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pèce nouvelle, que jusqu’à ce moment j®
n’avois point encore apperçue en Afrique ,
et que je n’y ai jamais revue depuis : c’étoit
un merle de roches. Je l’ai apporté en Europe.
Il fait aujourd’hui partie de mon cabinet,
et formera dans l’Ornithologie que je
vais publier bientôt, une nouvelle espèce
intéressante, qui mérite d’être connue des
naturalistes.
Un oiseau tué si près de la ville, et nouveau
néanmoins pour tous les habitans du
Cap, ne devoit être sur la Table qu’un étranger.
Je soupçonnai qu’il pouvoit y être venu
de cette suite de roches et de montagnes,
qui, par leur ressemblance avec celles du
nord de l’Europe, sont appellées JMontagnes
de Norvègey et qui, se détachant de la Table,
vont, en se dirigeant au sud jusqu’à la mer,
former ce qu’on appelle la Pointe méridio
nale d ’Afrique. Plusieurs personnes avoient
eu la curiosité de visiter cette pointe ;mai s elles
ne s’y étoient rendues que par les bords ds
la mer, ou parla route de Constance et de
la Baie-Falso; moi, je voulois y aller par la
crête même des montagnes. Une entreprise
aussi nouvelle sembloit me promettre des
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objets inconnus et curieux» Je n’avois à redouter
dans mon voyage qu’une extrême
fatigue ; et là considération d’un pareil inconvénient
n’étoit point faite pour m’arrêter.
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Un ami me prêta deux de ses Nègres , j ’y
joignis un Hottentot, et leur distribuai à
porter entre eux ma canonnière, ma carabine,
un manteau, des munitions de chasse,
quelques vivres secs, en un mot, ce qui me
paroissoit absolument indispensable; car,
devant toujours monter et descendre, il ne
nous fàlloit rien d’embarrassant. Moi, je
portois mon fusil à deux coups, j ’avois deux
pistolets à mà ceinture, èt j ’étois suivi de
trois chiens, l’élite de ma meute.
Ce fut dans cet équipage et par le, plus
beau tems du monde, que je me rendis sur
le sommet de la Table.
Vue dans l’éloignement, et à une certaine
distance , la montagne paroît se terminer
en plateau, ét telle est l’origine de cé
nom de Table que lui ont donné les voyageurs
et les marins. Cependant il s’en faut
bien ( et je l’ai déjà dit ) que son sommet
soit une plaine ; sillonné dans toute sa sur-
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