380 N O T I C E S DESCRIPTIVES.
encore les deux médiales portent des chapiteaux en fleurs de lotus épanouies, et les deux
extrêmes en boutons de lotus tronqué. Les quatre piliers, qui joignaient, de chaque côté, cette
colonnade au spéos, sont ornés de statues colossales, coiffées de la mitre appelée pschent, vêtues
d'un simple giron, et portant, dans leurs mains croisées sur la poitrine, l'aspersoir et la crosse,
emblèmes ordinaires d'Osiris. Celui-ci est représenté sous les traits d'un Ilamsès, peut-être,
le Grand. Toute cette partie, à demi détruite, était bâtie, avons-nous dit, en grès, et précédait
le temple proprement dit, taillé dans le rocher. On ne distingue plus, malheureusement, que
quelques traces des bas-reliefs historiques qui décoraient la façadé.
Le pronaos, le naos, le sekos ou sanctuaire, et les pièces latérales sont donc creusés dans le
rocher. Le pronaos est soutenu de chaque côté par trois énormes piliers carrés, devant chacun
desquels se tient debout, sur une base élevée d'un mètre, un colosse d'environ 6 mètres de
hauteur, lourdement sculpté comme les ébauches grossières d'un art qui commence. Derrière et
dans rintervalle de ces piliers, on a pratiqué de chaque côté, dans les parois latérales, quatre
niches ou chapelles, contenant chacune trois personnages debout, grossièrement sculptés en plein
relief, et représentant les trois grands proleéteurs de ce temple, Pthah, Hâthor, sa compagne, et,
au milieu d'eux, Ramsès. Le naos, soutenu par deux piliers carrés, donne entrée dans ses côtés
latéraux à deux petitee salles dénuées de sculptures; il en existe encore deux semblables de
chaque côté du sanctuaire, au fond duquel on a sculpté quatre statues assises, plus grandes que
nature, et ayant devant elles un autel isolé dénué d'ornements et de légendes qui ont peut-être
été effacés, comme on a mutilé avec barbarie, avec fanatisme, tous les bas-reliefs qui décorent
les murailles. Cet autel, taillé dans le roc, était probablement destiné à poser la bari sacrée du
dieu Ptah. Les quatre statues, dont la sculpture est assez belle, représententPhré, Ramsès, Pthah
et Hator. Ce spéos, si remarquabl e par la sévérité de son style et l'aspect imposant de son architecture,
était jadis rehaussé de couleurs qui ont toutes disparu sous une couche épaisse de suie
et de poussière. Il ne reçoit d'autre jour que celui de la porte d'entrée, ce qui ajoute encore à
l'impression qu'il produit : aussi la faible clarté, qui règne dans les salles intérieures, suffit-elle
à peine pour distinguer les sculptures.
Le travail du spéos de Ptaheï doit être rapport é à différentes époques. Il paraî t être très-ancien,
et il est probabl e que Ramsès voulant réparerce monument, fit couvrir les murailles de bas-reliefs,
mettre son cartouche sur les colosses, replâtrer les échancrures du temps, donner un air de jeunesse,
restaurer enfin ce spéos qui de son vivant était peut-être déjà décrépit et l'uiné ; ce qu'il
y a de certain, c'est qu'on ne retrouve aucun monument de ce genre, creusé par ordre des prédécesseurs
de Ramsès, ni par aucun de ses successeurs.
Rurckhardt et plusieurs écrivains anglais ont voulu voir à Guirché un anneau de la chaîne
immense qui liait la civilisation du Nil à la civilisation de l'indus et du Gange. Ils ont cru
découvrir que les traditions d'une autre civilisation avaient inspiré les architectes égyptiens, et
que Ramsès avait rapport é le goût de ces monuments de son aventureuse expédition dans l'Inde.
Mais cette analogie n'est fondée que sur des conjectures toutes spéculatives, cette prétendue
similitude n'est qu'apparente et n'existe réellement pas.
Les prétendus rapports entre les mythologies des deux peuples ne sont pas plus complets. Il
y a certaines analogies dans la cosmogonie, les arts, l'industrie des Indous et des Égyptiens,
parce que, habitant des pays dont le climat est à peu près semblable, ils se sont trouvés dans les
mêmes circonstances physiques et ont dû procéder d'une manière identique, mais il n'y en a pas
assez pour établir des rapports, et à plus forte raison une origine commune.
A R C H I T E C T U R E .
TEMPLE DE MÉNEPHTEHUM ; PLAN, COUPE ET ÉLÉVATION.
En débarquant au Sycomore de Gournah, et traversant quelques champs de dourah couverts
d e g r o u p e s d e palmiers et de tamaris qui terminent agréablement de ce côté la belle plaine
de Thèbes, le premier monument qui attire l'oeil des voyageurs est un vieux palais, appelé dans
^^ occidentale d'une butte couverte d'arbres et de décombres, parmi
lesquels on aperçoit çà et là quelques restes de constructions qui jadis se liaient à l édd.ce pnnc
i p i l , belle ruine, jaunie par le feu du soleil, aride et desséchée comu.e -
bornent l'horizon. Les débris d'un propylon annoncent que l'encemte générale de ce pal a s
s'étendait de ce côté à plus de 100 mètres du portique qui le précède. Ce propylon de giès,
qui porte les légendes de Menephthah P^et de Ramsès II, avait jadis sa façade inténour e ornée
de deux sphinx colossaux, à têtes humaines coiffées de pschent entier. Une base, que les fouilles
ont mise à découvert, étale une série de captifs avec leurs écus blasonnés du nom de leur pay. et
une longue légende de Menephthah. De cette porle à l'entrée du palais, il existait jadis un
dromos divisé par un autre propylon; mais on ne dislingue plus les débris des sphinx qui le
bordaient probablement. A ces deux propylons, aujourd'hui isolés, se rat tachaient jadis d énormes
murs de briques crues qui formaient deux enceintes autour du palais. _
Le plan de cet édifice ne ressemble en rien à ceux des autres monuments egyptiens : la
distribution, l'élévation et l'étendue des salles, tout semble annoncer que 1 architecte s est
occupé ici de construire une habitation sinon commode, du moins appropriée aux besoins les
plus habituels de la vie des Égyptiens. C'est en eiïet la demeure d'un souverain de Menephthah
ou Setii, ainsi que le disent les légendes ; mais c'est aussi un temple dédié a Âimnon
tant le culte était lié à la royauté, tant la vie privée des rois se rattachait a un rituel obligé,
imposé en quelque sorte par les doubles fonctions de chef spirituel et temporel de 1 Etat.
Un portique de plus de 50 mètres de longueur, formé de dix colonnes à faisceau à chapateaiix
en bouton de lotus tronqué (de 7 ^ 5 0 de hauteur sur de circonférence) décore la façade du
Menepnukum ou d.meur. d. Menepkihah. Le mur de fond de ce portique est orné de bas-reliefs
représentant diverses offrandes aux divinités de Thèbes. Le registre mféneur est occupé par
une série de figures de l'Égypte et du Nil apportant des offrandes. L état de dégradation de ces
différents ornements ne nous a pas permis, à notre grand regret, de les signaler sur la reproduction
de notre dessin. „ . . j- • t •
Trois portes conduisent de ce portique dans l'intérieur de 1 édifice qui est divisé en trois
parties indépendantes les unes des autres. La porte principale, qui correspond à 1 ent re-colonnement
du milieu, donne entrée à une grande salle qui se décore ici du nom de MANOSKII, SME
d'assemblée, prétoire de justice, salle qui avait la même destination que celles qu on a désignées
sous le nom de salles hypostyles dans les autres palais de Tlièbes. Elle est soutenue par six colonnes
lisses, mais du reste semblables à celles du portique. De chaque côté trois petites pièces
ouvrent sur cette salle. Derrière les colonnes, elle s'élargit de toute la profondeur des petites
pièces latérales, et forme une espèce de vestibule où sont percées cinq portes de quatre salles
d'inégales dimensions et d'un corridor qui conduit à une large chambre soutenue par quatre
piliers décorés à leur base du nom du roi, alternés avec les symboles de la haute et de la basse
Égypte.