202 L'ART ÉGYPTIEN.
(Icvail arriver révéncmenl le i>lus imporlaiit do toute l'aiinée. Savary prétend qu'on
l'avait multiplié à Tinfini el qu'on le voyait devant tous les monuments remarquables,
jiarce t^u'il était, pour le peuple l'équivalenl de cette phrase : Peupies, sous
tel signe, dans tel temps, le fleuve débordera sur vos campagnes et y portera Ja fécondité. »
Un passage des Stromates de Clément d'Alexandrie affirme, de son côté, que le
sjiliiux fut l'emblème de la sagesse unie à la force : cette interprétation pourrait
sufllre si cette création fantastique n'eût eu qu'une seule forme déterminée, parce
(|ue les momiments confirmeraient alors cette induction d'un symbole général; la
[brcc et la sagesse devant être considérées comme des qualités communes à tous
les personnages mythiques auxquels l'Égypte rendait un culte habituel; mais elle
est incontestablement insuffisante, parce qu'il n'est pas permis d'ignorer que cette
dénomination servait à désigner diverses figures telles que les sphinx androcéphaies,
les androsphinx, les sphinx hiêracocéphales, et les criosphinx, à moins toutefois que
les attributs parliculiers à chaque divinité, ajoutés à cet emblème, n'aient été l'unique
cause de la diversité de ses représentations.
Les pharaons furent aussi figurés d'une manière symbolique par le sphinx
comme participant tous à la plénitude de la force et de la sagesse des dieux, au
nombre desquels on les inscrivait de leur vivant même : c'est, du reste, à ce fait
qu'on impute la création de presque tous les sphinx androcéphales : Les androsphinx
])ortaient ordinairement le daft, coiffure civile, striée et ornée d'un urcus, symbole
de la royauté au-dessus duquel on plaçait le pschent : en outre, un large collier appelé
oKsch et les appendices de la coiffure aidaient à vaincre les difficultés de l'assemblage
de deux natures différentes. Le grand sphinx serait une création de ce genre.
On voit quelquefois aux sphinx, scidptés en bas-reliefs, deux longues ailes essorantes
qui sortent des épaules : il existe aussi, mais sur les bas-reliefs seulement,
d'autres créations plus fantastiques du môme ordre, dont la dénomination n'est
pas parvenue jusqu'à nous : rappelons seulement, ici, que les sphinx, qui sont
toujours représentés, par la sculpture en ronde bosse, accroupis et dans une pose
calme et majestueuse, sont souvent figurés debout et en mouvement sur les basreliefs
et les petits monuments.
Le nombre considérable de sphinx placés sur les dromos qui précédaient les
différents édifices de Thèbes a confirmé, depuis le siècle dernier, ce que les anciens
nous avaient appris de l'emploi des sphinx pour former les avenues des édifices
sacrés : l'un de ces dromos était entièrement bordé tie béliers, un autre de criosphiux,
un troisième de sphinx : tous ces sphinx sont monolithes et à jieu près
de même dimension; ils sont placés sur deux lignes parallèles, les uns en face des
AUCIIITECTUIIE.
autres, et chacun sur un piédestal décoré de légendes hiéroglyphiciaes qui rai)i»cllent
le nom et les titres des pharaons ([ui les firent ériger.
COLONNES ET PILtEilS.
Les architectes i)rétendent reconnaître l'origine des colonnes dans les troncs
d'arbres plantés en terre : la base et le chapiteau seraient l'imitation des hens de
bois vert et du fer que, plus tard, on mit au sommet des arbres pour les empecher
de se fendre; l'architrave serait un tronc équarri, posé immédiatement sur les
troncs; enfin la frise occuperait la hauteur des solives destinées à former la couverture,
et leur grosseur, ainsi que l'intervalle qui les sépare, auraient donne 1 idee
des triglyphes et des métopes qui caractérisent la frise dorique : les modillons
seraient les bouts des soliveaux placés en talus; la corniche représenterait les i>lanches
qui les recouvraient pour former ensemble la couverture; comme le Irontou
serait la reproduction pure et simple de la forme de cette couverture.
Mais tout ceci, à notre sens, est plus ingénieux que probable; car il y eut une
architecture particulière à l'Égypte, où les pluies sont si rares, et où les magnifiques
monuments, qui y subsistent encore, sont presque toujours à ciel ouvert ou en
terrasse • or celte architecture, qui prit bien certainement naissance dans ces pays,
ue parait y avoir subi de modifications, dans le sens indiqué plus haut, que du
fait des Grecs qui avaient habité un climat plus rigoureux. C'est ce qui nous fait
dire que, certainement, les ordres Grecs et Romains ue nous paraissent pas avo.r
été la source essentielle de l'art architectural; et qu'on peut aussi trouver ailleurs
de beaux modèles.
Mais, s'il est vraisemblable que cc lurent les troncs d'arbres qui louraireut
l'klée des colouues, il uous parait iuq_.ossible de voir rien qui puisse en donner une
plus parlaite image qu'un beau dattier dont la tige droite el svelte, est couronnée
d'un bou.iuet de feuilles et de fruits, et dont les racines forment toujours un empa^
tement qui lui sert de base. Tel encore le bananier avec ses longs régimes de Iruils
et ses grandes feuilles unies.
Les constructeurs Égyptiens, qui avaient constamnienl ce beau modèle sous les
vcu. semblent en effet avoir conservé le souvenir de celte origine dans plusieurs
de leurs colonnes .lont le lut est ciselé et couvert d'écaillés, et dont le chapiteau esl
orné de palmes et de fruits. D'autres végétaux pourraient encore avoir fourni de charmants
modèles; tels sont les papayers, dont nous empruntons la gracieuse description
ù Chaleaubriaiid : « Leur tiouc droit, dit-il, grisâtre et guilloché, de la hauteur ,1e vnigl
1 '1 / v •
. i
• J i
lIt .J !
S i f
, 'l;i .1'-
^^ .• • . i
i •
M
-.lî' ;