
L’Abbé des Agneaux.
On aura chacun dans fa poche, une douzaine
.ou environ de ces demi-cartes, où l’on aura
écrit fon nom, & on le fera paffer à fa droite,
pour qu’elle faffe le tour, & que chacun la
puifTe contrôler, avant de la mettre dans l’étui.
Madame de la H aute-Fut aie.
Ce fera comme à la loterie royale.
L’Abbé des Agneaux.
Auffi, Madame, ai-je fait une roue en
verre pour recevoir les petits étuis. Avant de
les tirer, on les remuera bien.
Mademoifelle R os e .
Mon pauvre Chevalier, il vous faudra un
jeu de cartes entier.
Madame de la Rivière.
Nous pourrons dire à Madame Dubois que
nous avons joué aux cartes.... coupées.
Mademoifelle de la Haute-Futaie.
L’Abbé, vous avez des inventions charmantes.
Allons, voyons donc la clefdu jardin.
L’Abbé des Agneaux.
Je connois ce jeu-là; mais c’eft M. de la
Rivière qui s’eft engagé de vous le faire jouer.
Je ne veux pas lui ôter çet honneur. Dans un
moment, vous en faurez autant que nous.
M. de la Rivière.
Il fuffit de répéter tour-à tour ce que je vais
vous dire : Je vous vends la clef du jardin.
Tout le monde répète, Tan après l’autre.
Mademoifelle. ,de la Haute-Futaie.
Eh ! mais c’eft bien aifé.
L’Abbé des Agneaux.
Patience, donc ; ça ne le fera pas toujours.
M. de la R i v i è r e .
Je vous vends la corde qui tient à la clef
du jardin.
Tout le monde• répète de mime.
Mademoifelle du B oc a g e .
Il n’y a rien de fi /impie que ce jeu-là.
M. de la Rivière.
Je vous vends le rat qui a rongé la corde
qui tient à la clef du jardin.
Tout le monde répète de mime.
Le Chevalier Zéfhir,
Je parie que je ne donnerai pas de gage.
M. de u Rivière.
Je vous vends le chat qui a mangé le rat
qui a rongé la-corde qui tient à la clef du jardin.
Le Chevalier Z i fhir.
Je vous vends le-chat qui a mangé la clef
du jardin.
L’Abbé des A g n e a u x .
Bon ! Chevalier, deux gages ; vous avea
paffé le rat & la corde.
Mademoifelle du Ruisseau.
Vous étrenneréz les petits étuis, Chevalier,
& la roue de fortune.
Madenioifelle du Bocage.
Il faudroit appeler cette roue - là , roue
d’étourderie.
M. de la Forêt.
C’eft affez bien trouvé. Allons, M. de la
Rivière, parlez, on vous écoute.
Madame de la H aute-Fut aie.
Ou du moins on doit vous écouter; ma
fille, taifez-vous donc.
M. de la Rivière.
M. de la Rivière.
Je vous vends le chien qui.a mangé le chat
qui a mangé le rat qui a rongé la corde qui
tient à la clef du jardin.
Mademoifelle de* la Haute - Futaie.
{à fon tour. }
Je vous vends le chien qui.a mangé le rat
qui a mangé le chat*....
Madame de la Rivière.
Un-gage, Mademoilëüe ; vOtis n'y penfez
pas. Depuis quend les rats mangent-ifs les
chats - 'ij>. '
Mademoifelle de la Ha’utë-'Futaie.
Ah ! c’eft que je me fuis trompée. Je vais
recommencer.
L’Abbé des .Agneaux.
Non, non, non : ça n’eft pas permis. Il faut
payer un gage. Allons, donnez vite à Made-
moifelle un petit étui, qu’elle mette fa carte
dedans.
M. de la Rivière.
Je vous vends le bâton qui a tué le chien
qui a mangé le chat qui a mangé le rat qui
a rongé la corde qui tient à ia clef du jardin.
L’Abbé Printems, (àfon tour.)
Je vous vends le bâton qui a tué le chat
qui a mangé le chien....
Mademoifelle de la Haute-Futaie.
Un gage, l’Abbé.
L’Abbé Printems.
Et pourquçi donc ? Si un rat peut manger
Un chat ; un chat peut bien manger un chien.
Au refte, je vais donner mon billet.
Madame DE LA Ri.VIÈre.
Vous l’avez fait exprès, l’Abbé , pour vous
moquer de Maiemoifelie de la Haute-Futaie.
Jeux familiers.
M. DELA R i v i è r e , doucement.
■ Je vous Vends le feu. qui a brûlé le bâton
qui a tué le chien qui a mangé le chat qui a
maigé-h rat qui a rongé la corde qui tient à
la clef du jardin,
Maclèmoilelle R o s Ê.
Vous voyez bien , Chevalier, quand vous
allez doucement, Vous ne vous trompez pas.
Lè Chevalier Z É î> H I R.
C ’eft vrai ;. mais il faut bien de la patience.
M. de l a R i v i è r e .
Je'vous vends i’eau qui a éteint le feu qui
a brûlé le bâton quia tué le chien qui amangé
le chat qui a mangé le rat qui a rongé ia corde
qui tient à la clef du jardin. -
Mademoifelle R o s e .
A vous donc, Chevalier.
Le Chevalier ZÉPHIR, vite.
Je vous vends l’eau qui a brûlé le chien qui
a mangé le jardin.
L’Abbé d e s A g n e a u x .
Parbleu! vous avez raifon, Chevalier; c’eft
bien plutôt fait. Vous ne devez que fept gages
de ce coup-là.
Le Chevalier Z É p h i r.
Eh bien! je les paierai.
Mademoifelle R O S E.
Quand je vous ai dit qu’il vous faudroit un
jeu de cartes tout entier,
M. de l a R i v i è r e .
Je vous vends le fceau qui a apporté i’eàu
qui a éteint le feu qui a bruîé le batbn qui a
tué le chien qui a mangé le chat qui a mangé
le rat qui a rongé la corde qui tient à la clef
! du jardin.
F