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se rideau dè nuages que j ’avois à PeSt rd
flétoient encore ses feux dans leurs parties
supérieures : leur masse totale représentait
des montagnes de neige et leur cou*
ronnement etaloit une zone resplendissante
de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. Le
spectacle ne dura qu’un instant; mais, à une
distance de trente lieues vers le nord, les
montagnes du Piquet, plus hautes encore
que la Table, Conservèrent pendant quel
qUe tems la lumière sur leurs cimes ma*
jestueuses ; elles se détachoient sur le fond
pourpre et violâtre du ciel. On eût dit des
fanots destines à^eclairer l ’Afrique intérieure
pendant l ’obscurité de la nuit. Que
l ’homme est petit à cette hauteur, et que
ses passions sont misérables lorsqu’il se
compare à l’immensité.
Aux approches des ténèbres les vautours
avoient quitte la plaine et regagnoient les I
rochers. Les bavians se retiroientdans leurs j
repaires ; les petits oiseaux voltigeoient én-
Core autour de moi : épars sur les arbustes
et les buissons, ils cél ©broient par leurs
concerts la fin d*un si beau jour. Leur chant
mourût arec le crépuscule ; l’obscurité li-
E TÎ A E R I XJ È. A V f
la montagne aux oiseaux funèbres ; et
L o i, triste et penseur,' je rentrai dans ma
Canonnière qu’on avoit entourée d’un grand
f e u .pour en éloigner les animaux malfaisants
qui f'uyent la lumière. —
Je devois m’attendre à rencontrér sur.
la montagne- une sorte d’epiiemis plus dangereux
encore : c’étaient p ces esclaves mar.-
rons fugitifs de la maison domaniale, vivant
dans les rochers et profitant de la
nuit pour aller dérober dans lés habitations
voisines. J’avois à craindre que quelqu’un
de ces déserteurs ne se fût caché dans
mon voisinage, et qu’à la faveur des ténèbres
il ne tentât de me surprendre ou de
m’attaquer. Mes précautions étaient prises
d’avance ; j’étais trop bien armé pour
redouter un pareil1 combat, et la vigilance
de mes trois chiens, plus encore que mes
feux me. permit de reposer en sécurité toute
la nuit. ; . ;
La brume devint si humide que, quand
le jour parut, je me sentis, dans ma tente
, tout perclus de froid, malgré un très-
fort manteau, dans lequel je m’étois roulé
et envelpppé tout entier. Par l’état où je me