charge sur le contribuable est donc absolument insensible...
On peut admettre que la dépense du réseau créé par le
Protectorat sera dans quelques années voisine de 220 millions
de francs. Sur cette somme une cinquantaine de
millions auront été prélevés sur les réserves et sur les
budgets annuels. Les sommes empruntées atteindront
peut-être 170 millions. L’intérêt et l'amortissement de ce
capital ne dépassant pas 4 p. 100, il faudra, pour que le
réseau tunisien ne constitue pas une charge, qu’il donne
un produit net annuel de 6.800.000 francs. Ce résultat ne
paraîtra nullement improbable si l’on remarque que la
Tunisie est appelée à nourrir facilement • deux fois plus
d habitants qu'elle n'en a actuellement (20 habitants au
kilomètre carré dans la région cultivable). Si le réseau ne
rapportait que 6 millions, 5 millions et même 4 millions
par an, le rendement des capitaux employés serait encore
de 3, 2,25 ou 2 p. 100. Il n’est pas certain que le Trésor
français lui-même tire actuellement un meilleur rendement
des capitaux qu’il a fournis pour la création du
réseau métropolitain. ... La Tunisie possède ou va posséder
par tête d'habitant lm10 de voie ferrée, c’est-à-dire
autant que la France possède de chemins de fer d’intérêt
général, presque le double de ce qu'a réalisé l’Algérie
après 80 ans de domination, après plus de 650 millions
de subventions fournies par la métropole. Déjà le mouvement
annuel de son réseau atteint 500 millions d’unités de
trafic kilométrique; il est donc supérieur à celui de tous
les chemins de fer d'intérêt local et de tous les tramways
de France réunis; il est supérieur pour les marchandises,
au mouvement du réseau algérien, cependant deux fois et
demi plus long ».
Le rapport note encore, en réponse à ceux qui ont
accusé le Protectorat tunisien de construire à des prix trop
élevés : « Malgré le renchérissement de tous les produits
et de la main-d’oeuvre qui s'est manifesté depuis quatre
ou cinq ans, les voies ferrées tunisiennes ont coûté
sensiblement moins cher que les voies similaires algériennes,
construites à une époque où la vie dans l'Afrique
du nord était certainement moins dispendieuse ».
« En présence de ces résultats, conclut justement le
rapport, nous pensons que la France n’a pas à regretter
l ’autonomie qu’elle â eu la sagesse de laisser au gouvernement
du Protectorat, et que la Tunisie a le droit d’être
fière de l'usage quelle a su en faire en matière de chemins
de fer. »
Dans le discours, qu’il prononça devant la Chambre des
députés le- 26 janvier 1912, M. Alapetite indiquait, en
excellents termes, le progrès réalisé par la Tunisie en
matière de travaux publics et la cause de ce progrès
lorsqu'il disait : « En 1883, deux ans après l’établissement
du protectorat français, alors que presque tous les impôts
existants aujourd’hui étaient déjà perçus, lorsqu’on avait
payé la dette, lorsqu’on avait payé la liste civile, lorsqu’on
avait payé le chapitre des pensions,” il restait en tout et
pour tout, pour les dépenses ordinaires de la Régence, une
somme de 2 millions. Sur ces 2 millions, il y avait
30.000 fr. pour les travaux publics, c’est-à-dirè qü’on
payait un ingénieur et le bureau de cet ingénieur,, qué
des projets étaient étudiés, mais qu’il n’y avait pas un
centime pour passer à l’exécution.
« Messieurs, vingt-huit ans après, alors que les impôts
sont les mêmes, alors que le taux n’en a pas été relevé,
que, je l’atteste ici, les dégrèvements ont dépassé de beaucoup
les aggravations, par suite de la perception plus
régulière de l’impôt, mais # surtout du développement de
la matière imposable, aujourd’hui, avec le même budget,
nous avons pour les services publics une dotation annuelle
de 34 millions (Applaudissements à gauche), 3 millions
pour l’instruction publique, 3 millions pour les postes et
télégraphes, près de 3 millions pour la police, et enfin
8 millions passés pour les travaux publics, c’est-à-dire
que le' seul crédit d’entretien des routes de la Tunisie,
qui s’élève à 3 millions, excède le total du budget ordinaire
des services publics au moment de l’avènepient du
Protectorat. Je vous demande, messieurs, si ce chiffre
n’est pas d’une' éloquence tout à fait décisive. »