
& moins abfiraite, je vais l’appliquer à I
quelques exemples particuliers.
Exemple I. Pierre tient deux jettons
blancs, deux jettons noirs & deux jettons
rouges. I l parie que les ayant mêlés, &
tirant enfuite trois jettons au hafard entre
ces J ix , il en tirera un blanc, un noir & un
rouge.
R. Il faut remarquer que s’il n’y avoit
au jeu que deux jettons noirs & deux jet
tons blancs , il y auroit quatre manières
différentes de prendre dans ces quatre jet-
tons deux jettons de différentes couleurs;
car chacun des deux jettons blancs pour-
roit être pris avec chacun des deux jettons
noirs, ce qui fait quatre façons. Maintenant
fi à ces quatre jettons on en ajoute
deux autres rouges , il efl clair que les
quatre façons différentes que l’on vient de
trouver , pouvant fe rencontrer chacune
avec chacun des deux jettons rouges, le
produit qui exprime tous les coups que
Pierre a pour tirer trois jettons de différentes
couleurs entre ces fix , fera le cube
de deux, c’efl-à-dire qu’il faudra multiplier
le nombre qui exprime en combien
de façons différentes un jettori noir peut
être pris dans deux jettons noirs, & multiplier
ce produit par le nombre qui exprime
sn combien de façons un jetton
rougarpeut être pris différemment dans
deux jettons rouges; ce qu'ilfalloit démontrer.
Or , l’on trouvera par la table
rapportée ci-deffus, que fix chofes peuvent
fe prendre différemment trois à trois en
vingt façons, & par conféquent le fort
de Pierre fera exprimé par la fraétion f
ou y ; le fort de Paul fera donc exprimé
par la fraction j , & par conféquent le fort
de Pierre feroit au fort de Paul comme deux
efl à trois; ce q iiil falloit trouver.
Exemple II. Pierre tient cinquante-deux
jettons entre fes mains , favoir ; treize
blancs, treize noirs, treize rouges , &
treize bleus ; ou, ce qui revient au même,
un jeu entier compofé de cinquante - deux
caries. On demande en combien de façons
différentes il peut, tirant quatre cartes au
hafard dans ces cinquante-deux , en tirer
un carreau , un coeur , un pic & un trefle.
R. S’il n’y avoit que treize carreaux &
treize coeurs, il y auroit cent loixante-neuf
façons différentes de prendre dans ces
vingt-fix cartes deux cartes de ces deux
efpeces ; car chacun des treize carreaux
pourroit être pris avec l’as de coeur, ce
qui fait treize , ou avec le deux de coeur,
ce qui fait encore treize; & ainfi de fuite,
chacun des treize carreaux pourroit être
pris avec chacun des treize coeurs ; ce
qui fait 13 x 13, c’efl-à-dire cent foixante-
neuf façons de prendre un carreau & uü
coeur dans vingt-fix cartes.
Préfentement fi à ces treize carreaux 8c
à ces treize coeurs on ajoute treize trèfles,
il faudra, pour avoir toutes les façons
poffibles de prendre un carreau , un coeur
& un trèfle , dans ces trente-neuf cartes,
multiplier par treize les cent foixante-
neuf façons précdentes; car chacune de
ces cent foixante neuf façons différentes
pourra fe trouver avec l’as de trèfle ; ce
qui fait 1 3 x 1 3 x 1 , et avec les deux,
ce qui fait 13 x 13 x 2 , c’efl-à-dire trois
cents trente-huit façons différentes, 8c.
avec les trois, ce qui fait cinq cents fept
façons différentes; & ainfi fucceflivement
chacune des cent foixante-neuf façons
précédentes pourra fe trouver avec chacun
des treize trèfles ; ce qui fait 13 x J3 x 13,
c’efl-à-dire deux mille cent quatre-vingt-
dix-fept façons différentes de prendre un
carreau , un coeur & un trèfle dans cent
trente-neuf cartes.
On obfervera de même que la quatrième
puiffance de treize exprimera en combien
de façons différentes quatre cartes de différentes
efpècesfavoir ; un carreau, un
coeur , un pic & un trèfle peuvent être
prifes dans les cinquante-deux cartes ; ce
qti il fallait démontrer.
O r , l’on' trouvera par le problème précédent
cèdent & par la table que cinquante-deux
cartes peuvent être prifes quatre à quatre
en deux cents foixante dix mille fept cents
vingt-cinq façons ; & par conféquent le
fort de Pierre fera exprimé par cette fraction
- ^ H l - o 1 & le fort de Paul
par cette autre jffv r f J & Par conféquent
le fort de Pierre fera au fort de Paul : :
28561 : : 242164 à-peu-près : : 1 ; 8 , en-
forte qu’il aura de l’avantage à parier un
contre neuf, & du défavantage à parier
un contre huit.
p o y e pour les combinaifons & les
probabilités des. jeux de hafard, l'article
Arithmétique du Diétionnaire des amufe-
mens des fciences.
Combinaifons frauduleufes.
Il n’eft pas indifférent pour les joueurs
honnêtes 8c de bonne foi d’être avertis
des préparations frauduleufes que de prétendus
grecs , ou fripons , ont de tout
temps combinées entre eux pour faire dif-
paraître les hafards du jeu , & s’affurer
l’argent de ceux dont ils veulent faire leurs
dupes.
Les joueurs prudens favent fe précautionner
contre les coups du fort, ou du
moins en diminuer les atteintes ruineufes
en fe réglant fur les probabilités des évé-
nemens. C’efl même ce que les calculs &
les recherches de plufieurs célèbres mathématiciens,
telsquelesPafcal ,les Fermât,
les d’Alembert , les Montmor & autres,
pourront leur apprendre, en partie, dans
plufieurs articles de ce diétionnaire.
M ais nous avons auflî penfé que l’habileté
de certains joueurs peu fcrupuleux,
devenant funeflé pour l’homme confiant
qui s’abandonne témérairement à la fortune
, il n’y avoit d’autre moyen de le
garantir- des pièges fecrets qui lui font
tendus , que de manifefler les manoeuvres
ténébreufes de ces grecs perfides. C’efl
dans cette vue que nous avons cru devoir
raffembler fous l’article de combinaifons
Jeux mathématiques.
frauduleufes, les tours, les aftucca , les
tromperies, les diverfes inventions & les
difpofitions myftérieufes que nous »von*
pu découvrir dans quelques traités imprimés
, principalement dans un manufcrit
ancien & fingulier d’un joueur, fur le
danger de rifquer fa fortune contre des
inconnus ou des étrangers qui circulent
dans toutes les académies de jeux de l’Europe.
O r , voici plufieurs de ces tours dangereux
que nous avons recueillis.
Il y a des chambres difpofées d’une certaine
façon par l’artifice de ceux qui en
font le théâtre de leur tromperie ; enforte
■ que tout l’argent qu’on y joue efl un argent
. fur pour eux.
A quelques-uns de ces réduitsfe trouvent
de petites fentes cachées dans la muraille,
| par lefquelles un efpion qui efl fecrette-
ment placé derrière voit toutes les cartes
de celui qu’on veut duper, & en tirant
une petite corde qui fait remuer un long
reffort ajusté par deffous la table fur lequel
le trompeur a le pied appuyé ; félon qu ’il la
tireune, deux, trois & quatrefois, & de la
manière dontilaété convenu entre eux , il
lui fait comprendre aifément les coeurs, les
carreaux, les trèfles & les piques que l’autre
a dans fa main. Celas’appellé le jeu i l orgues.
On le diverfifîe de plufieurs manières ,
tantôt faifant cacher l’aide-trompeur dans
une armoire faite exprès , tantôt fur le
plafond d’un entrefol , quelquefois lui
mettant une lunette d’approche à la main ,
ou enfin le.poffant fi bien qu’il puiffe découvrir
facilement, par l’optique & les
miroirs placés à cet effet, tout ce qu’a la
dupe, pour l’apprendre, par l’invention
que nous avons marquée, ou quelqu’autre
femblable , au compagnon qu’il attrape.
Tous lieux font propres à qui cherche
à tromper. Par-tout un miroir efl aifé à
mettre derrière la tête de celui qu’on veut
prendre au trébuchet ; & même s’il efl
i allez Ample pour laiffer voir fon jeu à