jour sur l'engourdissement que les poissons peuvent
éprouver pendant le froid , et dont nous avons parlé
dans notre premier Discours. Ce général nous apprend |
dans une note manuscrite qu’il a bien voulu me
remettre , qu’il a vérifié avec soin- les faits qu’elle contient
, le -long des côtes du Groenland, dans la baie
d’Hudson , auprès des rivages de Terre-Neuve, à l’époque
où les mers commencent à y être navigables ,
c’est-à-dire, vers le tiers du printemps. On voit dans
ces contrées boréales, nous écrit le vice-amiral Plé-
ville , des enfoncemeus de la mer dans les terres *
nommés barachouas, et tellement coupés par de petites
pointes qui se croisent, que , dans tous les temps , les
eaux j:sont aussi calmes que dans le plus petit bassin.
La -profondeur de ces asjles diminue à raison de la
proximité du rivage, et le fond -en est généralement
de vase molle et de plantes marines. C’est dans ce fond
vaseux que les maquereaux cherchent à se cacher pendant
l’hiver , et qu’ils enfoncent leur tête et la partie
antérieure de lerfr corps jusqu’à la longueur d url
décimètre ou environ , tenant leurs queues élevées
verticalement au-dessus du limon. On en trouve des
milliers enterrés ainsi à demi dans chaque barachouai
hérissant, pour ainsi dire , de leurs queues redressées
le fond de ces bassins , au point que des marins les
appereevant pour la première fois auprès de la côte,
ont craint d’approcher du rivage dans leur chaloupe,
de peur de la briser contre une sorte particulière de
banc ou d’écueil. Le citoyen Pléville ne doute pas que
la surface des eaux de ces barachouas ne soit gelée
pendant l’hiver, et que l’épaisseur de cette croûte de
glace, ainsi que celle de la couche de neige qui s’amoncelle
au-dessus , ne tempèrent beaucoup les effets de la
rigueur de la saison sur les maquereaux enfouis à
demi au-dessous de cette double couverture , et ne
contribuent à conserver la vie de ces animaux. Ce n’est
que vers messidor que ces poissons reprennent une
partie de leur activité , sortent de leurs trous , s’élancent
dans les flots , et parcourent les grands rivages. Il
semble même que la stupeur ou l’engourdissement dans
lequel ils doivent avoir été plongés pendant les très-
grands froids , ne se dissipe que par degrés : leurs
sens paroissent très - affaiblis pendant une vingtaine
de jours; leur vue est alors si débile, qu’on les croit
aveugles , et qu’on les prend facilement au filet. Après
ce temps de foiblesse , ou est souvent forcé de renoncer
à cette dernière manière de les pêcher ; les maquereaux
recouvrant entièrement l’usage de leurs yeux,
ne peuvent plus en quelque sorte être pris qu’à l’hameçon
: mais comme ils sont-encore très-maigres , et qu’ils
se ressentent beaucoup de la longue diète qu’ils ont
éprouvée , ris sont très-avides d’appâts, et on en fait
une pêche très-abondante.
C’est à peu près à la même époque qu’on recherche
ces poissons sur un grand nombre de côtes plus ou
moins tempérées de l’Europe occidentale. Ceux qui
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