plus soigneux; cette prime est attribuée à des fractions de
récolte arbitrées par la commission de réception. »
§ YI. — L a c u l t u r e d u c h a n v r e
On fume en Tunisie, une certaine quantité d’une sorte
de baschisch représenté par les bouquets floraux femelles
du chanvre. On donne à ce produit, très recherché par
certains indigènes en raison de l’ivresse qu’il détermine,
le nom de takrouri ou kif. Les fumeurs de haschisch font
brûler les pellicules, desséchées et broyées de ces bouquets
floraux, dans des pipes à petits fourneaux.
L’ancienne ferme des tabacs ayant le monopole du takrouri
n’avait trouvé aucun autre moyen de se mettre à
l’abri de la fraude intérieure que de provoquer l’interdiction
absolue de la culture du chanvre dans toute la
régence. Cette interdiction fut consacrée par le décret du
31 janvier 1875. Je disais, à ce sujet dans la première
édition de ce livre : « Un agriculteur français m’a raconté
qu’il avait essayé de cultiver du chanvre dans un terrain
où cette plante paraissait devoir se développer admirablement
: interdiction lui a été signifiée de poursuivre
cette tentative. Du reste, je n’ai pas vu un seul pied de
chanvre dans toute la Tunisie. Or, le chanvre est encore
un produit riche, dont l’exploitation peut être faite aisément,
sans préjudice de celles plus importantes de la
vigne, des céréales, etc., et pour le plus grand profit de
l’agriculteur. Interdire sa culture dans tout un pays, c’est
évidemment le priver d’une source de bénéfices très appréciables
».
L’interdiction générale de la culture du chanvre existe
encore; mais, pour faire face à ses besoins de takrouri,
l’administration fait procéder chaque année, par un nombre
restreint de propriétaires français et indigènes, aux plantations
nécessaires. Ces cultures sont exécutées conformément
aux règles indiquées dans des contrats qui précisent
toutes les opérations culturales (labours, fumure, semailles,
irrigations, binages, arrachages des pieds mâles,
récolte à maturité, dessiccation ralentie, emballage, transport,
gardiennage,'etc:). Les cultures sont soumises aux
vérifications des agents des monopoles, et un rendement
minimum en argent est garanti aux planteurs. t
Pour fabriquer le takrouri que la régie met en vente, on
sépare les bouquets floraux femelles des tiges et on les
hache à la main. Il en est vendu chaque année environ
5.000 kilogrammes, en boîtes de 5 grammes coûtant
20 centimes, soit 40 francs le kilogramme.
Je persiste, à croire que l’administration des monopoles
commet une erreur économique en interdisant la culture
du chanvre.
§ VII. — L ’e x p l o i t a t io n d e l ’a l f a
Parmi les produits du sol tunisien, il en est un fort
important dont il est indispensable de parler : je fais allusion
à l’alfa.
L’alfa est une plante de la famille des graminées, à
rhizome rampant et vivace comme celui du chiendent. Les
feuilles sont enroulées au point de paraître cylindriques,
hautes de 30 à 50 centimètres, et propres à une foule
d’usages, depuis la fabrication dé nattes et de paniers, etc.,
jusqu’à celle d’un papier d’excellente qualité. L’alfa vient
en touffes; tantôt éparses au milieu d’autres herbes ou d’arbustes
qui recherchent, comme lui, les terres arides, tantôt
réunies en si grande quantité qu’elles constituent
presque la seule végétation sur des espaces considérables.
C’est surtout sur ces derniers points qu’on l’exploite à
cause délia facilité de la récolte. Celle-ci peut se faire en
tout temps; elle consiste simplement à tirer sur les feuilles
de manière à les détacher sans briser la tige qui les
porte. : .
On trouve de l’alfa dans presque toutes les régions
incultes et arides de l’est et du sud de la Tunisie; mais
son terrain de prédilection, celui où il existe en assez
grande abondance pour que ;sa récolte soit rapide et par
conséquent productive, répond à la partie de la Régence