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 nous  devons  donc  fuppofer  que  tout  ce  qu’ils  ont  de  
 bon  &  de  beau,  ils  le  tiennent  delà Nature,  &  que  ce  
 qu’ils  ont  de  défectueux  &  de  difforme,  leur  vient  de  
 l’empire de  l’homme  &  des  travaux de  l’efclavage.  Ces  
 pauvres animaux doivent  fouffrir beaucoup,  car  ils jettent  
 des  cris  lamentables ,  fur-tout  lorfqu’on  les.  furcharge ;  
 cependant  quoique  continuellement  excédés,  ils  ont  
 autant  de  coeur  que  de  docilité ;  au  premier  ligne  1  ils  
 plient  les  genoux  8c  s’accrou  piffent  jufqu’à  terre  pour  
 fe  laiffer  charger  dans  cette  fituation  ■   ce  qui  évite  à 
 •L e s   chameaux  font  très-obéifïàns  au  maître  qui  les  conduit,  tellement  
 que  quand  ii  Tes  veut  charger  ou décharger  de leurs  fardeaux,  
 en  leur  fàifânt  un fêul  figne  ou  leur  difânt  une  parole,  ils  fe  baiffent  
 &   mettent  incontinent  le  ventre  contre  terre ;  ils  font  de  petite  vie  
 &  de grand  travail.  Cofmog.  du  Levant, par  Thevet, page  7 4 .— C 'elt  
 aufïï  pour  les  accoûtumer  à  fè  coucher  quand  on  les  veut  charger,  
 qu'on  leur  plie  dans  leur  jeunefîè  les  jambes  fous  le  corps;  &   lis  
 font  fi  prompts  à  obéir,  que  la  chofo  eft  digne  d’être  admirée.  Dès  
 que  la  caravane  arrive  au  lieu où elle  doit  camper,  tous  les  chameaux  
 qui  appartiennent  à  un  même maître  viennent  fè  ranger  d’eux-inêmes  
 en  cercle  &   fè  coucher  fur  les  quatre  pieds,  de  forte  qu’en  dénouant  
 une corde qui tient les ballots, ils coulent &  tombent doucement à terre  
 de côté &  d’autre du  chanteau ;  quand  il  faut  recharger,  le  même  chameau  
 vient  fè recoucher  entre  les ballots ,  lefquels  étant  attachés,  il  fè  
 relève doucement  avec Ci charge,  ce  qui  fè fait  en très-peu  de temps,  
 fans peine & Gins  bruit.  Voyage de Tavemier,  tome I ,  page  16 0 . 
 bL ’on  fait  baiffer  &  mettre  à  genoux  des  quatre  pieds  le  chameau  
 pour  le  charger,  puis  on  le  fait  lever  avec  fà  charge.  Voyage  de  la  
 Boulaie-le-Gou^, page  a y y . — Les  chameaux  s’agenouillent  pour  être  
 chargés  ou  déchargés,  puis  fè  relèvent  quand  on  veut.  Relation  de  
 Thevenot,  tome  I ,  page  y 1 2 , 
 l’homme 
 du Chameau f  du Dromadaire.  2.3 3  
 l’homme  la  peine  d’élever  les  fardeaux  à  une  grande  
 hauteur;  dès  qu’ils  font  chargés  ils  fe  relèvent  d’eux-  
 mêmes  fans  être aidés ni  foûtenus;  celui qui  les  conduit,  
 monté  fur  l’un  d’entre  eux,  les  précède  tous  8c  leur  fait  
 prendre  le  même  pas  qu’à  là  monture ;  on  n’a  befoin  
 ni  de  fouet,  ni  d’éperon  pour  les  exciter;  mais  lorf-  
 qu’ils  commencent  à  être  fatigués,  on  foûtient  leur  
 courage,  ou pluftôt,  on  charme  leur  ennui  par  le  chant  
 ou  par  le  fon  de  quelque  infinimenta ;  leurs  conducteurs  
 fe  relaient à  chanter, 8c lorfqu’ils  veulent prolonger  
 la  route  &  doubler  la  journée15,  ils  ne  leur  donnent 
 ’  Le  fon  harmonieux  de  la voix  ou  de  quelqu’inftrument  réjouit  les 
 chameaux........ Les  Arabes  fè  fervent de  timbales, parce  que les  coups' 
 de fouet  ne  les font  point avancer;  mais la mufîque,  & particulièrement  
 la  voix  de  l’homme,  les  anime  &  leur  donne  du  courage.  Voyage  '  
 d ’Olearius,  tome  I , p a g e  y  y  2 . — Lorfqu’on  veut  obliger  le  chameau  
 à  faire  de  plus  grandes traites  qu’à  l’ordinaire,  au  lieu  de le maltraiter,  
 on  fè  met  à  chanter  pouf  lui  donner  courage,  lorfqu’on  voit  qu’il  
 s’arrête  &  qu’il  ne  veut  pas  paffer  outre ;  &  alors  il  en  fait plus  qu’on  
 ne veut, &  va  plus vite  qu’un  cheval  ne  fait  pour  l’éperon.  L ’Afrique  
 de  M arm ol,  tome  I ,  page  4 7 . —  Le maître  chamelier  les  conduit  en  
 chantant  &  en  donnant  de  temps  en  temps  un  coup  de  fiffiet;  plus  if  
 chante  &  fifïïe  fort,  &  plus  les  chameaux  vont  vîte,  &  ils  s’arrêtent,  
 dès  qu’il  celle  de  chanter.  Les chameliers,  pour  fè  foulager,  chantent  
 tour-à-tour,  &c.  Voyage  de. Tavemier,  tome  I ,   page  1 6 y. 
 b Une *chofè  fort  remarquable  for  les  chameaux,  c’eft  qu’on  leur  
 apprend  à  marcher  &  qu’on  les  mène  à  la  voix  avec  une manière  de  
 ..chant ;  ces  animaux  règlent  leur pas  à  cette  cadence  &  vont  lentement  
 ou  vîte,  foivant  le ton  de  voix;  &  tout  de même  quand on veut  leur  
 Giire  foire  une  traite  extraordinaire,  leurs  maîtres  fàvent  le  ton  qu’ils  
 aiment  mieux  entendre.  Voyage  de  Chardin,  tome  I I ,  page 2 8. 
 Tome  X I   .   G g