  chofe  que  le  bifon.  
 Nous  pouvons  auffi  confirmer  ce  que  nous  venons  de  
 dire,  par  la comparaifon  des  témoignages  des  Auteurs  
 anciens.  Ariftote  donne  le  bonafus,  pour  un  boeuf  de  
 Poeonie, &Paufanias * en pariant des taureaux de Poeor.ie,  
 *   Vide  Paujdn.in  Beoticis  &  Phocicis. 
 dit 
 du B u f f l e ,  du B o n  a s u s ,  <y.c  305  
 dit  en  deux  endroits  diffèrens,  que  ces  taureaux  font  
 des  bifons;  il  dit même  expreflement,  que  les  taureaux  
 de  Poeonie  qu’il  a  vûs  dans  les  fpeétacles  de  Rome,  
 avoient  des  poils  très-longs  fur  la  poitrine  &  autour  
 des  mâchoires.  Enfin  Jules  Cé fa r,  Pline,  Paufànias,  
 Solin, &c.  ont tous,  en parlant des  boeufs  fauvages ,  cité  
 l’aurochs  &  le  bifon,  &   n’ont  rien  dit  du  bonafus ;  
 il  faudrait  donc  fuppofer  qu’en  moins  de  quatre  ou  
 cinq  fiècles  l’efpèce  du  bonafus  fe  ferait  perdue,  fi^  
 l’on  ne  vouloit pas  convenir  que  ces deux  noms  bonafus  
 &   bifon ,  n’indiquent  que  le  même  animal. 
 6.°  Les  bifons  d ’Amérique pourvoient  bien  venir originairement  
 des  bifons  d  Europe ;   nous  avons  déjà  jete  
 les  fondemens  de  cette  opinion  dans  notre  difcours  fur  
 les  animaux  des  deux  continens  *  :  ce  font  les  expériences  
 faites  par M.  de  la Nux  qui  nous  ont  éclairés ;  
 il  nous  a  appris  que  les  bifons  ou  boeufs  à  bofle  des  
 Indes  ôc  de  l’Afrique  produifent  avec  les  taureaux  &   
 vaches  de  l’Europe  ,  &   que  la bofle n’eft  qu’un  caractère  
 accidentel  qui  diminue  dès  la première génération  
 &   difparoît  à  la  fécondé  ou  à  la  troifième.  Puifque  les  
 bifons  des Indes font de la même  efpèce  que  nos boeufs,  
 & ont par  conféquent  une même origine,  n’eft-il  pas naturel  
 d’étendre cette même origine au bifon d’Amérique !  
 Rien  ne  s’oppofe  à  cette  flippofifton,  tout  femble  au  
 contraire  concourir  à  la prouver.  Les  bifons  parodient 
 * Voyez  le  IX .' volume  decetie Hiftoire  naturelle,  articles  animaux  
 de  l'ancien  continent,  ed  animaux  communs  aux  deux  continens. 
 Tome  X L   Q