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 détail,  fi  l’éléphant  n’étoit  de  tous  les  animaux le  premier  
 à  tous  égards,  celui  par  conféquent  qui  méritoit  
 le  plus  d’attention  ;  nous  n’avons  rien  dit  de  la  production  
 de  Ton  ivoire,  parce  que M.  Daubenton  nous  
 paraît  avoir  épuifé  ce  fujet  dans  fa  defcription  des  différantes  
 parties  de  l’éléphant.  On  verra  combien  d’ob-  
 fervations  utiles  &  nouvelles,  il  a  fait  fur  la  nature  &  
 la qualité  de  l’ivoire  dans  fes différens  états,  &  en même  
 temps  on  fera bien  aife  de  favoir  qu’ il  a  rendu  à  l’éléphant  
 les  défenfes  &  les  os prodigieux  qu’on  attribuoit  
 au  Mammout.  J ’avoue  que  j’étois  moi-même  dans  
 l’incertitude  à  cet  égard,  j ’avois  plufieurs  fois  confidéré  
 ces  olfemens  énormes  &   je  les  avois  comparés  avec  le  
 fquelette  d’éléphant  que  nous avons  au Cabinet  du Roi,  
 que  je  favois  être  le  fquelette  d’un  éléphant  prefque  
 adulte;  &   comme  avant  d’avoir  fait  l’hifloire  de  ces  
 animaux,  je  ne  me  perfuadois  pas  qu’il  pût  exifter  des  
 éléphans fix ou feptfois plus gros que  celui dont je voyois  
 le  fquelette,  que  d’ailleurs  les  gros  offemens  n’avoient  
 pas  les  mêmes  proportions  que  les  os  correfpondans  
 dans  le  fquelette  de  l’élephant,  j’avois  cru  comme  
 le  vulgaire  des  Naturaliftes,  que  ces  grands  offemens  
 avoient  appartenu  à un  animal  beaucoup  plus  grand,  &   
 dont  l’efpèce  s’étoit  perdue  ou  avoit  été  détruite. Mais  
 il  efl  certain,  comme  on  l’a  vu  dans cette  hifloire,  qu’il  
 exifte  des  éléphans  qui  ont  jufqu’à  quatorze  pieds  de  
 hauteur,  c’eft-à-dire,  des  éléphans  fix  ou  fept  fois  
 plus  gros,  ( car  les  maffes  font  comme  les  cubes  de  la 
 hauteur )  que  celui  dont  nous  avons  le  fquelette,  &  qui  
 n’avoit  que  fept  pieds  &  demi  de#hauteur;  il  efl  certain  
 d’ailleurs  par  les  obfèrvations  de  M.  Daubenton,  que  
 l’cîge  change  la proportion  des  o s ,  &  que  lorfque  l’animal  
 efl adulte  ils  groffiffent  conficlérabiement  quoiqu’ils  
 aient  ceffé  de  grandir;  enfin  il  efl  encore  certain  par  
 le  témoignage  des  Voyageurs ,  qu’il  y  a  des  défenfes  
 d’éléphans qui pèfent  chacune  plus de  cent vingt livres * :  
 Tout  cela réuni,  fait  que nous  ne  doutons  plus  que  ces  
 défenfes  &   ces offemens  ne  foient en effet  des  défenfes 
 *  M .  Eden  rend  témoignage  qu’il  mefura  plufieurs  défenfes  d ’élé-  
 phant  auxquelles  il  trouva  n eu f  pieds  de  longueur,  que  d’autres  
 avoient  I’épaifîèur  de  la  cuilïè  d’un  homme,  &  que  quelques-unes  
 pefoient  quatre-vingt-dix  livres ;  on  prétend  qu’il  s’en  trouve  en  
 Afrique  qui  pèfent  jufqu’à  cent  v in g t-c in q   livres  c h a cu n e ....  Les  
 voyageurs  Angiois  rapportèrent auffi  de Guinée  la  tête  d’un éléphant  
 que  M .  Eden  vit  chez  M .  le  Chevalier  Ju d d e ,  elle  étoit  fi  groiîê  
 que  les  os  ièuls  &   le  crâne,  lins  y  comprendre  les  défenfes,  peioient  
 environ  deux  cents livres ;  de  forte  qu’au  jugement  de  l’auteur  elle  
 en  auroit  dû  peler  cinq  cents  dans  la  totalité  de  lès  parties.  H ijl.  
 générale  des Voyages,  tomeI, page 2 2 y. —  Lopes  pritplaifir  à  peler  
 plufieurs  dents  d’éléphant,  dont  chacune  étoit d’environ  deux  cents  
 livres.  Idem,  tome  V ,  page  y  y .  —  L à  grandeur  des  éléphans  peut  
 être  connue  par  leurs  dents  qu’on  a  ramalTées,  dont  quelques-unes  
 ont  été trouvées  du poi’ds  de  deux  cents  livres.  Voyage  de  Drack,  
 page  1  04. —  Au  royaume  de  Lowango  j’achetai  deux  dents  d ’éléphant, 
   qui étoient de la même bête ,  qui pefoient chacune cent  vingt-  
 fix  livres.  Voyage  de  la  Compagnie  des  Indes  de Hollande,  tome  IV , 
 page y 1  ÿ ___Les  dents  des  éléphans ,  au  cap  de  Bonne - elpérance  , 
 font  très-grolîès,  elles pèfent  de  foixante  à  cent vingt  livres.  Defcript.  
 du  cap  de  Bonne-ejpérance, par  Kolbt,  tome I I I ,   page  1 2 .