où se trouvent situés tous les cantons planteurs de tabac,
est très fertile et ne manque pas d’eau; les vallées conviennent
parfaitement à la culture des céréales, les collines
à celle de la vigne ; les montagnes peuvent presque partout
se regarnir spontanément de forêts. Ce sont là les vrais
éléments de richesse de la Tunisie, qui n’a rien à gagner
au maintien, sur quelques parcelles de son territoire, d’une
culture sans chance de développement, dont l’existence est
subordonnée à la plus-value factice accordée à ses produits
».
Le desideratum exprimé dans les lignes qui précèdent fut
vite réalisé, sans que l’on eût besoin dë prononcer l’interdiction.
La eulture du tabac n’existait déjà plus en Tunisie,
lorsque parut la première édition de ce livre, dans laquelle
je disais : « Les seuls, motifs invoqués dans la citation
faite plus haut en faveur de ^interdiction de la culture du
tabac étaient, d’une part que les terres employées à cette
culture pouvaient servir à d’autres opérations agricoles,
d’autre part que la quantité de tabac,produite était très
minime et sa qualité défectueuse. Au premier argument
il est aisé de répondre que plus un cultivateur demande à
sa terre de produits différents, et plus il se met à l’abri
de la misère résultant des mauvaises récoltes. Si à côté
de son champ de blé ou d’orge, il peut exploiter un carré
de tabac, c’est une source de revenus de plus qu’il se donne,
et l’on n’a jamais vu un gouvernement défendre une culture
quelconque sous prétexte que le sol peut en" supporter
d’autres ».
Depuis l’époque où je présentais ces observations, la
ferme des Tabacs a été remplacée par une régie d’Etat
qu’exerce l’administration des monopoles. Pour donner
satisfaction à un courant d’opinion qui s’était produit dans
le sens des idées que j’avais exprimées dès 1887, un
décret du 25 août 1898 autorisa la culture du tabac dans
des conditions empruntées à la législation française. Les
planteurs doivent obtenir une permission délivrée par le
Directeur des monopoles après avis d’une commission
locale ; ils sont soumis aux visites et exercices des agents
des monopoles, tenus de donner à leurs plantations des
façons rigoureusement définies, et de livrer la totalité de
leur récolte conformément aux prévisions des inventaires,
etc. Ils peuvent même cultiver pour l’exportation.
Ni les indigènes, ni les Européens n’ayant fait la moindre
tentative de culture en vertu de ce décret, l’administration
décida de procéder'elle-même à des essais au sujet desquels
il est dit dans une note officielle qui m’a été remise
en juillet 1914 : v « En vue d’assurer la production des
tabacs nécessaires à ses besoins, l’administration a été
amenée à faire entreprendre des cultures sous une réglementation
en quelque sorte officieuse et pour son propre
compte. Des cultures de l’espèce sont effectuées dans la
région des Mogoods, dans le caïdat de Bizerte et dans les
environs de Gabès.'En souscrivant leur demande d’autorisation,
les planteurs déclarent se soumettre à toutes les
clauses d’un règlement qui précise les différentes opérations
à faire subir aux plantations (semis, repiquage, alignements,
distances des pieds, épamprement, écimage,
ébourgèonnement, livraison, etc.) ; les pénalités auxquelles
ils s’exposent sont alors prévues par le décret du 25 août
1898. Ces essais ont donné des résultats encourageants.
Guidés et conseillés par les agents de culture des monopoles,
les planteurs perfectionnent rapidement leurs procédés
et paraissent s’intéresser au développement de
la production du tabac ». Tous les planteurs sont des
indigènes.
En 1898, la surface cultivée en tabac était de 34 hectares;
elle a été, dans les conditions exposées ci-dessus,
de 56 hectares en 1909; de 94 hectares en 1910, de 91 hectares
en 1911 et de 101 hectares et demi en 1912. Le poids
du tabac livré et payé, cette dernière année, atteint près
de 135.426 kilogrammes, représentant une valeur dotale
de 170.889 francs. Les prix varient, suivant la qualité, de
130 francs à 20 francs les 100 kilos. « A titre d’encouragement,
une prime de 50 francs par 100 kilogrammes de
tabac dit de « surchoix » est accordée aux planteurs les