S E C T IO N IL
O S S E M E N S F O S S I Z E S D E L A M A N T I N S , '
L e lamantin se rapproche souvent des animaux qui vivent dans
l’eau douce et sur ses bords , puisqu’il ne fréquente guère que les
côtes, et qu’il remonte assez avant dans les rivières et dans les lacs;
il n’y auroit donc rien d’étonnant à ce que l’on déterrât de ces os dans
les mêmes couches que ceux des quadrupèdes terrestres, comme on
y déterre ceux des crocodiles et des trionyx; mais en fait il n’en est
pas ainsi, et il paroît qu’on n’en a trouvé encore que dans des couches
marines.
J’én dois la première connoissanee à M. Renou, savant professeur
d’histoire naturelle à Angers, qui m’a communiqué,en même temps
un fragment d’une carte minéralogique qu’il a dessinée du département
de Maine-et-Loire, où il représente les lieux qui lui ont offert
ces ossemens. ,. ■ .
II paroît, d’après eette carte, que la partie de ce département
situee au sud de la Loire et aux deux côtés de la petite rivière du
L a y on , présente plusieurs plateaux d’un calcaire coquillier grossier,
assez semblable à celui des environs de Paris, et tantôt assez compacte
pour former de belles pierres de taille, tantôt composé de petits
fragmens de toute sorte de corps marins assez durs, quoique grossièrement
agglutinés, pouvant servir alors de véritable falun.
On distingue dans ces pierres des débris de peignes, de cardiums,
des retepores, des millepores, des grains de quartz roulés, mais rien
d’absolument entier; en un mot, elles ont tout l’air d’un dépôt formé
par les courans, ou par le flux dans quelque anse moins agitée que
le reste de cette partie de la mer, mais non par la précipitation tranquille
d’une mer où les animaux que cette précipation auroit enveloppés
auroient vécu et seroient morts paisiblement.
C’est en cela que les échantillons que j’ai vus de ces carrières m’ont
paru différer le plus de nos pierres des environs de Paris. Quant aux
espèces des coquilles, je n’en ai point vu d’assez entières pour en
hasarder la détermination.
Des veines de charbon de terre se dirigent sous ce sol calcaire du
sud-est au nord-ouest, avec une inclinaison de 75 degrés à l'horizon,
et dans une profondeur connue de six cents pieds au moins.
Les intervalles des plateaux calcaires sont remplis d’une terre argileuse
, dont on fait des briques et des tuiles.
C’est dans les couches de calcaire coquillier des deux côtés du
Layon, et surtout près de Doué, de Chavagne, de Faveraye, d’Au-
bigné et de Gonor, que se sont rencontrés des os, mais toujours
isolés et en petit nombre.
M. Renou ayant eu la complaisance d’envoyer à notre Muséum
plusieurs de ces. os encore.eapartie incrustés dans leur gangue, j’ai
reconnu qu’ils appartenoient tous à des animaux marins’; savoir, à
des phoques, à des lamantins et à des cétacés. La plupart étoient
mutilés, quelques-uns même un peu roulés ; ils paroissont donc avoir
appartenu à la mêmemer que les coquilles dont l’amas les enveloppe,
et avoir subi la même action quelles.
Les os longs, toujours plus ou moins fistuleux dans les quadrupèdes
ordinairés, sont ici pleins et solides comme dans tous les mammifères
et reptiles aquatiques.
On y voit seulement quelques pores qui attestent que ce sont de
vraies pétrifications, et non pas’ des moules remplis après coup de
matière pierreuse.
Leur substance est changée toute entière en un calcaire ferrugineux
assez dur, d’unbrun- roussâtre. Leur surface seule est du même blanc
jaunâtre que la gangue qui les enveloppe.
L a partie supérieure du crâne, pl. X IX, fig. 22 et 23, ne peut avoir
son type que dans la famille des lamantins. Les deux longues lignes,
a , b , qui limitent les fosses temporales en dessus ; l’écartement des
branches antérieures des frontaux, b , b , pour laisser l’intervalle nécessaire
à la grande ouverture des narines, la petitesse des os du nez,
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