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certainement des chiens sauvages ne s’y se-
roient pas mépris.
Un autre sujet d’inquiétude m’aîlarmoit
encore, et celui-ci me paroissoit fondé ;
c’étoit de manquer d’eau sur la cime de ces
montagnes que je me proposoisde parcourir
, pour me rendre au promontoire d’Afrique.
Je craignois d’être obligé de renoncera
mon projet, pour ne pasm’éloigner des sources
et des ruisseaux , ou de descendre sans
cesse des hauteurs pour nous désaltérer dans
les vallées ; ce qui eût entraîné à-la-fois, et
beaucoup de fatigues, et beaucoup d’ennuis,
Déjà, nous n’avions que trop à souffrir
des montées et descentes continuelles qu’exi-
geoit notre passage d’une montagne à une
autre , sans me voir forcé encore à répéter
plusieurs fois le jour cet exercice pénible
sous un soleil brûlant¿heureusement il ne fut
point nécessaire. Pendant les cinq jours que
dura mon voyage, je trouvai dans les fentes
et les creux des roches que je parcourois,
«ne excellente eau de pluie ; et ces petites
citernes naturelles se trou voient toujours,
pt assez multipliées , et assez abondantes
|?Qqr fournir 4 tPl*s nos be§pin§,
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" Du pied de la Table à la pointe d’Afrique,
on ne compte ordinairement que huit lieSies
par la route ordinaire ¿ moi, parles détours,
j ’en avois bien fait vingt-çinq à trente ; mais
je n’éprouvai aucun encombre, et j’arrivai
enfin, à ce promontoire redoutable, le plus
célèbre et le plus orageux de toûs ceûx de
l’ancien monde. Ees dangers de lamer presque
toujours en fureur, l’avoit fait appeller
parles premiers navigateurs Portugais Cap
des tourmentes j nom funeste auquel ils
substituèrent bientôt le nom plus consolant
de Cap de Bùnne-Espérance, quand, en ouvrant
à leurs yeux l’océan Indien, il offrit
à leur cupidité barbare la possession ét
les trésors de la plûs riche contrée du
globe.
Placé dans le lieu de l’univers le plus favorable
, peut-être, aux grands spectacles
delà nature , j ’avois à ma droite l’Atlantide,
à ma gauche la mer des Indes, et devant moi
celle du Sud, qui, venant avecfracas.se briser
à mes pieds, sembloient vouloir attaquer
la chaîne des montagnes, et engloutir l’Afrique
entière. Pour rendre plus magnifique
l'effet sublime de ce tableau, je n’avois qu’un.
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