sur le développement de la fortune publique dans la
Régence ».
Après avoir cité ce texte, je disais dans la première édition
de ce livre : « Il est impossible de ne pas s'associer
aux voeux exprimés dans cette pétition, et nous sommes
convaincu que satisfaction ne tardera pas à lui être donnée
par les autorités de la Tunisie. Attendre plus longtemps,
ce serait compromettre l'avenir commercial, industriel et
agricole de notre protectorat ». J ’exposais ensuite les discussions
qui existaient à cette époque, en Tunisie, au sujet
des conditions dans lesquelles pourrait et devrait fonctionner
le grand établissement de crédit dont la création
était réclamée. A peu près unanimement, les colons désiraient
que la Tunisie restât indépendante de l’Algérie. Ils
affirmaient que la-Tunisie était assez riche pour garantir
une ban'que exclusivement tunisienne. D’autres, demandaient
que les efforts du gouvernement du Protectorat se
portassent plutôt vers la création d'un établissement de
Crédit foncier que vers celle d'une Banque. A ces derniers,
les partisans de la Baftque objectaient qu’un Crédit foncier
tunisien aurait un rôle très restreint.
Ces discussions eurent, sans aucun doute, pour effet de
retarder beaucoup la solution du problème posé dans la
pétition rappelée ci-dessus. Le Comptoir d’escompte de
Paris, le Crédit foncier et agricole d'Algérie, la Compagnie
algérienne établirent des succursales à côté de la Banque
de Tunisie, mais tous ces établissements, ainsi que Îe fait
observer M. Gaston Loth1, éprouvaient de sérieuses difficultés
pour le réescompte du papier qu'elles avaient en
portefeuille. Il ajoute : « Pour obvier à cet inconvénient,
la Conférence consultative demanda, le 23 avril 1892,
qu une succursale de la Banque de France fût créée en
Tunisie. Il ne fut pas donné suite à ce voeu, mais l'on put
constater, dès 1893, une tendance à la baisse du taux de
l'intérêt, par suite de la concurrence que se faisaient entre
eux les grands établissements de crédit ». La question du
crédit commercial paraissait donc, dès ce moment, en
partie résolue. Elle reçut une solution complète à la suite
de la loi du 5 juillet Î900 qui renouvela le privilège de la
Banque de l’Algérie. En vertu de conventions passées
entre la Banque d'Algérie et le gouvernement métropolitain,
consacrés par un décret du bey en date du 8 janvier
1904 et par deux décrets du président de la République
datés du 7 mai 1904, la Banque d’Algérie fut autorisée à
émettre du papier-monnaie tunisien, moyennant certaines
conditions avantageuses pour le Protectorat. Son
concours financier permit de créer, par décret du 25 mai
1905, 1a caisse de Crédit mutuel agricole dont j ’ai parlé
dans un chapitre précédent.
Les colons européens, de leur côté, s’étaient ralliés de
plus en plus à l'idée de la création d’un établissement de
Crédit foncier contrôlé par l’État. Dans sa session d'avril
1897, la Conférence consultative émit un voeu favorable
à cette création. Elle fut réalisée seulement en 1906.
Le 20 juin 1906, un décret beylical a déterminé les conditions
d’organisation et la réglementation des Sociétés de
Crédit foncier dans la Régence. La Société anonyme « Le
Crédit foncier de Tunisie » s’étant constituée le 7 août 1906,
un décret du 8 décembre suivant autorisa son fonctionnement
et approuva ses statuts. Mais cette société eut vite
fait d’épuiser en prêts fonciers à long terme les quelques
disponibilités qu’elle possédait et dut liquider en 1908. Le
Gouvernement entreprit alors des négociations avec le
Crédit foncier de France, qui fut autorisé, par décret français
du 24 août 1909 et par décret beylical du 16 septembre
delà même année à faire des prêts fonciers dan s la Régence.
Le Crédit foncier de France n’opère pas lui-même directement.
Il use de l’intermédiaire du Crédit foncier d’Algérie
dont les statuts sont plus souples et qui a pris le nom de
Crédit foncier d’Algérie et de Tunisie. Cet établissement
sert, notamment, de banque de réescompte aux Caisses de
crédit agricole et aux coopératives.
Une des plus heureuses créations du Gouvernement du
Protectorat est celle des sociétés indigènes de prévoyance.