354 NOTICES DESCRIPTIVES.
par les découvertes de Belzoni, de quels mystères les Égyptiens enveloppaient cette demeure des
morts.
Ces entrées sont percées dans toutes les directions, mais toujours de manière que l'axe
longitudinal de l'hypogée aboutisse au point culminant de la montagne, qui s'élevait ainsi en
cône au-dessus du tombeau. La pensée qui avait présidé à la construction des pyramides se
retrouvait là tout entière, et plusieurs montagnes, qui s'élèvent comme de gigantesques tumulus,
semblent avoir donné l'idée des constructions pyramidales.
Lorsque Strabon voyageait en Egypte, on comptait une quarantaine de ces tombes royales.
Diodore, je crois, n'en compte que dix-sept qui subsistaient encore sous Ptolémée-Lagus,
aujourd'hui, malgré des découvertes récentes, on n'en connaît que vingt-cinq : les unes achevées,
les autres ébauchées ou entièrement nues : ces dernières, ouvertes depuis des siècles, paraissent
avoir été revêtues de stuc qui est tombé sous l'édacité du temps.
Les hypogées de Biban el-Molouk, où les pharaons ont déployé une magnificence vraiment
royale en faisant concourir les trois grands arts à l'embellissement de leur dernière demeure,
sont creusés à des niveaux différents et sans aucune symétrie relative, mais sur un plan à peu
près uniforme. Une porte assez étroite sert d'entrée à une longue galerie ou couloir qui se dirige
vers le centre de la montagne, suivant un angle plus ou moins incliné à l'horizon, ou par de
longs pahers séparés par des escaliers.
Ces couloirs sont divisés tantôt par des chambranles, tantôt par de petites pièces carrées ou
rectangulaires, ou enfin par des escaliers et de nouveaux passages qui précèdent une grande
salle oblongue, cà plafond cintré, soutenue par des piliers élevés sur un stylobate qui règne dans
tout le pourtour. C'est dans cette vaste pièce, nommée dans les inscriptions la salle dorée, et
ordinairement creusée à la plus grande profondeur, que reposait dans un énorme sarcophao'e
de granit, la momie royale, ceinte d'une triple enveloppe de bandelettes, de cartonnage et
de bois.
Le tombeau dcRamsès II se distingue de tous les autres par son entrée, ornée de deux pilastres
à tète de vache, symbole d'Hathor, déesse rectrice de l'Amenti ou enfer égyptien. II est aussi
remarquable par de petites salles percées latéralement dans le corridor d'entrée. Chacune d'elles
conserve encore de fraîches peintures représentant des meubles, des armes et des scènes de la
vie privée des Égyptiens.
Quelques-uns de ces tombeaux sont d'une étendue immense, et leur longueur varie depuis
16 jusqu'à 120 mètres. Les rois les faisaient creuser de leur vivant, et en poursuivaient les
travaux jusqu'au moment fatal où la mort les forçait à venir habiter cette funèbre demeure,
dont ils prenaient possession dans l'état où elle se trouvait après les soixante-dix jours consacrés
à l'embaumement. Aussi est-ce aux plus longs règnes qu'appartiennent les tombes les plus
complètes.
Ces hypogées sont creusés dans une pierre calcaire d'une pâte fine et blanche, qui se
travaille et se polit facilement. Cette pierre est parsemée çà et là de coquilles fossiles et de silex,
que les sculpteurs ont enlevés et remplacés par des morceaux de calcaire adroitement encastrés sur
les parements du mur. 11 paraît qu'on n'avait égard qu'à la capacité du rocher, et à son homogénéité,
pour creuser un tombeau, puisque leurs axes respectifs ne conservent aucun parallélisme,
et paraissent tous se diriger de l'endroit choisi au point culminant de la montagne. Ces
syringes étaient toujours percés en ligne droite, et l'irrégularité qu'on remarque dans quelques
tombeaux est due au voisinage d'autres tombeaux qui ont forcé de faire un coude pour les
éviter. On voit que l'hypogée de Meïamoun, arrivé au tiers de sa longueur, pénétra dans un
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ARCHITECTURE .
tombeau voisin, et que cette rencontre inattendue obligea l'architecte k rejeter son excavation
sur la droite, afin de trouver un espace libre pour continuer l'hypogée au gré du pharaon auquel
il était destiné. C'est à une cause semblable qu'il faut attribuer la double déviation du tombeau
d'Aménophis m. . , , . i „„„
L'architecture des hypogées royaux est extrêmement simple : point de moulures et de corniches,
ni d'architraves, des murailles sans profil, des pilastres carrés et des plafonds plats ou
taillés en berceau, voilà tout. La statuaire en était aussi bannie. En revanche, la sculpture en
bas-relief et la peinture ont étalé toutes leurs ressources. Dans ceux qui sont colorés seulement,
la peinture repose sur un frêle enduit de plâtre qui, n'étant point exposé aux vicissitudes des
saisons et à la lumière solaire, a conservé toute la fraîcheur de, la palette. La richesse des décorations
va croissant jusqu'à la salle dorée, où reposait la momie royale. Tous les sarcophages
ont été violés. Les barbares qui ont pillé ces tombeaux en ont chassé, brisé, dispersé les
cadavres que la piété et l'orgueil prétendaient y faire reposer en paix pendant trois mille ans.
Ces sarcophages, ordinairement en granit, sont travaillés avec un art et une patience admirables.
Dans le tombeau de Ménephtah I", découvert en 1817 par Belzoni, le sarcophage était en albatre
oriental, couvert de fines sculptures; quoique aussi colossal que les autres, les parois en sont si
minces qu'elles deviennent transparentes quand on place une lumière à l'intérieur. Le sarcophage
de balsalte vert qui orne le Musée du Louvre est un des plus beaux que l'on connaisse.
C'est dans ces tombeaux que le génie mystérieux des Égyptiens se montre dans toute sa
plénitude; c'est là que sont le plus fortement empreintes les traces des croyances sous le joug
desquelles ce peuple étonnant a vécu. Lorsqu'à la faible lueur d'une torche, on parcourt ces
longues enfilades de pièces toutes couvertes de bas-reliefs et de peintures symboliques, lorsqu on
examine ces salles magnifiques et spacieuses exécutées avec tant de difficultés, de fatigue et de
patience, on ne peut se défendre d'un étonnement rehgieux, d'une sorte de stupéfaction, en songeant
que tout ce faste ruineux était condamné à d'éternelles ténèbres, et ces immenses légendes
à n'être jamais lues. Tout cela serait incompréhensible, si le syètème religieux et psychologique
des Égyptiens nous était entièrement inconnu.
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1 : 1
N é c r o p o l e dk Tiièbes; nyPOCÉE du grand p rêt r e Pétamounôpii. - xviii= dynastie.
Le plus remarquable des hypogées sacerdotaux est celui du Prophète ou Basilicogrammate
Pétamounôph, dont l'étendue surpasse même le plus grand hypogée des rois.
Ce tombeau, déjà décrit et dessiné par la commission d'Egypte, est situé près de la vallée
d'el-Assassif. . , , . ,
Il est précédé d'un grand espace découvert en partie taillé dans le roc, et en partie bati de
briques crues de façon à former une vaste enceinte précédée d'un pylône de briques qui annonce
de loin l'entrée de cet hypogée monumental. Les murs qui tracent cette enceinte sont ornés à
l'extérieur de rainures accotées qui forment une décoration qu'on ne retrouve que dans les édifices
funéraires. La porte percée dans ce pylône est ouverte par un arc en plein cintre formé de
cinq ou six rangées de briques superposées.
De cet arc, on pénètre dans un vestibule qui est aussi à ciel ouvert. Toutes les autres
pièces, au nombre de 28, sont souterraines, les unes de plain-pied, les autres creusées à un
étage inférieur auquel on arrive par un long escalier.