
48 V o Y A G *
de canton en canton. Cette vie errante les
empêche de se bâtir des habitations fixes.
Quand leurs troupeaux les obligent à séjourner
pendant quelque tems dans un lieu
particulier , ils se construisent à la hâte
une hutte grossière qu’ils couvrent de nattes
, à la manière des Hottentots, dont ils
ont adopté les usages et dont ils ne diffèrent
plus aujourd’hui que par les traits du
visage èt la coùleur. Le mal-aise pour ceux-
ci naît de c& qu’ils n’appartiennent a aucune
situation précise de la vie sociale.
Ces nomades fainéans sont géiiéralement
en horreur à leurs-laborieux voisin» qui redoutent
leur approche et s’en éloignent le
plus-qu ils peuvent;« parce que n’ayant pas
de propriété» ils violent sans sérmpule celle
des autres, ét que quand leurs bestiaux
manquent de pâturage, ils les éonduisent
furtivement sur le premier terrain cultivé
qui est à leur portée. Se flattferit-ils de
n’être point découvert ,- ils restent là jus-
qu à ce que tout soit dévoré. S'apperçoit-
on du délit,- alorS commencent des quérel-
les-, des battèries, puis de» procès, dans
lesquels il faut recourir au drossart, et qui
( fin issent
e n A f r i q u e .
finissent presque toujours par faire trois
ennemis, du voleur/ du volé et du juge.
Rien de plus vil et de plus rampant que les
colons de la première classe, quand ils ont
affaire à quelqu’un des principaux officiers
de la Compagnie qui peuvent influer sur
leur sort. Mais aussi rien de plus sottement
vain et de plus insolemment haut
vis-à-vis des personnes dont ils n’ont ni*à
espérer, ni à craindre. Fiers de leur aisance
, gâtés par la proximité- d’une ville
dont ils n’ont pris qu’un luxe qui les a corrompus
et des vices qui les ont avilis; c’est
sur - tout envers les- étrangers qu’ils dé-
ployent leur morgue et leur imbécille orgueil.
Voisins des colons qui habitent l’intérieur
du pays, n’espérez pas qu’ils les regardent
comme leurs frères. Pleins de mépris
pour eux, ils leur ont donné, le nom
de Rauw-boer : sobriquet injurieux qui ,
en François, répond à celui de manant.
Aussi, jamais ne voit-on ces honnêtes cultivateurs
, lorsqu’une affaire les amène
à la ville, s’arrêter dans leur route chez
les gens dont je parle:; ils savent trop bien
avec quel ;dédain insultant ils y seroient
Tome I. D