
d’attrape, vous auriez clone bien ri, fi vous
m’aviez vu jouer, pour la première lois , au jeu
dès AinbaffàdiuH ; c’eft par ce jeu que j’ai fait
mon entrée chez mes tantes : j’ai fort bien pris
la p'a'fànterie, quoique fort mécontent ; & je
me fuis fait pa -là uns grande réputation. On
tira la royauté au for t, & le fo t me la donna ,
ci accord, à la vérité, avec la fupercherie; je
lai fit depuis : ébloui de ma nouvelle dign’té ,
je ne vis pas les dangers où elle m’expofoit. On
nie fit entrer dans un appa tement, entre deux
rangs de fauteuils, où étoient allis mes fujets,
qui fie levèrent relpeéfcueufement pour me rendre
les hommages qui m’étoient dus. Au fond
d’une a'cove dont on avoit ôté le lit , éto t
dreffé mon trône, élevé deplulieurs degrés,
fc couve t d’un beau baldaquin, dont les rideaux
étoientretroulfés avec grace.Onmépiaca
lur mon trône, & en même tems a mes cotes,
en ht affeoir mes deux premiers miüiftres, qui
dévoient guider ma jeunell’e. Mais hélas ! c’éro t
eux qui dévoient me précipiter dans le piège
qu’on me tendoit. Mon t-ône ne me paroiiïbit
pas bien folide, mais je n’ofois m’en plaindre.
Quelques uns de mes fujets me prtfentèrent
oes placets que je remis à mes m ni fines , pouf
m aider de leurs avis. Dans l’infiant ; la porte
s’ouvrit, & je vis entrer deux ambafiadaurs,
vêtus de la manière la plus grotefque , ayant fur
leur rête de grands bonnets de poil fort haut
Ils marchoient d’un air fort raide-, mais j’attri-
bi:o s ce: te gravité au refpect qu’ils me ror-
to'ent. On me dit tout bas que je ne devois
po nt me lever pendant leur harangue , Je je
m en gardai bien. Arrivai au pied de mon trône,
fi s ambafladeurs s’inclinèrent pour me faluer.
& je vis , dans leurs bonnets qui éto:ent faits
avec des mandions , des pots-ù-l’eau qui le
vidoient fur m oi, tandis que mes deux m’nif-
tres fe levant, montrône fit la bafcule, & je
m: trouvai non entre deux filles le cul par
terre, mais enfedeux planches le cul dans l’eau
dans un baquet. Tout le monde partit d’un
grand éclat de rire, & je ne me fichai pas,
parce qu'il faifoit fort chaud; d’ailleurs, on me
fit pafier auîTïtôt dans llappartement voifin, où
je changeai d’habilLmsns depuis les pieds
juf-u’à h tête.
Mes tan:es membra fièrent avec am:tié ;
elles me firent prendre un petit verre de liqueur
; & depuis- ce tems, elles m’appellent
leur petit toi.
MademoifeUe R O S E.
Que j’attrois été contente de voir la royauté
fi près dans ma famille.
M. d u F r ê n e .
Je m’en doute bien ; vous avez bon coeur.
L ’Abbé d e s A g n e a u x .
A propos de loyauté , nous devrions jouer
à un jeu qu’onj nomme quelquefois, mal-à-
propos , le Roi dépouillé ; fon vrai nom
eft i’EJclave “dépouillé. On eboifit un roi
qui fe place fur un trône ; mais il n’y a
pas là d’attrape : à fes pieds eft fon efclave; le
roi dit à une peifonne de la compagnie : ap-
P ochez-vous de mon efclave ; il ne faut pas
s’approcher, mais dire : olirai-je 3 quand le roi
a dit : o ftz , on approche, & on dit s j’ai fait,
Sire ; que ferai-je ! Alors, le roi dit : ôcez-lui
fes boucles , ou fes fouliers , ou fon habit, &c.
Il ne faut point faire tout de fuite ce que le roi
commande ; mais dire avant : o'evai-je ? &
quand on a fait, dire , j’ai fait, Sire, que ferai
je’ Alors, le roi vous donne un autre commandement,
ou il vous renvoie. Allez fouvent
quand le roi dit : retournez à votre place; on
y va précipitamment, & on paye un gage,
parce qu’il faut toujours dire : oferai-je 3 Après
quoi le roi appelle d'autres'perfbnnes pour dépouiller
fon efclave. Si on manquoità dire:
5 oferai-je 3 ou bien j’ai fait, que ferai—jè ? on
, paye un gage, & on reprend la place de l’et-
s clave.
MademoifeUe d u R u i s s e a u .
Mais fi on ne manquoit jamais, l'elclave 1«
ttouveioit entièrement dépouillé.
L’Abbé d e s A g n e a u x .
C’eft fort rare, parce qu’on fait dépouiller
l’efclave très-lentement. Les boucles des.four
liers , celles des jarretières , les boutons de
manches; le tout l’un apres l’autre. Vous voyez
qu’il faut dire bien des fois, oferai-je 3 j’ai fait,
que ferai-je 3
L’Abbé P R I N T e M s.
Il eft trop tard pour jouer à l’Esclave dépouillé
, car on va bientôt louper.
Mademoifèlle d û G a % O N.
Oh bien ! nous y jouerons demain.
M. du F r ê n e -
Je ne pourrai pas y jouer, car vous favez
bien que je pars demain matin.
MademoifeUe d u B o c a g e .
Oh ! mon Dieu , c’eft bien promptement !
MademoifeUe R o S E.
Nous ne tarderons pas, mon cher coufin , à
vous rejoindre bientôt à Paris, car nous partons
tous après demain. M. IL... a reçu des
lettres ces jours derniers, il faut qu’il quitte
incefiamment fa campagne , pour des affaires
qui l’appellent à Paris.
L ’Abbé d e s A g n e a u x .
Il faut efpérer que nous pourrons nous réunir
encore ici i’année prochaine, car M. B..,. eft
eonftant dans fes amitiés, & ’ il fera bien aife
de revoir fes amis , qui le reverront toujours
avec un plaifir nouveau.
Le- Chevalier Z É P HI r.
Moi, je partirai (e plus tard que je pourrai.
MademoifeUe R O S E.
Nous partirons après demain.
Le Chevalier Z É P H I R.
En ce cas-là., & moi auffi, je ve.ix joindra
le chagrin de quitter un endroit fi charmant,
à la douleur de vous quitter..
MademoifeUe R o s e .
C ’eft bien dit ; mais on fonne, allons fouper.
( Extrait des Soirées amufantes. )
A T T R A P E . ( jeu d’ )
Voyej à l’article V olière.
i I
A V E U G L E S . (jeu des )
Préferne aux mondains aveuglés par 1rs
péchés; par Hamel, ci-devant curé duivlcüy.
— Jeu myflique.
Voici comme s’exprime le curé pour annoncer
ce jeu. O ! amas mondaines qui cherchez1
à palier agrésbiernenc votre tems ; voici
qre je vous préfente un jeu qui tout enfemble
pourra vous divertir convertir, fi vous aimez
autant votre ame que votre corps ; car Dieu
qui fit baptifer férieu1 enflent le comédien
Geneft, lorfqu’il ne fongeoit qu'à jouer fur (on
théâtre le baptême des Chrétiens, pourrait bien
auffi vous ouvrir les yeux à la grâce, en vous
faifant voir dans ce jeu les différentes fources
de l’aveuîrlernenc des hommes, & les moyens
pour en foitlr.
Ce jeu eft clifpofé comme celui de l’oie,
excepté que les rencontres en font différente!. ;
vous trouverez d’abord ie démon & le moiiuâ
qui crevent les yeux à tous les pécheurs par
leurs propres péchés , ôt vous verrez ces difié*
rens aveugles difpofes de 7 en 7 nombres , entrelaças
des diffétens moyens propres pour
recouvrer la vue , dont le plus grand & le plus
i’ouverain eft le lavoir de Siloé qui eft la fin du
jeu; parce que ce lavoir lignifiant envoyé,
comme dit Saint Jean Evangélifte, il repréLnte
J. C . , qui a été envoyé pour éclairer tout
homme qui vient en ce monde, ainfi que par
les eaux de ce lavoir, il rendit la vue à l’aveugle-
né , figure de tout le genre humain , aveuglé
dès fa naiffance par le péché de notre premier
père, comme dit S. Auguftin.yrrafo: 44 , sur
S. Jean.
Règles du jeu & ce quil faudra faire aux différentes
rencontres.
Qui arrivera au nombre 3 où eft le démon
qui creve l’oeil droit de la foi aux hommes,
payera le jeu pour en. être délivré,. & ira au
nombre 1 ; fe faire guérir par Ananias, ocuüfte
: fpirituel qui éclaira S. Paul, duquel il eft dit
qu’ayant les yeux ouverts, il ne voyoit goutte;
pour montrer qu’il 11’avoit que l’oeil de la foi
offenfé, & non pas celui de la raifon ; & continuera
fon jeu.
Qui ira au nombre 5 où eft le monde qui
, crève aux hommes & l’oeil droit de la foi i.< le
B %