II ne trouva dans ces têtes, dont il avoit fait une étude assez légère,
que les bords des narines postérieures qui lui parussent avoir quelque
rapport de forme avec la portion osseuse qu’il leur comparoit ; il crut
même reconnoître dans cette dernière la suture qui sépare l’eth-
moïde de la partie antérieure de l’aile du sphénoïde , et ayant établi
ses calculs sur ces données, il en conclut que la pièce fossile devoit
provenir d’un cachalot de cent pieds de longueur (1).
Comme il n’a point développé ses raisonnemens, ni marqué les
points du fossile qu’il jugeoit correspondre à des points déterminés
dans les squelettes, il est difficile de reconnoître les causes de son
erreur; ce qui est certain, c’est que ni le grand cachalot ni le globi-
ceps n’offrent d’analogie réelle avec le morceau en question.
Nous possédons aujourd’hui des objets de comparaison plus nombreux
en squelettes de cétacés vivans , et l’os fossile lui-même
ayant passé dans le cabinet de Teyler à Harlem, le savant M. van
M a n on , directeur de ce cabinet, a bien voulu m’en envoyer un
dessin, qui, joint à celui de Lamanon, a suffi pour m’indiquer avec
toute probabilité l’endroit de la tête dont l’os provient et le genre
de cétacé qui l’a fourni.
Il est nécessaire d’abord de le considérer dans un sens opposé à
celui où la figure de Lamanon est faite , et de la renverser comme
je l’ai fait dans celle que je donne pl. X X V I I , fig. 16.
On reconnoît alors promptement dans sa partie principale, À , B,
C , une portion considérable de l’os temporal droit d’une baleine
proprement dite, vu par sa face antérieure, et dans l’autre partie,
D , E , une portion du pariétal. En a est la face articulaire qui donne
appui à la tête de la mâchoire inférieure. La proéminence, B, est
l ’apophyse zygomatique. Le bord interne, b , est fort semblable à
celui de la baleine, et l’on voit, en f , le commencement fracturé
d’une arête qui se trouve aussi à cette place dans la baleine, et qui s’avance
pour servir à l’articulation avec le ptérygoïdien. Le bord externe
est plus ou moins fracturé, de g en h. Quant à la suture, D Ts. m,
pour l’articulation avec le pariétal elle est parfaitement comme dans
le squelette.
L ’os pariétal est cassé dans la partie par où il se joignoit au reste
du crâne, mais on voit enp une portion de sa face interne.
Malgré les rapports de forme de ce temporal avec celui de la baleine
du Cap, ce dernier est beaucoup plus large à proportion de sa
hauteur.
Le fragment fossile avoit en diagonale, de B en S , quatre pieds
trois pouces ( 1,38) , mais depuis le milieu de son bord inférieur, il
n’y avoit, en ligne verticale jusqu’enƒ , point le plus bas de la suture
avec le pariétal, que deux pieds trois pouces (0,78). La largeur de
son bord inférieur, B C , étoit de deux pieds (0,64).
Dans notre grande baleine du Cap, ces deux dernières dimensions
sont au contraire de 0,64 et de 0,81. Ainsi la largeur y surpasse une
ligne correspondante de hauteur, ce qui est l’inverse du fossile.
Dans la baleine du Groenland, autant que j’en puis juger par mes
figures, la même partie a en hauteur o,83 et en largeur 0,72, proportions
très-peu différentes de celles du fossile, car il ne s’en faut que
de deux centimètres en largeur qu’elles ne soient semblables.
Or la tête de baleine du Groenland où j’ai pris ces mesures étoit
longue de dix-huit pieds ( 5,84).
Celle dont provenoit le morceau fossile devoit être à celle-là
à peu près comme 73 à 83 ou comme 64 à 72. Loin d’avoir cent pieds
de long, comme Daubenton l’avoit conjecturé, sa taille n’étoit donc
pas des plus grandes. Elle devoit avoir au plus la tête de 5,17, et sa
longueur totale ne pouvoit guère surpasser 17,4 ou 17,5, c’est-à-dire
cinquante-trois ou cinquante-quatre pieds, sans compter cependant
la nageoire caudale ni l’épaisseur des lèvres, qui pouvoient la porter
à soixante pieds environ.
D’après ces rapports de grandeur, on pourroit être tenté de croire
que ces pièces osseuses trouvées à Paris étoient simplement des
fragmens de baleine franche, et même qu’elles auraient été autrefois
apportées par les hommes; mais indépendamment de l’état du sol
où elles furent déterrées, je ne les trouve pas aussi semblables à la
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