les lignes citées plus haut, nous possédions la Tunisie
depuis six ans et nous n’avions encore rien fait à Bizerte.
C’est seulement en 1888 que Jules Ferry tourna la difficulté
au moyen d une convention qui remettait à une compagnie
privée le soin de créer un port exclusivement commercial.
Les travaux de ce port furent exécutés par MM. Cou-
vreux et Hersent, auxquels fut substituée plus tard la
Compagnie du port de Bizerte, en vertu d’un contrat entre
ces entrepreneurs et le gouvernement français,, en date
du 11 novembre 1889, sanctionné par décret beylical. du
17 novembre 1890. L’acte de concession du gouvernement
tunisien visait « le droit exclusif de construire à côté du
port actuel de Bizerte et d’exploiter un port commercial
susceptible de recevoir les navires d’un grand tirant
d’eau ». i
Les travaux qui ont été exécutés jusqu’à ce jour comprennent
: 1° un avant-port dont la surface atteint 86 hectares
et qui a été dragué à la profondeur de 10 mètres
sur une étendue d’environ 40 hectares; 2° deux jetées
limitant'cet avant-port; l’une au nord construite dans le
prolongement de la petite jetée de l’ancien port, longue
de 1.200 mètres ; l’autre à l’est, longue de 900 mètres;
toutes les deux construites en enrochement ; 3° en avant
des jetées, une jetée-abri, longue de 609 mètres, (jirigée
obliquement du nord-ouest au sud-est, également construite
en enrochement. Entre ses extrémités et celles des
jetées, des passages de 320 mètres, au nord-ouest, et de
680 mètres, au sud-est, sont ménagés pour le passage des
navires; 4° entre l’avant-port et le lac, il a été creusé un
canal long de 2.500 mètres, large de 200 mètres ou plafond,
profond de 10 mètres, conduisant d’abord dans les
petites baies de Sébra,-de Ponty et de Séti-Mériem qui sont
en avant du lac, et ensuite, en s’élargissant, dans le lac
lui-même; 5° dans le prolongement du canal, il a été
creusé, à travers le lac, un chenal de 10 mètres de profondeur
jusqu’aux fonds naturels de 10 mètres ou plus,
et, au delà de ces fonds, jusqu’à la darse de Sidi-Abdallah;
.6° dans le fond du lac, on a construit l’arsenal de Sidi-
Abdallah et une darse, entourée de jetées, ayant 50 hectares
de surface. Les navires s’y abritent par mauvais temps.
Sur les bords de la darse, on a creusé trois bassins de
radoub dont l’un a 90 mètres de longueur et les autres
200 mètres ; 7° dans la baie de Sébra, on est en train d’organiser
le port de commerce, de manière à .rendre entièrement
libre le canal sur les bords duquel se sont faits
jusqu’à ce jour les opérations d’embarquement et de
débarquement de la navigation commerciale ; 8° dans la
baie Ponty (ancienne baie Sans-nom), et dans la baie de
Séti-Mériem, qui touche à la première, on a installé la
défense mobile, la défense fixe, et divers services de la
marine de guerre; 9° on a bâti, sur le front de mer, des
batteries qui rendent le port imprenable du côté de la mer ;
10° l’arsenal a été mis en relation avec le chemin de fer
de Bizerte à Tunis par une,voie ferrée de 5 kilomètres de
longueur.
Dans l’état qui résulte de ces travaux, le port militaire de
Bizerte peut rendre des services notables à notre flotte de
la Méditerranée; mais il est très insuffisant. La concentration
dans la Méditerranée de nos trois escadres et de nos
plus forts croiseurs cuirassés exige que des améliorations
considérables soient introduites dans toutes les parties du
port de Bizerte, car Toulon est hors d’état de loger tous
ces navires. C’est à peine s’il peut donner un asile sûr a
deux escadres cuirassées et à l’escadre légère. La troisième
escadre cuirassée devra être placée à Bfzerte. Or, actuellement,
ni le port ni l’arsenal de Bizerte ne sont en état
d’abriter, de ravitailler, d’entretenir et de réparer une
escadre.
Les travaux d’amélioration qu’il est indispensable d’y
exécuter le plus tôt possible, sont : 10/1’approfondissement
à 12 mètres de l’avant-port, du canal d’accès au lac et du
chenal qui traverse le lac pour aboutir à la darse de Sidi-
Abdallah ; 2° l’élargissement du canal, dont les 200 mètres
au plafond sont insuffisants pour les super-dreadnoughts ;
3° l’organisation des ateliers et magasins de l’arsenal de
Sidi-Abdallah, en vue de l’entretien, des réparations, <ki
J.-L. De L a n e s s à n , La Tunisie. 17