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 vage  décrit par Ariftote,  fous  le nom  de bonafus pouvoit  
 être  l’un  ou  l’autre  de  ces  boeufs,  dont  ils  venoient de  
 iatinifer  &  de  græcifer  les noms Germains. 
 Une  autre  différence  qui  fe  trouve  entre  l’aurochs  
 &  le bifon  eft  la  longueur du  poil;  le  cou,  les  épaules,  
 le  deffous  de  la  gorge  dans  le  bifon  font  couverts  de  
 poils  très-longs;  au  lieu  que  dans  l’aurochs,  toutes  ces  
 parties  ne  font  revêtues  que  d’un  poil  alfez  court  &   
 femblable  à  celui  du  corps  ,  à  l’exception  du  front,  
 qui  eft  garni  de  poil  crépu.  Mais  cette  différence  du  
 poil  eft  encore  plus  accidentelle  que  celle  de  la  boffe  
 &. dépend  de même de la nourriture & du climat,  comme  
 nous  l’avons  prouvé  pour les  chèvres,  les moutons,  les  
 chiens,  les  chats,  les  lapins,  & c ;  ainfi  ni  la boffe,  ni  
 la  différence  dans  la  longueur  &  la  quantité  du  poil  ne  
 font des  caractères  fpécifiques,  mais  de  fimples  variétés  
 accidentelles  qui  ne  divifent pas  l’unité  de  l’efpèce. 
 Une  variété  plus  étendue  que  les  deux  autres,  &   à  
 laquelle  il  femble  que  les  Naturaliftes  aient  donné,  de  
 concert,  plus  de  caractère  qu’elle  n’en mérite,  c ’elt  la  
 forme  des  cornes  ;  ils  n’ont  pas fait  attention  que  dans  
 tout  notre  bétail  domeftique,  la  figure,  la grandeur,  la  
 pofition,  la direction, &  même  le  nombre des  cornes,  
 varient  fi  fort  qu’il  ferait  impoftïble  de prononcer  quel  
 eft  pour  cette  partie  le  vrai  modèle  de  la Nature.  On  
 voit  des  vaches  dont  les  cornes  font  plus  courbées,  
 plus  rabaiffées,  prefque  pendantes ;  d’autres  qui  les  ont 
 plus droites, plus longues,plus  relevées.  11  y  a  des  races  
 entières  debrebis  qui ont  des cornes,  quelquefois  deux,  
 quelquefois  quatre,  &c.  Il  y  a des  races  de  vaches  qui  
 n’en  ont point du  tout,  & c ;  ces  parties  extérieures,  &  
 pour ainfi  dire, acceffoires  au  corps  de ces animaux , font  
 tout  aufli  peu  confiantes  que  les  couleurs  du poil,  qui,  
 comme  l’on fait, varient &fe  combinent de  toutes façons  
 dans  les animaux  domeftiques  :  cette  différence  dans  la  
 figure  &  la direction  des  cornes, 'qui  eft  fi  ordinaire  &   
 fi  fréquente ,  ne  devoit  donc  pas  être  regardée  comme  
 un  caractère diftinétif des  efpèçes;  cependant,  c ’eft  fur  
 ce  foui  caractère  que  nos  Naturaliftes  ont  établi  leurs  
 efpèces,  &  comme  Ariftote,  dans  l’indication  qu’il  
 donne  du  bonafus,  dit  qu’il  a  les  cornes  courbées  en  
 dedans,  ils  ont  féparé  le  bonafus  de  tous  les  autres  
 boeufs,  &  en  ont  fait  une  efpèce  particulière,  à  la  
 feule  infpeétion  des  cornes  &  fans  en  avoir  jamais  vû  
 l ’individu ;  au  refte  ,  nous  citons fur  cette  variation  des  
 cornes  dans  le  bétail  domeftique  ,  les  vaches  &  les  
 brebis,  pluftôt  que  les  taureaux &  les  béliers,  parce  que  
 les  femelles  font  ici  beaucoup  plus  nombreufes  que  les  
 mâles,  &  que  par-tout  on  peut  obforver  trente  vaches  
 ou  brebis  pour  un  taureau  ou . un  bélier. 
 La  mutilation  des  animaux  par  la  caflration",  femble  
 ne  faire  tort  qu’à  (’individu  &  ne  paraît  pas  devoir  
 influer  fur  l’efpèce ;  cependant  il  eft  fur  que  cet ufage  
 reftreint  d’un  côté  la  Nature  & l’affoibfit  de  l’autre;  un  
 foui  mâle  condamné  à  trente  ou  quarante  femelles  ne 
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