
& furtout point de pois ni d’haricots, ni ni ente
de fécule de pomme de terre.
Madame DE LA Haute-Futaie.
ïi fait le jeu fûrsment. Allons, continuez.
M. de la Rivière.
Les fruits feront permis à la malade ; elle
pourra manger des prunes , des péchés, des
cerifes, du raifin ; mais elle ne mangera ni
poires ni pommes , ni abricots , ni grofeilles.
Le foir , on donnera à manger à Mademoifeile
des légumes toujours chauds , mais jamais
froids. Par exemple, des afperges, des arti-
chauds , des épinards, des navets, mais ni
carottes , ni choux-fleurs : néanmoins, la malade
pou ra manger une petite falade de petite
laitue feulement ; point de laitue pommee,
point de chicon, ni decrefion, ni de chicorée.
On aflaifonnera cette falade avec du cerfeuil Si
de la pimprenelie ; on évitera d’y mé tré de
l’cftfagcn. Les plantes favonneufes ne valent
rien ; Si furtout point de creffon à la noix dans
la fourniture. Avec l’huile, on mettra du vinaigre
naturel ; point de vinaigre à l’eftragon,
ni de vinaigre rofat. Pour fon deffert, la malade
trempera un petit bifcuit dans du vin de
Malaxa ; le vin de Rota ne lui vaudrait rien.
- Xe Chevalier Z É p HI R.
Ah S je vois à préfent ; je n’ai pas voulu interrompre
votre confu'tation, M. le doéteur ;
mais je vois bien qu’il ne faut rien donner où la
lettre O le trouve.
M. d e s J a r d i n s .
J ’aurois donc bien fait de donner des lapins,
des perdrix & des bécalfes à Madame Dubois.
Madame de la Rivière.
Sûrement. Mais quand on fait le jeu, on
évite de donner ces fortes de mets- là, parce
ue ça découvre trop vite le jeu. On prend
es chofes qui n’aient ni O ni os.
Mademoifeile de la Haute-Futaie.
Ce jeu-là eft allez plailànt.
L’Abbé des Agneaux.
Nous ne fommes pas au bout. Le jeu que
nous jouons s’appelle le jeu des oing voyelles ;
nous venons de fa're l’O , voyons fes quatre
foeurs. Je voudrais bien favoir, Madame de la
Rivière , fi vous aimez les ânes ! _Répondez-
moi fans A.
M. DE-LA F ORÊT.
Oh ! ceci eft difficile. '
Madame de la Rivière.
Po nt du tout. Or donc je réponds. C ’eft
tout fimple; cette bête ne m’eft point odieufe:
elle’eft iüfet utile, Si fobre,furtout ; [ oint de
difficultés qui puiilent rebuter fon zele. Qu’en
penf“z-vous ; Répondez-moi fans E , vous qui
voulez fi bien me furprendre.
L’Abbé des Agneaux.
On a raifon quand on craint vos difcours...
L’Abbe P R l NT K M s.
C ’eft bien dit ; car on ne fait comment y
répondre fans E , n’efl ce pas, Tabbé ! K
L’Abbé des A G N. ï à u X-.
Que diablel tu m’as interrompu s j'allois
parler pendant un quart d’heure fàus E.
M. de la Rivière.
Je crois que ce feroit un peu difficile, pour
ne pas dire impoffible. L’E eft trop répété dans
ia langue françcèfe, pour pouvoir vaincre une
telle difficulté , fans déraifonner , Si en dilànt
des chofes fpirituelies , ou au moins qui fe
fuivent ; car on ne peut pas dire oui Si non.
Madame de la Rit.iè b i,
M. de la Rivière, aimes-tu les artichailx ?
Réponds-moi fans A.
M. de la Rivière.
De tous les légumes, c’eft le meilleur, feloa
moi.
L’abbé P r i n t e m s .
C ’eft fort bien répondu. Madame de la
Haure Futaie, aimez-vous à jouer. Répondez-
moi ,, s’il vous plaît, fans O. -
Madame d é l a H a u t é - F u t a i É.
S’il me plaît; Ceft bien dit. Si je puis ,pafle.
Le jeu me plaît afl’ez, principalement les petits
jeux à gages.
L’ahbé P r i n t e m s .
ChevaUer , qu’eft ce que l’amour ? Répon-
dez-moi fans O. .
Le Chevalier Z É p H I R.
C ’eft un dieu très-capricieux & très-aimable.
Il eft jeune, exifte cependant depuis bien des
années. Mais, l’abbé , ditesfans Ü à ces Dames
quelle eft l’étendue de l’empire de ce dieu.
L’abbé P r i n t e m s .
Il règne fur l’homme & fur tout ce qui ref-
pire en ce yafte Univers. J
Mademoifeile du Ruisseau.
Vous ne payerez qrfe quatre gages.
L’abbé P r i h t i ms.
C ’eft bien malheureux d’être puni pour avoir
dit la vérité.
Mademoifeile R o s e .
- Il fâlloit la dire fans U. Pour faire oublier
votre faute, dites fans I fi vous aimez ia compagnie.
L’abbé Printems.
L’abbé , réponds pour moi ; c’eft égal.
L’Abbé des Agneaux.
Aimer fans I , ce feroit bien amer.
Madame d e l a R i v i è r e .
Mais vous ne répondez pas, avec vos calembours
en vers. Ne favez - vous pas que nous
fommes convenus qu’on payeroit 1 amende
quand on feroit des calembours.
Madame dé la Haute-Futaie.
Ce maudit talent amufe un peu, mais il
ennuie bien. Pour faire un bon calembour,
on en fait cent mauvais. Tout le monde n’a
pas l’efprit de M. de Bievre, & c’eft fort infipide.
L’Abbé des Agneaux.
On fonne, Mefdames, allons fouper. Nous
mangerons tout ce que nous pourrons. Vous
êtes charmantes; chacun eft enchanté devons :
tout le monde le penfe , Si vous adore. Ma:s
dire fans I qu’ on vous aime, c’eft impoffible.
( Extrait des Soirées amufantes*)
Fin des Jeux.