
V O Y A G E
nu plutôt mes vetemens mouillés polir eii
prendre de secs, je me jettai sur mon ma-
telat, et j’y dormis sans interruption jusqu’au
lendemain à midi, c’est-à-dire, près
de dix-huit heures ; j ’y serois même, je
crois, tombe en léthargie, si Swanepoel,
alarmé d’un si long sommeil et craignant
que je ne fusse malade, ne fut venu m’é-
yeiller.
Jonker et les deux Hottentots que j ’avois
laissés en arrière étoient arri vés dans la matinée,
tandis que je dormois j ils n’ay oient
pas manqué de raconter à leurs camarades
toutes les circonstances de notre aventuré.
Chacun en raisonnoit à sa guise y cependant
l ’histoire du cachalot rendoit mon
imprudence bien moins grave à leurs yeux y
ils regardoient même mon voyage à la mer,
comme le plus heureux événement de toutes
nos entreprises y tous regrettoientde n’avoir
pas .été choisis pour me suivre. Le seul
Swanepoel s’en affligeoit, à cause des dangers
que j ’avois courus. Tantôt il adressoit
ses rebiffades à la troupe entière, tantôt
il gourmandoit les quatre voyageurs et leur
faisoit un crime de m’avoir obéi. Moi-même,
tjiiand il m’eût éveillé, je ne fus pas exénipt
de ses reproches. Je respèctois Swanepoel
par rapport à son grand âge > et j ’éèoutai
ses remontrances y mais j ’étois sur tout fâché
de ne pouvoir lui répondre en étalant
à ses yeux la dépouille d’une conquête plus
brillante que celle d’un ibis, seul fruit dé
ma dangereuse expédition *
A dîné, mes quatre compagnons avoient
monté la tête de leurs camarades au sujet
de la quantité d’huile qu’on pourroit se procurer
en allant sur les bords de la'mer où
nous avions laissé le cachalot. Tout le reste
du jour il né fut question que du maudit
Cachalot y leur imagination s’enflamma à tel
point que le' lendemain, à mon réveil, ils
vinrent tous en corps me présenter leur
requête et me supplièrent de laissèr partir
six hommes avec deux boeufs pour aller
à la mer recueillir une certaine provision
de Cette graisse fondue, qui devoit leur
procurer de si douces jouissances. Ce n’étoit
pourtant point là tout-à-f'ait le motif qu’ils
alléguoient pour me déterminer à charger
mes équipages de Ce surcroît d’embarras.
A les entendre, ils he consultoient que
S a