La Société se livra ensuite à la {Plantation des oliviers.
Commencée en 1907 et poursuivie activement depuis
cette époque, l’olivette de l’Enfida s’étend aujourd’hui sur
plus de 400 hectares et compte plus de 20.000 arbres qui
paraissent devoir être d’un très bon rapport.
Èn même temps qu’elle procédait à ces plantations, la
Société continuait à faire exécuter des défrichements.
« Au total, en y comprenant le vignoble, les plantations
d’oliviers et d’amandiers, près de 4.200 hectares, dit
M. Loth (p. 166) ont été ainsi arrachés à la brousse |.-Si
l’on songe que les buissons dont il fallait débarrasser le
terrain étaient d’ordinaire composés de jujubiers épineux
aux racines profondément enfoncées dans le sol, on pourra
mesurer l’importance de la tâche accomplie. Pour extirper
entièrement toute la ramification souterraine de certaines!
souches, il a fallu creuser jusqu’à 2 et 3 mètres de profondeur.
Aux abords immédiats du village, où l’opératipn,
si coûteuse qu’elle fut, était absolument indispensable, le]
défrichement de certains hectares a coûté plus .de
1.500 francs. »
Prévoyant les difficultés que rencontrerait la Société
franco-africaine dans la mise en valeur de son immense
domaine, je disais dans la première édition de ce livre :
« P o u r l’exploitation complète d’une aussi vaste étendue
de terres, il faudrait des capitaux énormes et une administration
tellement compliquée qu’elle rappellerait bientôt
celle d’un petit État. Les propriétaires de l’Ënfida l’ont
compris et se préoccupent d’attirer non seulement des
ouvriers indigènes, mais encore des colons français ».j
L’idée capitale des premiers directeurs de l’Enfida fut d’attirer
autant d’indigènes que possible sur le domaine.
La plupart des Français qui s’établirent en Tunisie au
début de l’occupation voyaient les indigènes d’un mauvais
oeil et s’efforçaient de les éloigner de leurs terres. Ils ne
manquaient pas pour cela de motifs, tels que là crainte des!
voleurs et celle de la dévastation des terres par les troupeaux
de chèvres ou de moutons qui suivent toujours les
indigènes. Il serait difficile de nier la justesse de ces raisons;
« mais, disais-je dans la première édition de ce livre,
il en est d’autres, non moins justes et plus importantes
selon moi, qui plaident en faveur du système mis en pratique
à l’Enfida. En premier lieu, à moins d’adopter le
système aussi inhumain qu’inintelligent et impraticable du
refoulement des indigènes et de leur remplacement impossible
sur le sol entier de la Tunisie par des Européens, i{
faut songer à utiliser leurs forces, et, pour cela, il faut les
fixer. Or, dans ce but, deux moyens pourraient être tentés.
Le premier consisterait à concéder des terres aux tribus
nomades, à condition qu’elles y élèveraient des établissements
à demeure. On peut aussi fixer les indigènes au
sol par l’appât d’un gain à réaliser à l’aide de leur travail.
Or, la condition actuelle des khammès est tellement déplorable
que son amélioration est la chose du monde la plus
facile à faire, sans qu’il en résulte aucune perte pour le
propriétaire. En apportant plus de soin à la culture, le
propriétaire retirerait de la terre des produits plus abondants
et meilleurs. Il pourrait, par conséquent, en abandonner
une partie aux travailleurs, non seulement sans
diminuer son profit, mais même eri l’augmentant dans des
; proportions très sensibles. Eendu plus heureux par son tra-
ivail, le khammès ne manquerait pas de se fixer auprès du
champ d’où lui viendrait le bien-être. En agissant comme
ils le font, les propriétaires de l’Enfîda ne peuvent manquer
[d’aboutir à ce double résultat : amélioration du sort de
l’indigène et fixation du nomade au sol ; accroissement
des revenus annuels et de la valeur marchande de leur
domaine ».
J’ajoutais que ce dernier résultat, tout à l’avantage des
■colons français, ne pouvait être obtenu dans toute sa plé-
Initude qu’à la condition d’attirer l’indigène sur les propriétés
françaises et de le fixer. « Sans atteindre la surface
■énorme de l’Enfida, la plupart des propriétés acquises en
■Tunisie par nos compatriotes, disais-je, ont des étendues
■extrêmement considérables. Les domaines de 4, 5, 6, 7, 8 et
■40.000 hectares sont les plus nombreux. Or, il n’est guère
■permis de croire que des propriétés aussi étendues puissent