Une philosophie plus calme et plus touchante suspen-
droit cependant son essor poétique. Un présent bien
plus précieux, diroit-elle à son coeur, a été fait par la
bienfaisante'Nature à ces animaux dont la splendeur
et l’élégance plaisent à vos jeux. Ils ont plus que de
l'éclat, ils ont le repos; l’homme du moins ne leur
déclare presque jamais la guerre; et si leur asjle, où
ils ont si peu souvent à craindre les filets ou les lignes
des pêcheurs, est quelquefois troublé par la tempête,
ils peuvent facilement échapper à l’agitation des vagues,
et aller chercher dans d’autres plages, des eaux plus
tranquilles et un séjour plus paisible. Tous les climats
peuvent en effet leur convenir. Il n’est aucune partie
du globe où on ne trouve une ou plusieurs espèces de
labres; iis vivent dans les eaux douces des rivières du
Nord, et dans les fleuves voisins de l’équateur et des tropiques.
On les rencontre auprès des glaces amoncelées’
de la Norvège ou du Groenland, et auprès des rivages
brulans de Surinam ou des Indes orientales; dans la
haute mer, et à une petite distance des embouchures
des rivières; non loin de la Caroline, et dans les eaux
qui baignent la Chine et le Japon; dans le grand Océan,
et dans les mers intérieures , la Méditerranée ,, le
golfe de Sjrie, l’Adriatique, la Propontide, le Pont-
Euxin, l’Àrabique; dans la mer si souvent courroucée
d’Écosse, et dans celle que les ouragans soulèvent
contre les promontoires austraux de l’Asie et de
l'Afrique.,
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De cette dissémination de ces animaux sur le globe,
de cette diversité de leurs séjours., de cette analogie de
tant de climats différens avec leur bien-être, il résulte
une vérité très-importante pour le naturaliste, et que
nous avons déjà plusieurs fois indiquée : c’est que les
oppositions d’un climat à ùn autre sont presque.nulles
pour les habitans des eaux; que l’influence de l’atmosphère
s’arrête, pour ainsi dire, à la surface des mers;
qu’à une très-petite distance de cette même surface
et des rivages qui contiennent les ondes, l’intérieur
de l’océan présente à peu près dans toutes les saisons
et sous tons les degrés d’élévation du pôle, une température
presque uniforme, dans laquelle les poissons
plongent à volonté et vont chercher, toutes les fois
qu’ils le désirent, ce qu’on pourroit appeler leur printemps
éternel; qu’ils peuvent, dans cet abri plus ou
moins écarté et séparé de l’inconstante atmosphère,
braver et les ardeurs du soleil des tropiques, et le froid
rigoureux qui règne autour des montagnes congelées
et entassées sur les océans polaires; qu’il est possible
que les animaux marins aient des retraites tempérées
au-dessous même de ces amas énormes de monts de
glace flottans ou immobiles; et que les grandes diversités
que les mers et les fleuves présentent relativement
aux besoins des poissons, consistent principalement
dans le défaut ou l’abondance d’une nourriture nécessaire,
dans la convenance du fond , et dans les qualités
de l’eau salée ou douce, trouble ou limpide, pesante