les indigènes de faire macérer leurs olives avant d?en
extraire l'huile. Il me paraît, en effet, difficile de croire
que cette habitude résulte d’un goût particulier qu’ils
auraient pour l’huile rance. Quoi qu’il en Soit, ils y restent
fidèles, même dans les lieux où les Européens mettent à
leur disposition des moyens perfectionnés de fabrication.
« J ’ai pu voir, disais-je dans la première édition de ce
livre, près de Tunis, une usine mue par la vapeur dans
laquelle les Arabes portent leurs olives à triturer, et où l’on
a dû mettre à leur disposition des chambres de macération.
En modifiant la base de la redevance pour la fabrication,
en la faisant payer, par exemple, d’après la quantité
d’huile obtenue et non d’après le poids des olives, on
amènerait peut-être les indigènes à renoncer à un procédé
qui rend leur huile absolument impropre à l’alimentation
des Européens. Mais il est encore préférable de créer des
huileries perfectionnées, achetant les olives aux propriétaires
indigènes. » C’est ce qui s’est produit.
La tannerie est, après l’huilerie, l’industrie indigène la
plus importante de la Tunisie. Elle n’est, d’ailleurs, pas
moins rudimentaire que la précédente. Les écorces tannantes
employées sont surtout celles du pin d’Alep et du
grenadier. Les fosses ou cuves dont on fait usage en Europe
pour le traitement des peaux par la chaux d’abord,
et par les écorces tannantes ensuite, sont remplacées par
des jarres d’une contenance d’environ centcinquânte litres.
On débarrasse les peaux de la chaux qu’elles ont absorbée
en les traitant par de la fiente de chien : le lavage des peaux
est fait à l’eau salée ; quant au tannage proprement dit, il
y est procédé à l’aide d’un extrait liquide d’écorce de grenadier
ou de pin d’Alep. On teint ensuite les cuirs en jaune
ou en rouge pour la fabrication des babouches. A Tunis,
à Sfax, et dans quelques autres villes, la tannerie offre une
certaine importance, mais partout elle emploie les mêmes
procédés. Ceux-ci, en élevant le prix delà main-d’oeuvre,
donnent au produit une valeur qui ne lui permet pas de
lutter contre les cuirs européens. La plupart des Tunisiens
riches ont, d’ailleurs, renoncé aux babouches jaunes ou
rouges de leurs ancêtres et portent des pantoufles ou des
souliers fabriqués avec un cuir verni, d’origine française
ou italienne.
« Rien ne serait plus aisé, disais-je dans la première-
édition de ce livre, que de créer en Tunisie des tanneries
perfectionnées. Un tan d’excellente qualité serait fourni par
l’écorcç des chênes du Nord de la Régence ; quant aux
peaux de boeufs, de moutons, de chevreaux, etc., elles sont
très abondantes.
La troisième industrie indigène de quelque importance
est la teinturerie. Celle de Zaghouan, pour les chéchias,
était la plus renommée. On attribuait la qualité de ses produits
à l’eau qui descend des montagnes s’élevant derrière
la ville. Aujourd’hui il n’y a plus de teintureries à
Zaghouan.
A Sfax il existe des teinturiers indigènes qui teignent
chaque année une grande quantité de cotonnades dont la
majeure partie vient d’Angleterre. La couleur bleue est
presque la seule donnée à ces étoffes, qui sont destinées
aux vêtements des femmes de la campagne ; elle est obtenue
par l’indigo.
Nous trouvons ici un exemple du goût très particulier
qu’ont les habitants du continent africain pour les teintures
de bonne qualité. A la côte occidentale d’Afrique comme
en Tunisie, ils ne se préoccupent que fort peu de la solidité
de l’étoffe, mais ils repoussent absolument celle qui
n’est pas teinte à l’aide de l’indigo.
Comme, les industries dont nous avons déjà parlé, la
teinturerie tunisienne n’emploie que des procédés très primitifs.
L’outillage se compose principalement de cinq
jarres d’une contenance moyenne de cent litres, renfermant
des bains de différentes forces par lesquels on fait
passer successivement les pièces de cotonnade. Chaque
série de bains sert à teindre dix pièces. La réduction
de l’indigo est obtenjue à l’aide de la chaux.
Les oüvriers teinturiers indigènes ne manquant pas en
Tunisie, et ayant l’habitude de se contenter d’un salaire
minime, il n’est pas douteux qu’il serait aisé de donner à