2 ] 2 H I S T 0 I R E N A T U R E L L E
nous devons donc fuppofer que tout ce qu’ils ont de
bon & de beau, ils le tiennent delà Nature, & que ce
qu’ils ont de défectueux & de difforme, leur vient de
l’empire de l’homme & des travaux de l’efclavage. Ces
pauvres animaux doivent fouffrir beaucoup, car ils jettent
des cris lamentables , fur-tout lorfqu’on les. furcharge ;
cependant quoique continuellement excédés, ils ont
autant de coeur que de docilité ; au premier ligne 1 ils
plient les genoux 8c s’accrou piffent jufqu’à terre pour
fe laiffer charger dans cette fituation ■ ce qui évite à
•L e s chameaux font très-obéifïàns au maître qui les conduit, tellement
que quand ii Tes veut charger ou décharger de leurs fardeaux,
en leur fàifânt un fêul figne ou leur difânt une parole, ils fe baiffent
& mettent incontinent le ventre contre terre ; ils font de petite vie
& de grand travail. Cofmog. du Levant, par Thevet, page 7 4 .— C 'elt
aufïï pour les accoûtumer à fè coucher quand on les veut charger,
qu'on leur plie dans leur jeunefîè les jambes fous le corps; & lis
font fi prompts à obéir, que la chofo eft digne d’être admirée. Dès
que la caravane arrive au lieu où elle doit camper, tous les chameaux
qui appartiennent à un même maître viennent fè ranger d’eux-inêmes
en cercle & fè coucher fur les quatre pieds, de forte qu’en dénouant
une corde qui tient les ballots, ils coulent & tombent doucement à terre
de côté & d’autre du chanteau ; quand il faut recharger, le même chameau
vient fè recoucher entre les ballots , lefquels étant attachés, il fè
relève doucement avec Ci charge, ce qui fè fait en très-peu de temps,
fans peine & Gins bruit. Voyage de Tavemier, tome I , page 16 0 .
bL ’on fait baiffer & mettre à genoux des quatre pieds le chameau
pour le charger, puis on le fait lever avec fà charge. Voyage de la
Boulaie-le-Gou^, page a y y . — Les chameaux s’agenouillent pour être
chargés ou déchargés, puis fè relèvent quand on veut. Relation de
Thevenot, tome I , page y 1 2 ,
l’homme
du Chameau f du Dromadaire. 2.3 3
l’homme la peine d’élever les fardeaux à une grande
hauteur; dès qu’ils font chargés ils fe relèvent d’eux-
mêmes fans être aidés ni foûtenus; celui qui les conduit,
monté fur l’un d’entre eux, les précède tous 8c leur fait
prendre le même pas qu’à là monture ; on n’a befoin
ni de fouet, ni d’éperon pour les exciter; mais lorf-
qu’ils commencent à être fatigués, on foûtient leur
courage, ou pluftôt, on charme leur ennui par le chant
ou par le fon de quelque infinimenta ; leurs conducteurs
fe relaient à chanter, 8c lorfqu’ils veulent prolonger
la route & doubler la journée15, ils ne leur donnent
’ Le fon harmonieux de la voix ou de quelqu’inftrument réjouit les
chameaux........ Les Arabes fè fervent de timbales, parce que les coups'
de fouet ne les font point avancer; mais la mufîque, & particulièrement
la voix de l’homme, les anime & leur donne du courage. Voyage '
d ’Olearius, tome I , p a g e y y 2 . — Lorfqu’on veut obliger le chameau
à faire de plus grandes traites qu’à l’ordinaire, au lieu de le maltraiter,
on fè met à chanter pouf lui donner courage, lorfqu’on voit qu’il
s’arrête & qu’il ne veut pas paffer outre ; & alors il en fait plus qu’on
ne veut, & va plus vite qu’un cheval ne fait pour l’éperon. L ’Afrique
de M arm ol, tome I , page 4 7 . — Le maître chamelier les conduit en
chantant & en donnant de temps en temps un coup de fiffiet; plus if
chante & fifïïe fort, & plus les chameaux vont vîte, & ils s’arrêtent,
dès qu’il celle de chanter. Les chameliers, pour fè foulager, chantent
tour-à-tour, &c. Voyage de. Tavemier, tome I , page 1 6 y.
b Une *chofè fort remarquable for les chameaux, c’eft qu’on leur
apprend à marcher & qu’on les mène à la voix avec une manière de
..chant ; ces animaux règlent leur pas à cette cadence & vont lentement
ou vîte, foivant le ton de voix; & tout de même quand on veut leur
Giire foire une traite extraordinaire, leurs maîtres fàvent le ton qu’ils
aiment mieux entendre. Voyage de Chardin, tome I I , page 2 8.
Tome X I . G g