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étoit frappé.Peut-être qu’en me retirant clans
mon Chariot, j ’aurois pu, à la faveur de
l ’obscurité, me garantir de leurs insultes 5
mais comment échapper aux cris perçans
de cette multitude immense qui s’égosil-
lôit dans les rochers. Mes bêtes elles-mêmes,
en étaient inquiétées autant que nous.
Tout m’annonçoit une Unit fâcheuse et
sans espoir d’un sort meilleur. Dans cette
position désolante, je ne vis qu’un seul
parti à prendre J celui de lèver le camp et
d’abandonner le champ de bataille à ces
ennemis tenaces.
En conséquence, je donnai mes ordres}
on plia les tentes, on attela, et nous
allâmes camper, toujours en descendant la
Rivière-des-Eléphants, à un endroit nommé
en hottentot Krekenap,, et en hollan-
dois È a ck-h o o v ey
Malgré l’humeur que devoit nous donner
ce décampement nocturne, et l’aventure
qui l’occasîonnoït, j ’étois très - aise
d’aller en avant, dans l’espérance de trouver
un pacage avantageux pour mes bêtes,
qui, toutes, étoient réduites à un état déplorable
. et sur tout les boeufs et les che-
V a u x qui j depuis le Heere-logement, nourris
de plantes grasses , les seules que la
sécheresse eut épargnées, avoient tons un
dévoiement dont j’étois fort inquiet. Je leur
donnai, pour se refaire , quelques jours
de repos j moi , pendant ce tems, voulant
mettre à profit ma station , je pris le parti
de parcourir le voisinage, et de chercher
à connoître le pays, et sur-tout l’embouchure
delà Rivière-des-Eléphans, qui, selon
les renseignemens qu’on m’avoit donnés
, ne pouvoit être que peu éloignée de
mon nouveau camp. '
Klaas , quoiqu’il ressentit encore quelques
douleurs de sa chute, voulut absolument
m’accompagner. Je partis donc avec
lui et trois autres de mes gens, au nombre
desquels étoit un de ces Hottentots
que lui - même1 avoit mis à mon service ,
et qui fut chargé de ma canonnière, seul
équipage que je crus nécessaire d’empor-
porter avec moi. Mon intention étoit de
cotoyer le fleuve en suivant son cours ; et
je comptois abréger ainsi ma route, puisque
je courois moins le risque de m’égarer ;
mais les pluies des jours précédens avoient
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