cès. Ce serait une imprudence de la part du gouvernement
du Protectorat, de s’engager dans cette voie et
d’encourager une émigration qui ne saurait lutter avantageusement
contre des Italiens acclimatés, connaissant
parfaitement les lieux et les méthodes de pêche, se contentant
de gains très faibles et vivant alvec une parcimonie
qui n’est pas dans les habitudes françaises ».
On pêche aussi quelques sardines sur la côte est; mais
ce sont surtout les allaches ou aloses feintes qui y sont
particulièrement pêchées, depuis Kebilia jusqu’à Mehdia.
« En 1906, 152 barques inscrites à Mehdia, jaugeant
600 tonnes, montées par 776 hommes, ont capturé
911.000 kilogrammes d’allaches valant 218.700 francs h »
La pêche la plus importante de la côte orientale de la
Régence est celle du thon. En mai et juin, chaque année,
des bandes considérables de thons adultes descendent le
long de cette côte, cherchant les hauts fonds pour y frayer.
On dispose sur leur passage, dans chacune des thonaires
dont il a été question plus haut, des filets fixes, connus sous
le nom de « madragues », qui sont tendus à partir de la côte
et perpendiculairement à elle jusqu’à deux ou trois kilomètres,
de manière à atteindre les fonds de 25 à 30 mètres.
Vers le milieu de la longueur du filet sont disposées des
chambres, ayant 3 à 4 mille mètres carrés de surface, dans
lesquelles le poisson entre croyant échapper au filet et
dans l’une desquelles on le chasse pour le pêcher. Une
madrague de dimension moyenne ne coûte pas moins de
150.000 francs. On évalue à 400.000 francs environ la
dépense occasionnée par l’installation d’une thonaire avec
ses établissements pour la préparation du poisson, ses
embarcations, êtc. '« Les madragues, dit M. de Fages 2,
doivent avoir leur entrée du côté d’où l’on attend le poisson
et être installées autant que possible à l’extrémité des
golfes, à l’abri des gros vents, des courants et en eaux
claires. Les courants portent souvent préjudice à la pêche
1. Ibid., p. 75.
2. Loc. cit., p. 77.
parce qu’ils font incliner la nappe supérieure des filets, ce
qui permet aux thons de s’échapper. En Tunisie, les vents
de l’ouest au nord, quand ils ne soufflent pas avec violence,
facilitent l’entrée des thons dans les madraguès, et
c’est généralement après une jolie brise venant de cette
direction qu’ont lieu les belles pêches. » M. de Fages juge
la manière dont la pêche du thon est faite en Tunisie de
la manière suivante : « La pêche du thon ne peut être
mieux pratiquée qu’elle ne l’est aujourd’hui ; seulement,
pour que cette industrie puisse prospérer, il faut beaucoup
de capitaux, de la patience, un bon rais (capitaine de
pêche), une bonne administration, une bonne discipline.
Il faut aussi que les pêcheurs, ce que l'on appelle
l’équipe de mer, soient intéressés dans le produit de la
pêche ».
La pêche du corail a été pendant longtemps l’une des
industries intéressantes de la Tunisie. Elle avait lieu sur
les bancs qui s’étendent à plusieurs milles de la côte
septentrionale entre Tabarka et la Calle. Elle fut d’abord
accordée en monopole à la République de Pise, puis à la
France, jusqu’en 1824. Une compagnie anglaise se.la fit
alors concéder par le bey, mais elle fit de mauvaises
affaires et la France redevint concessionnaire du monopole
à perpétuité par une convention de 1832 encore en vigueur.
La pêche du corail était faite surtout par des Italiens.
« Avant la dénonciation du traité de commerce et de navigation
entre la France et l’Italie, La^Calle était le port de
concentration de tous les bateaux corailleurs italiens qui
péchaient du cap Rosa (Algérie) jusqu’à la hauteur de l’île
de La Galite. .. Deux à trois cents bateaux corailleurs italiens
arrivaient aux époques de la pêche et contribuaient à
la prospérité de La Calle. En 1888, la rupture du traité de
commerce et de nayigation entre la France et l’Italie éloigna
les pêcheurs italiens de l’Algérie et La Calle perdit
une partie de ses ressources1. » La production par les
maisons allemandes de faux coraux fit ensuite baisser la