Dans toute la région du Djerid, les dattiers paient un
impôt dit de « khanoun », qui était de 16 caroubes, environ
0 fr. 65, par pied, pour la variété commune et de
32 caroubes par pied pour la variété supérieure dite
« degla ». Cet impôt a été abaissé, mais il est encore
aujourd’hui plus élevé qu’en Algérie et nuit beaucoup à
la culture des dattiers du Djerid dont les fruits sont supérieurs
à ceux des dattiers algériens de l’oued Rhir.
Les dattiers payent le khanoun à partir de l’âge où ils
commencent à porter des fruits. Les pieds mâles en sont
exempts. Au Djerid, l’âge de la fertilité varie entre quatre
et sept ans ; dans l’oasis de Tozeur, quelques pieds particulièrement
bien favorisés commencent à donner des fruits
dès l’âge de trois ans. Dans l’oasis d’El-Hammâ, où la
température est moins chaude, par' suite de l’exposition
au nord, les pieds les plus favorisés portent leurs fruits à
cinq ans, et ceux qui le sont moins attendent parfois leur
dixième année. Il en est à peu près de même à El-Oudian,
à cause de la rareté de l’eau, dans le Nefzaoua et surtout
dans la région de Gabès, à cause de la moindre élévation
de la température. Dans le Nefzaoua, l’impôt du khanoun
est moitié moindre que dans le Djerid ; il est encore un
peu plus faible dans la région de Gabès et dans tout l’Arad.
Les oasis les plus favorisées du Djerid, c’est-à-dire celles
de Nefta et de Tozeur, supportent assez aisément le khanoun,
du moins dans les bonnes années, parce que leurs
dattes sont de qualité supérieure et atteignent un prix
élevé. Celle d'El-Oudian, dont les dattes sont moins estimées,
se rattrape sur le produit des oliviers, qm’elle renferme
en grand nombre et sur celui des autres arbres
fruitiers. Quant à l’oasis d’El-Hamma, dont les dattiers
sont moins productifs et les dattes de qualité inférieure,
et qui n’a que peu d’oliviers ou d’arbres fruitiers, elle est
littéralement ruinée par l’impôt. Ainsi que nous l’avons
dit plus haut, celui-ci est, en effet, le même pour l’oasis
d’El-Hamma, peu favorisée par le climat, que pour les oasis
les plus riches'du Djerid. Dans certaines années, les habitants
d’El-Hamma récoltent à peine de quoi payer l’impôt;
aussi abandonnent-ils peu à peu une contrée qui, si elle
était traitée avec moins de dureté par le fisc, serait en
mesure de les faire vivre.
De cet exposé .de l’état des dattiers en Tunisie, nous
sommes tenus de conclure qu’à l’heure actuelle, cette culture
ne fournit que des résultats généraux assez peu satisfaisants.
Des trois régions où existent des oasis de dattiers
de quelque importance, c’est-à-dire l’Arad, le Nefzaoua et
le Djerid, ce dernier est le seul où l’on obtienne des fruits
d’une qualité supérieure et vraiment propres à l’exportation.
Comme ils jouissent dans toute l’Afrique septentrionale
d’une réputation exceptionnelle, le Nefzaoua leur doit
encore une réelle prospérité. Quant à l’Arad, s’il ne contenait
que des dattiers, il serait misérable.
Ajoutons, pour être exact, que toutes les oasis de la
Tunisie ont heureusement d’autres ressources. Les oliviers
qui abondent dans celle d’El-Oudian, les arbres fruitiers
qqi existent en assez grand nombre dans toutes les autres,
les plantes maraîchères enfin, trouvent dans les coins de
terre dont nous parlons, un arrosage suffisant et sont,
pour leurs habitants, de précieuses sources de bien-être ;
aussi voyons-nous toutes les oasis entourées de villages
stables. Fort sagement, l’administration se préoccupe de
les conserver et de les multiplier en leur fournissant
de l’eau partout où il est possible de creuser des puits
artésiens. 1
§ IV. — L e s j a r d in s
Ce mot n’a pas, en Tunisie, exactement la même signification
que chez nous. Il y désigne, d’une manière générale,
toutes les cultures qui ont besoin d’être arrosées en
tout temps, soit à l’aide des rivières ou des sources, soit à
l’aide des pluies. A ce titre, toutes les oasis dont nous
venons de parler sont des jardins, car à l’ombre des dattiers
on y cultive toujours, en quantité plus ou moins
considérable, des plantes qui ont besoin d’être “arrosées
pendant la saison chaude, comme les légumes, le maïs,