Le second moyen convient à tous les temps, à touS
les lieux, à tous les hommes. Il ne demande que peu
de précautions, que peu d’efforts, que peu d’instans,
que peu de dépenses. Il ne commande aucune absence
du séjour que l’on affectionne, aucune interruption
de ses habitudes, aucune suspension de ses affaires ;
il se montre avec l’apparence d’un amusement varié,
d’une distraction agréable, d’un jeu plutôt que d’un
travail; et cette apparence n’est pas trompeuse. Il doit
plaire à tous les âges; il ne peut être étranger à aucune
condition. Il se compose des soins par lesquels on par vient
aisément à transporter dans les eaux que l’on veut
rendre fertiles, les poissons que nos goûts ou nos
besoins réclament, à les y acclimater, a les y conserver,
à les y multiplier, à les y améliorer.
Nous traiterons des grandes pêches dans un discours
particulier.
Occupons-nous dans celui-ci de cet ensemble de
soins qui nous rappelle ceux que les Xénophon, les
Oppien, les Varron, les Ovide, les Columelle, les
Ausone, se plaisoient à proposer aux deux peuples les
plus illustres de l’antiquité, que la sagesse de leurs
préceptes , le charme de leur éloquence, la beauté de
leur poésie et l’autorité de leur renommée inspiroient
avec tant de facilité aux Grecs et aux Romains, et qui
étoient en très-grand honneur chez ces vainqueurs de
l’Asie et de l’Europe, que la gloire avoit couronnés de
tant de lauriers.
S U R L A N A T U R E D E S P O I S S ON S . ' V
L’homme d’état doit les encourager, comme une
seconde agriculture : l’homme des champs doit les
adopter, comme une nouvelle source de richesses et
de plaisirs.
En rendant en effet les eaux plus productives que la
terre, en répandant les semences d’une abondante et
utile récolte , dans tous les lacs , dans les rivières, dans
les. ruisseaux, dans tous les endroits que la plus foible
source arrose, ou qui conservent sur leur surface le
produit des rosées et des pluies, ces soins que nous
allons tâcher d’indiquer, n’augmenteront-ils pas beaucoup
cette surface fertile et nourricière du globe , de
laquelle nous tirons nos véritables trésors? et l’accroissement
que nous devrons à ces procédés simples et
peu nombreux, ne sera-t-il pas d’autant plus considérable
, que ces eaux dans lesquelles on portera, entretiendra
et multipliera le mouvement et la vie ,
offriront une profondeur bien, plus grande que la
couche sèche fécondée par la charrue, et à laquelle
nous confions les graines des végétaux précieux?
Et dans ses momens de loisir, lorsque l’ami de la
Nature et des champs portera ses espérances , ses souvenirs,
ses douces rêveries , sa mélancolie même, sur
les rives des lacs, des ruisseaux ou des fontaines , et
que, mollement étendu sur une herbe fleurie, à l’ombre
d’arbres élevés et touffus, il goûtera cette sorte d’extase,
cette quiétude touchante, cette volupté du repos,
cet abandon de toute idée trop forte, cette absence