des êtres réels et des objets sensibles, nous ne devons peut-être pas en faire contre eux
u n sujet de reproche. Peut-être des vues profondes étaient-elles cachées sous ce système
si grossier en apparence. Il est certain du moins qu’en ne cherchant point à faire illusion
par les productions de l’a rt, n i à tromper les yeux p a r des images perfectionnées,
les prêtres de l’Égypte élevèrent une insurmontable b a rriè re entre leu r peuple et l’idolâ
trie .... Devant un e statue à tête d’ëpervier, de crocodile ou de taureau, l’Égyptien
re stait muet e t froid. Elle servait seulément à faire ressortir aux yeux les caractères ou
les symboles su r lesquels devait se fixer l’attention.
« Il y a cependant, à ce que je viens de dire, une exception qui mérite- d’être in d iquée,
c’e st que les Égyptiens o nt été très-vrais dans la représentation des animaux. À cet
égard,- ils ont quelquefois poussé le mérite de l ’imitation ju sq u ’au point de satisfaire
nos naturalistes les plus exigeants.... Généralement, les figures d’animaux, dans les bas-
reliefs et les papyrus égyptiens, offrent une ressemblance de formes, u n dessin ferme,
u n tra it correct et n aïf et cette sorte de grâce qui tie n t à la naïveté même. Or, comment
peut-il se faire que des artistes qui ne pouvaient produire qu’un seul homme aient si bien
représenté un boeuf, u n lion, e tc.? — C’est que les Égyptiens gênés de toutes manières
par l’observation des règles, intimement liée à celle des rites , et ne pouvant faire
l’homme comme il est, mais comme leurs prêtres l’avaient fait, devaient nécessairement
donner à leurs personnages cette roideur obligée, ces formes convenues qui ne sont
pas dans la nature, niais qui é taient dans le u r système religieux. O r, cette gêne
n ’existait probablement pas pour les animaux, qui é taient bien aussi des expressions
figurées, mais d ’un ordre moins élevé. Dans cette partie de son travail, l'a rtiste pouvait
donc plus librem ent im ite r la n a tu re ou s’abandonner à son génie ; e t de là cette vérité
de formes, cette justesse de mouvement et d’atti tude qu’on y remarque le plus souvent.
Mais l ’habitude d ’une éternelle contrainte devait se faire s en tir à l’a rtiste ; ces' figures
ont encore u n a ir roide e t une allure constamment uniforme et régulière. »
Avant de p ren d re la parole à notre tour, nous ferons observer que ‘lies savants,
dont nous venons de faire connaître les appréciations, tout en p rétendant (en dehors
d’IIérodote et de Strabon ou de ceux qui ont suivi leurs traces) nous révéler la véritable
synthèse d ’un a rt national égyptien (dont on avait fait litiè re u n in stan t pour
rehausser l’a rt grec, qui lu i doit cependant Son origine), ne nous ont apporté, en
réalité, que des données in c e rta in es, sinon des hypothèses un peu risquées, et sans
aucun lieu historique plausible.
C’est qu ’en effet il nous semble qu ’il était bien in u tile de chercher au loin une
solution à notre portée : nous n ’avons eu besoin, q u an t à nous, de re co u rir n i à
l’ardente imagination des Grecs, ni à des rapprochements avec, les civilisations
cliinoisejet h in d o u e ; il noustfsiiffi, pour h trouver, de reconnaître qu’“ ne condition
spéciale dans leu r e x is te n c e ^ e s t- à -d ir e . l e » sifcution & H de toute inflttence
étrangère, a eu p S ré sulta t de développer le génie des peuples de la primitive
Égypte, dans toute ¡'gon originalité e t dans. toute ^ force.
Un cercle u n iq u e d’idées domine p a rto u t chez eux, e t qifeles trouve poussées
jusqu’à leurs dernières conséquences; tout s’y ressemble, le gouvernement, les lois,
les le ttre s et les a rts , touVy egf
Ue cette doublé subordination de la pensée à l ’u n ité et àT.absolutisme, chez un
H H H H isolé, résulte .l’immobilité la plus tcomplète. Aucune révélation ne
menant ébranler le u r au to rité , W ’id é e g |d e ce peuple, paryenues promptement à
§ u r développement extrême, s | fixent bientôt, pour demeurer les mêmes,à jamais:,
ses lois et ses moeurs sont éternelles, et * | peut .même devenir u n crime que d’en
changer non pas lés: principes, mais l i s moindres habitudes p r a tiq u e s .^ .
Habitants, d'une "oasis douée d’une fertilité sans égale, et perdue au milieu
d e s ^ 9 8 -de rA f r i q u j |j ||d e l’Arabie,- les: ¿gypiicns em ÿ p rtir e n t p e u ; étrangers,
à tip u rs voisins pendant des siècles, le u r individualité p u t se fo rm e r r|rigm a le : ils
en imprimèrent .profoadéiuent..le sceau à to u t ce qu’ils inventè rent; leu r civilisation
se produisit toute d’une seule pièce et revêtue d’u n caractère d’immutabilité absolue.
Ce. caractère e s t celui qui frappe su rto u t lorsque l’on passe en revue les chefs-
d’ë u v re le s 'd iv e r s âges d ^ l a civilisation égyptienne. Hi la ^violence b rutale des
..conquérants perses,’ n i le génie sympathique et in s in u an t des Grecs, ni les habiles
efforts de l’administration romaine pour fusionner toutes les races, ne p u re n t entamer
les idées et l e s p oe u r s . de ce peuple in é b r a n la b le g pm ip ses pyramides. Aussi
lé iré fo n n a is san t à Æ p o i n t ennemi de tout perfectionnement, parce que le perfectionnement
est changement p e r p é tu e ||ï t - o n s a n ^ ç i h e m e n t dans Platon, qu ’il
■ y avait des lois contre les artistes qui siéèartaient, en u n genre quelconque, des
modèles adoptés.; .défense qui subsistait p our tous les produits des arts.
Quoi qu’il e n . s p i t ^ w i c i q u e l était (d’après au teu r grec du temps de
Marc-Aurèle) le sp ec tâM qu’offràit, avant l’invasion des Perses, Memphis, la capitale
de l’Égypte, que ïfe so u v en ir de sa'splendeur scientifique7 et artistique fit surnommer
l’Athènes égyptienne :
• « Le palais des rois occupait le fond d’un e grande place vis-à-vis le temple des
trois; grandes.'divinités ; i l ’était, à la fois, le.’centre vivant de toutes les sciences et
de tous .les beaux-arts. On n ’y avait négligé rie n de ce qui procède de leu r intelligence
: il ne semblait avoir été construit et décoré que pour exercer tous les talents
et pour conserver toutes les connaissances utiles aux hommes.