70 I/AIÎT ÉGYPTIEN.
li'ois conl (luaraiilo-iNi règnes jtoiir anlaiU de généralioiis. Peiidaiil ccl espace de
ieinps, ainsi exagéré, il n'élail, selon les prêtres égyptiens, arrivé ancnu cliange-
Mieiil en Egvple; le conrs des saisons, les produclions de la lerre, les iiiondalions
dn Nil avaieni élé les mêmes; en un mot, il n'était arrivé riei] d'extraordinaire:
senlenn:"!!! le soleil avait changé (jnatre fois la place respective de ses levers et. de
ses couchers. Ce i)hénomène, qn'llérodole tronve tont simple, a été considéré qnel-
(inel'ois comme nii renseignement aslroiiomiqne de la plus liante iniporlance, et dont,
ia moindre consé(inence serait de pronver (]ue les Égyptiens étaient aussi avancés
(]ue m)ns, en astronomie, donze mille ans avant notre ère, tandis qu'il est an con-
Iraire le résultat d'un nuilentendu. inévitable jieut-étre entre des liommes obligés
de se servir, jiour conférer, d'intei'prètes assez mal instruits. La juiture de l'année
civile usitée en Egypte explique sans dirricnlté ce récit extraordinaire. Celte aunée,
conslamment de trois cent soixante-cinq jours sans intercalation, parcourt successivement
toutes les saisons, lait ((u'IIérodole, peu vei'sé dans les mystères de Taslroiioniie,
ne pouvait concevoir autrement qu'en admettant un déplacemeïit du soleil, et
qui nous ju'ouve incontestablement qu'au temps d'Hérodote les prêtres égyptiens
n'assignaient pas même cinq mille ans à la durée de leur empire^ Ainsi donc, sur
ce point essentiel, cet historien est d'accord avec Manéthon.
« Pour Tliodore, la solution du ])roblènie est plus l'acile : c'est tout simplement
une laute d'orthographe. Selon cet auteur, les dieux et les hommes avaient ré^né
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vingt-trois mille ans euÉgyple; comme il revient i)lusieurs fois sur ce iu)nibre, on
ne jteut avoir aucun doute sur sa iicnsée à cet égai'd. 11 fait ensuite le partage de
cet espace de te]nj)s; il assigne dix-huit mille ans aux dieux, et un peu moins
de quinze mille ans aux hommes. On ne s'est jias aperçu, d'abord, que dix-huit et
quinze font trente-trois, el non jms vingt-trois : il y avait donc dans ce calcul
dix mille ans de troj). Ce n'était pas Diodore (jui se trompait; c'est nous qui l'entendions
mal. En y regardant de jdus ju-ès, je vis (pi'on ])mivait sans ])cine retranclier
ces dix mille ans; il suffisait de rendre majuscule une lettre qui ne l'est pas
dans nos éditions; alors un nom de nombre (pii sigjiifie dix milk, devient ce qu'il
doit être, le nom d'un roi connu d'ailleurs. Tne myriade de Iro]), qui choquait loul
à la fois la grammaire, le bon sens et la vérité historique, fait ])l;ice à MyriH, l'un
des noms du fondateur de l'empire égy])tien; et les quinze mille ans de J)iodore se
trouvent d'un trait de ])lume réduits à un peu moins de cim| mille ans. Éditeurs,
^ i:n qualorze ccnl soixante ans, l'année é-yj)tionne revieiU à son point <ie départ; il snHit (l'admolln^ (jii'llrrodolo
sou venn en E-ypLe dans ia qnali-iùnio période de cette espèce, ponr avoir sans dilïicnlté les .piati'e
mens indi,-]nes par les prêtres égyptiens. I^onr en rendre raison, il ne laut que trois périodes accomplies, c'esL-à-dire
<(nalre mille (rois cent qnalre-vings ans.
INTRODUCTION lIISTOlUOUE. 7!
Iraducteiirs, historiens, chronologistes, tous avaient pàli sur ce jtassage, sans s'apercevoir
de cette énorme différence : tant il est vrai que les esprits même les plus
judicieux se préservent diOlcilement des erreurs (^ue le temps a consacrées. Ainsi
Diodore n'est i)lus en contradiction avec lui-même, et il se trouve aussi d'accord
avec Manéthon.
« Nous avons encore une autre preuve de cette conformité. Diodore ra]»portc
(lu'il avait trouvé dans les livres égyptiens que cette nation avail élé gouvernée par
quatre cent soixante-dix princes indigènes, cinq reines et quatre Éthiopiens, en
tout quatre cent soixante-dix-neuf règnes. C'est précisément là le nombre qui se
retrouve dans les listes de Manéthon, les cinq femmes, les quatre Éthiopiens y sont
distingués; il n'y a pas un règne de plus ni de moins. 11 est difficile de trouver un
accord ])lus satisfaisant.
« Qu'on ne s'étonne pas cependant de voir, dans un même pays, une si longue
série de rois. Les Égyptiens avaient la prétention de ne donner la dignité suprênu^
qu'à des personnages illustres par les services (ju'ils avaient rendus à leur patrie :
la couronne, chez eux, était donc élective; l'hérédité ne fut januiis pour eux (pic la
violation de leur loi fondamentale. Nous connaissons les formes de leurs élcclions,
les conditions nécessaires pour être éligibles, les corps de l'État qui prenaient part
à cet acte important, el les devoirs imposés aux souverains pour préserver les peuples
des alms du pouvoir.
« Une si sage constitution, la précaution même de soumettre les rois a])rès leur
mort à un jugement sévère, ne purent cependant préserver TÉgypte tics nuillieurs
communs à toutes les sociétés humaines; car les règnes y étaient courts et les révolutions
IVéquentes : il parait nuhne que ce pays ne fut heureux au dedans et i)uissant
au dehors, que sous ceux de ces princes ([ui héritèrent du tronc et qui jouirent
des droits du pouvoir absolu dans toute leur plénitude.
« Les trois auteurs qui nous ont transmis l'histoire ancienne de rÉgyi)le, sont
donc d'accord sur un point essentiel; c'est-à-dire ([u'ils attribuent tous une durée
d'un peu moins de cin({ nulle ans à l'empire égyptien. Cette importante vérité est
renfermée dans le récit d'Hérodote, formellement énoncée ])ar Diodore, el elle
résulte des nombres détaillés donnés par Manéthon. Je ne prélends pas assurément
déterminer le degré de confiance que l'on doit avoir dans ce calcul; je prétends
seulement prouver que c'est là le système chronologique qui était admis chez les
Égyptiens avant et a|)rès la destruction de leur empire, le seul que les Grecs aient
connu et ])u conuaitrc, enfin (pie Manéthon nous a conservé l'ensemble de la Chronologie
égyptienne de rÉgyple.
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