
i i x S U P P L E M E N T DE L ’A N T. E XPL IQ . Liv. I I I .
des chrétiens qui mêloient Diane avec la vraie religion, & qui faifanr pro.
feffion de Chriftianifme, retenoîént encore bien des chofes qui regardoient
fes fuperftitions payennes, & le culte des faux dieux, & entr’autres de Diane.
On en trouve des exemples jufqu’à la fin du treiziéme fiecle : en voici un
témoignage bien remarquable, tiré d’un manufcrit du quatorzième fiecle
qui m’a été commuuiqué par Monfeigneur l’Evêque de Conferans. Ce font
des ftatuts faits pour ce Diocèfe par un de fes prédecefleurs nommé Auger de
Montfaucon, frere de Raimond Bernard de Montfaucon, mon treiziéme
ayeul ; Auger fut fait Evêque en 1174- & mourut en 1304. Entre beaucoup
d'autres chofes très-utiles, & qui donnent bien des connoilTances touchant
la difcipline de ces temps-là, voici un article qui regarde ces fuperftitions,
& que nous mettrons ici tout entier, traduit du Latin.
„ Que perfonne n’éxerce la divination, foit par les forts, qu’on appelle
,3 dès Saints ou des Apôtres; foit par quelque forte décrit que ce puifîè être;
„ q u ’on ne cherche point à pénétrer dans l’avenir, ou à faire des maléfices
„ p a r l’ufage de quelque tablettes ou grimoires, ou par l’aftrolabe. Qu’au-
„ cune femme n’ofe fe vanter qu elle va la nuit à cheval avec Diane, déeffe
„ des payens, ou avec Herodiade & Benfozia, ni mettre une troupe de fem-
;, mes au rang des divinités : c’eft une pure illtlfion du démon. Que ceux qui
„ employent de certaines herbes pour fe préfer ver de mal, ne le fervent d’au-
„ cune forte de vers, ni d’enchantement, ni de toute autre chofe que de
„ l’Oraifon Dominicale, & du Symbole, & ne metrent que l’un ou l’autre
„dans les billets qu’ils pendront, ou qu’ils lieront. On peut pourtant fe
„ fervir d’herbes & de pierres contre le démon, pourvu que ce foit fans en-
„ chantement. On n’obfervera pas fuperftitieufement les jours Egyptiens,
„ les conftellations , les Immtwns 5 les Kalendesde Janvier, les jours, les mois,
„ l’année ; le cours de la Lune, du Soleil, des Etoiles , dans la créance qu’il
„ y ait en ces chofes quelque vertu ; car ce ne font, ni les caufes , ni les fi-
;, gnes des évenemens. Qu’on ne prépare point dans les maifons en ces
„jours , ou en ces temps ci-delTus marqués, des tables chargées de viandes,
„ o u des lampes, & qu’on ne mene point aux mêmes temps dans les rués
„& dans les places publiques, des chantres ou des choeurs de mufique. Il
„ n’eft pas permis de regarder certains temps comme heureux ou malheureux,
liam. Chriftiani quippe non pauci eranc qui cul-
cumDianæ cum vera relligionc mifcerent, & qui
Chriftianam profefß rélligionem * multos fervarent
ritus ad profannm cultüm & deos illos Veterum
fpedtantes. Cerce ad ufque finem decimi tertii
læculi horum exempla dcprehcndimus. Hujufce rei
teftimonium infigne profero, edudtum ex manuf-
cripto codice decimi quarti fæculi , cujus mihi
copiam fecit illuftriffimus dodtiélimufque Epifco-
pus Conferanenfis : in quo ftatuta funt Augerii de
Monte-falconis Epifcopi item Conferanenlis , qui
frater erac Raimundi Bernardi de Monte-falconis
inter avos meos retro numerando decimi terrii.
Ille vero Augerius in Epifcopum Conferanenfem
eledtus fuit anno 1179. & anno 1304. vivere dè-
fïit. Inter alia porro mulra admoduin utilia , quae
circa difciplinam illius ævi fingularia compledtun-
tur i en locum circa fuperftitiones hujufcemodi,
quem hi'c integrum exfcribimus.
Nullus etiam per fortes quas fanttorum feu Apofto-
lerum vacant, aut cujufcumque fcriptura infcriptione ,
divinattorns fciemiam profiteatur , aut futura vel qua-
libet maleficia in tabulis vel codicibus , feu in ajlro-
labio requirat. Nulla mulier fe noUurnis e quit are cum
Diana dea paganorum, vel cum Herodiade feu Ben-
foz,ia, & in nurhina multitudinem mulierum profitea-
tur, H<tc enim d&monica efi illufio, Nemo in herb arum
collovationibus car min a , incant ationes aut alias ob-
fervationes prater dominie am orationem & Jymbolum
adhibeat : nec in brevibus fujpend'endis vel ligandis
aliquid prater ilia feribat : danioniuni tamen fubfti-
nendi ( fic) licet petras & herbas fine incantatione
habere. Dies quoque JEgyptiaci , corificllationes, li-
niationts , Kalenda Januarii, initia menfium , dies,
menfes , annus , curfus Luna, Solis & fyderum fu-
perftitiofe obfervari non debent , credendo videlicet in
illis virtutem inejfe, quoniam fitperiora non junt caufit
rerum , ct (fed) figna. Sed nec in pr ami fits ditbus
feu temporibus menfa cum epulis vel lampadibus in
domibus funt paranda, vel per vicos & plateas can-
tores & chord ducendi. Nulla etiam ternpora funt
faufta vel infaufta exifiimanda , ut in eis nolit vel vtcn
D I A N E. W
en forte qu’on le garde de rien commencer dans ceux-ci, & qu’on corn-“
mence tout dans ceux-là. Il eft auffi défendu de pronoftiquer les bons ou “
mauvais évenemens fur le vol & le gazouillement des oifeaux, ou fur “
le mouvement des membres, ou lùr l’afpeél de quelque animal.
Nous défendons aulfi de tirer auguré fur les douze lignes du ciel, pour ‘‘
les mariages3 & pour les fruits qui en doivent naître; ni pour quelque cC
autre chofe que ce puifle erre. Nous ordonnons à nos Prêtres de publier ce “
ftatut aux jours de Dimanche, pendant la célébration de la fainte Melfe,
Et fi après ces défenfes faites quelqu’un vient à tomber dans les cas ci- “
devant expofés, qu’il foit privé de l’entrée de l’Eglilè & de l’ufage des-“
Sacremens;r& fi le cas le requiert, qu’il foit excommunié & puni parles“
autres voyes ordinaires.
.Voilà bien des fuperftitions payennes, qui le font conlèrvées dans le
Chriftianifme jufqu’à la fin du treiziéme fiécle, & peut-être plus bas. Les
forts ont été de tout temps; ceux qu’on appelloit des faints ou des Apôtres
ont été inventés dans le Chriftianilme. Les courfes noéturnes à cheval avec
Diane, étoient des reftes du paganifme : ces enchanterelfes joignoient à
leur troupe, Herodiade & une certaine Benlozia qu’on ne connoit point :
on parlera plus bas d’Hérodiade. L’ulàge qu’on permet ici de faire de l’Oraifon
Dominicale, & du fymbole, pourvu qu’il n’y ait point d’enchantement;-
cet ufage, dis j e , ne fe pourrait pas permettre aujourd’hui après tant
d’expériences que le menu peuple abufe des prières les plus faintes pour des
preftiges & des enchantemens.
Les jours Egyptiens étoient en grande vogue dans le paganifme; on les
trouve marqués dans les anciens Calendriers. Celui que le P. Petau a don-:
né dans fon Uranologie p. 151. & qui fe trouve auffi dans Bucherius & dans
Lambec, met les jours Egyptiens deux ou trois fois dans chaque mois.
Saint Auguftin en parle ainfi dans fon commentaire fur l’Epitre aux Galates
chap. 4 . Plenu f i n t cowventicula, nojira hominibus , qui ttmpora rerum agen-
darum à Matbematicis accipunt. Jam vero ne aliquid inchoetur, aut oedificio-1
m m , aut hujufmodi quorumlibet oferum, diebus quos JEgyptios vocant, foepe
etiam nos manere non dnbitant s c’eft-a dire , Nos ajfemblées font pleines de
lit aliquid inchoare. Nec ad volatum vel garritum
avium, vel ad moturn alicujus mernbri, aut ad alictt-
jus animalis afpettum aliquid ejfe profpere venturum
'vel non , pronofiicandum.
Interdictmus etiam ne quis per duodecim figna coeli
najeentium in tonjugio foci undo, vel hujufmodi ilia ob-
fervet. Qiiicumque autem pofi generales prohibitiones
quas in Atiiffarum folemniis diebus Dominicis per Sa-
cerdotes fieri pracipimus , contra pramijfa fecerint, in-
grejfus Ecclefia & Ecclefiaftica Sacramenta eis omni-
no inter dicant ur , & fit necejfitas fuerit, excornmunica-
tionts vinculo innodentur, aliifque remediis arceantur.
E11 mu leas ethnicas fuperftitiones s qua: ad ufque
fincm decimi tertii fieculi apud Chriftianos quof-
<iam fervata: fuerunc, inque fa:cula pofteriora force
dedudtre- funt. Sortes quorumcumque tempo-
rum fuere : qua: Sandtorum vel Apoftolorum appellate
funt j tempore Chriftianifmi haud dubie
fuiit adinvcnttc. Nodturna: ilia:, equitationes cum
i^iana , ex profana veteri ilia relligione promana-
cant. Prteftigiatrices porro ilia: turmte .fua: Hero-
Tomc L
diadem & Benfoziam nefeio quaro adjungebanr.
De Herodiade infra agetur. Ille ufus Dominicæ
Orationis & Symboli qui hîc permittitur quafî
legitimus, modo nu lia fit incantatio ad ju nota ; ufus
ille, inquam , non poflèt hodie ut licitus permit-
ti » cum tôt experimentis exploratum fît, infimam
plebem vel fandtiffimis & probatilïimis uti ver-
bis ad præftigias & incantationes.
Dies Ægyptiaci apud profanos illos Veteres ce-
leberrimi erant. In vetuftilEmis namque Kalen-
dariis annotantur. Kalendarium illud quod Peta-
vius in Uranologia fua dédit pa. iyz’. quod etianr
Bucherius & Lambecius ediderunt, dies Ægyp-
tiacos bis terve in qu^ibet ménfe annotât:. Hos
Ægyptiaços dies Augumnus commémorât in com-
mentario in Epiftolam ad Galatas cap. 4. his ver-
bis : Plena funt conventicula nojira hominibus-, qui
tempora rerum agendarum à Alathematicis accipiunt.
Jam vero ne aliquid inchoetur aut adificiorum aut
hujufmodi quorumlibet operum, diebus quos Ægyp-
tios vocant, Jàpe etiam nos monere non dubitant. Hi
P