I/ART ÉGYrTlEN.
11 nous reste à parler des habitations particulières, cette enveloppe de l'individualité
humaine, ordinairement si intéressante à étudier pour pénétrer dans la vie
inlime de la famille, pour connaître les jouissances, le luxe ou la simplicité d'une
nation : les bas-reliefs et les peintures des hypogées ayant permis d'entrer dans des
détails assez circonslanciés, il nous sera heureusement possible de su])plécr au silence
gardé, à cet égard, par les anciens auteurs, en reproduisant en partie, ce qu'en a dit
M. Jules Gailhabaud, dans son ouvrage sur les monuments anciens et modernes.
« De toutes les villes égyptiennes, la seule qui puisse nous donner aujourd'hui
une idée assez nette de la disposition d'une ville, de l'arrangement de ses maisons
et de la distribution de ses rues, est l'ancienne Psinaula, située dans l'IIeptanomide,
entre les villages modernes de Tell el-Amarna et de lladji-Gandyl. En ajoutant
à tous les renseignements qu'on peut recueillir dans "ses ruines, les observations
faites en d'autres lieux, nous verrons qu'en général les villes égyptiennes étaient
divisées par des rues tracées régulièrement, assez étroites, et (excepté les principales)
pouvant à peine suflire au passage de deux chariots.
Les maisons étaient en général contiguës; elles formaient les côtés des rues
et des ruelles, et avaient rarement plus de deux étages, excepté à Thebes, où elles
en avaient quelquefois quatre à cinq. Elles étaient disposées avec art et parfaitement
appropriées aux exigences du climat.
Les petites uiaisons consistaient en une cour et un édifice présentant trois ou
quatre chambres au rez-de-chaussée, avec une ou deux chambres à l'étage siqiérieur,
dont une partie servait de terrasse; on y arrivait de la cour par une rampe d'escalier.
Cette disposition esl encore à jteu près celle de la plupart des maisons dans
les villages d'aujourd'hui.
Dans les maisons plus vastes, les chambres, en plus ou moins grand nombre,
étaient rangées autour d'une cour et régulièrement distribuées sur les deux côtés,
ou placées le long d'un corridor. Celles du rez-de-chaussée servaient aux besoins du
ménage, tandis que celles des étages supérieurs étaient habitées par la famille. Au
sommet de l'édifice régnait une terrasse où Ton pouvait jouir de la fraîcheur le
soir, et où probablement ou passait la nuit dans la saison des grandes chaleurs.
Cette terrasse était quelquefois garantie du soleil par un toit léger, soutenu par des
colonnettes de bois., peint de couleurs brillantes. La partie de la teri-asse (jui n'était
pas couverte portait un large auvent en planches dans le genre des mulcafs arabes,
et qui servait comme eux à établir un large courant d'air dans la maison. Quelquefois
une partie de la maison excédait en élévation le reste de l'édifice, et prenait
la forme d'une tour.Enfin certaines habit.ations étaient couronnées par un parapet
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surmonté d'un cordon de créneaux arrondis. La cour était un espace vide, et |)avé,
ayant au centre un bassin ou une fontaine, souvent enlonrée d'arbres. I»our se
garantir des rayons du soleil durant les fortes chaleurs, on tendait probal>leiuent
des toiles au-dessus des cours qui n'étaient ])oint ombragées. Dans les grandes maisons,
la cour était précédée d'un portique ou porche soutenu par deux colonnes
à boulon de lotus, qu'on décorait les jours de lète de l.anderoles tricolores. Le
nom du propriétaire ou de la personne qui habitait la maison était peint sur le
linteau de la porte: d'autres fois on y inscrivait une sentence hospitalière, comme
celle-ci : La bonne demeure.
Les portes ainsi que les fenêtres étaient généralement à deux battants, disposés
à peu près comme ceux de nos édifices. Elles s'ouvraient eu dedans, et se fermaient
à raide de verrous et de loquets. Quelques-unes avaient des serrures en
bois dans le genre de celles qui sont généralement usitées de nos jours en
Égypte. La plupart des portes intérieures n'avaient qu'une simple tenture, itrobabkment
d'une étoffe légère. Quant à la décoration intérieure des habitations,
les peintures des hypogées peuvent seules nous en donner une idée. Les murs étaient
revêtus de stuc et peints de scènes religieuses ou domestiques en rapport avec la
destination de l'appartement. Les galeries et les colonnes du porche étaient coloriées
de façon à imiter la pierre ou le grauit. Les plafonds étaient décorés d'entrelacs,
de méandres et d'ornements d'un goût si pur que la plupart furent adoptés
par les Grecs. Enfin les planchers, quand ils n'étaient point pavés de dalles, étaient
couverts de nattes tressées en jonc de couleur.
Mais c'est dans leurs villas que les Égyptiens déployaient tout le luxe et le
confort de leur architecture domestique. Selon les conjectures les plus plausibles
basées sur les plans et les élévations qu'on retrouve dans les peintures des hypogées,
principalement à Thèbes et à Psinaula (Tell el-Âmarna), les villas des grands personnages
étaient aussi vastes que magnillques. Elles étaient généralement situées à
proximité du Nil ou sur les rives des nombreux canaux qui fertilisaient toute la
vallée. Une vaste enceinte renfermait l'habitation i)roprement dite, les jardins,
les écuries, les magasins, la ferme et toutes les dépendances immédiates de la
villa, disposée comme la comprirent aussi les Romains, L'entrée principale était
précédée de j-ylônes analogues à ceux des temples et des palais. Une rangée d'arbres
s'étendait souvent le long de la façade; pour les garantir de tout accident,
on les entourait d'une petite construction peu élevée et percée de trous pour ladlUer
la circulation de l'air. Le porche ouvrait sur une cour où se trouvait isolé
un petit édilicc à colonnes, f e r m é par un mur à hauteur d'appui, et recouvert d'une
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