de l'eau. Aussi n’y cultive-t-on que des plantes ayant peu
besoin d’arrosage e,t surtout des arbres et arbustes fruitiers,
particulièrement le figuier, l’amandier, l’abricotier, le
pommier, la vigne et le pistachier. Sfax est le seul point
de la Régence où le pistachier soit cultivé en abondance;
il y donne des fruits excellents et très recherchés dans toute
la partie orientale de la Méditerranée. Comme l’eau est
très tare, on n’arrose que les arbres et les arbustes nouvellement
plantés ou encore très jeunes. Les jardins ou plutôt
les vergers de Sfax entourent immédiatement la ville.
Plus loin, s’étendent les cultures d’oliviers.
Nous n’avons cité que les jardins les plus renommés de
la Tunisie, ceux dont la culture est le plus soignée. Il en
existe d’analogues au voisinage d’un certain nombre de
villes, comme Sousse, Monastir et Mahdia dans le Sabel,
El-Djem, etc., mais on se tromperait si l’on croyait qu’il
existe, comme en France, des jardins autour de toutes les
villes. Il n’en est absolument rien. Certaines villes tunisiennes
sont encore entièrement ou presque entièrement
dépourvues de ces sortes de cultures. Je me bornerai à
citer Kairouan, dont l’enceinte des murailles blanches et
crénelées apparaît de fort loin au milieu d’une plaine
entièrement nue. Beaucoup de villages sont dans le même
cas.
La cause principale de la rareté relative des jardins doit
être cherchée dans la difficulté d’avoir de l’eau en quantité
suffisante pour faire les arrosages abondants qu’exigent
les plantes maraîchères. L’absence de pluie pendant une
grande partie de l’année, ef, dans quelques régions, pendant
des années entières, oblige à faire usage pour les
jardins de l’eau des puits. Or, il n’est pas partout aisé
d’avoir cette eau avec les qualités qu’exige la culture.
Dans beaucoup de points de la Tunisie, l’eau des puits
est trop chargée de chlorure de sodium et de magnésium
pour qu’on puisse l’utiliser à l’arrosage. Il faudrait aller
chercher, à l’aide de forages, des nappes plus profondes,
contenant une eau de meilleure qualité.
D’une façon générale, quoique les indigènes connaissent
la grande valeur de l’irrigation dans un climat chaud et à
terre sèche, ils n’en usent que d’une manière très insuffisante.
Je lis dans une conférence faite par M. Gounot
devant l’Association des anciens élèves de l’Ecole coloniale
d’agriculture de Tunisie (annuaire 1912, p. 54) : « Au
printemps, dans presque tout le nord de la Régence, les
indigènes qui disposent d’eau de source en usent très largement
pour irriguer leurs céréales, mais les rendements
qu’ils obtiennent sont inférieurs à ceux réalisés dans les
fermes françaises en culture sèche ; l’intervention d’eau
d’irrigation est donc inutile. Quant aux vergers, qui n’a vu
en Tunisie des plantations de cognassiers, de grenadiers et
d’arbres frùitiers de toutes sortes ; or, lorsqu’on arrive à ces
oasis de verdure, on apprend avec surprise que ces jardins
quoiqu’irrigables oiît une valeur locative de 50 ou 100 francs
àpeine. Bien souvent même cesjardins sont complètement
abandonnés par leurs détenteurs, preuve évidente qu’ils
ne donnaient pas de revenus appréciables. Ces exemples
suffisent pour établir que les indigènes du nord de la
Régence sont pour la plupart de mauvais irrigateurs, et,
sauf dans la banlieue des villes, ils arrivent rarement à
créer une culture intensive et à tirer un-profit de leur eau. »
Il est probable qu’ils ne travaillent pas la terre de manière
à lui permettre d’absorber l’eau qu’ils lui donnent.
Une autre cause êntravait autrefois considérablement
les cultures de légumes et d’arbres fruitiers ; je veux
parler des taxes énormes qui frappaient les produits des
jardins et des vexations de mille sortes dont la perception
de ces taxes était accompagnée. Un décret du 1 "janvier 1907
a supprimé les taxes anciennes dont les populations se
plaignaient amèrement et a beaucoup favorisé la culture
de toutes les plantes qui alimentent les marchés.
La vigne doit faire l’objet d’une mention spéciale parmi
les plantes que les indigènes cultivent dans les « jardins ».
On estime à 1.666 hectares la surface complantée en vignes
par les indigènes, cette surface étant restée stationnaire
depüis 1889. La production totale de ces vignes serait de
20.000 à 30.000 kilogrammes de raisins provenant de